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L'entretien de la semaine
LEILA LARBAOUI, SOCIOLOGUE À L'UNIVERSITE 20-AOÛT-55 DE SKIKDA, AU SOIRMAGAZINE «Le mariage mixte ou interculturel est en soi une aventure humaine agréable par le brassage des races et des ethnies
Publié dans Le Soir d'Algérie le 11 - 05 - 2013

Leïla Larbaoui a bien voulu se prêter au jeu des questions-réponses. Dans cet entretien, elle a apporté son éclairage sur le phénomène des unions mixtes, les raisons qui poussent femmes et hommes à choisir leurs partenaires en dépassant leurs frontières, et qu'au-delà de l'amour, qui est le fondement même du mariage, peuvent se cacher des conflits de culture, voire de religion.
Soirmagazine: Les mariages mixtes enregistrent une augmentation sensible ces derniers temps ?
Comment l'expliquez-vous ?
Leïla Larbaoui : Je ne dispose malheureusement pas de statistiques pour rendre compte objectivement de cette situation, car il nous faut des chiffres et un calendrier de référence pour que notre jugement soit fiable, mais si nous faisons abstraction de ce genre d'aléas et que nous nous tenions à la question, nous constaterons, qu'en dehors de l'aspect privé du phénomène, c'est une tendance reliée au fait que la mondialisation a façonné les relations autrement, c'est-à-dire que les frontières physiques qui jadis cantonnaient les peuples dans leurs territoires respectifs n'existent plus, vaincues par le progrès des moyens de transport d'où une forte mobilité des individus, y compris celle qui se soustrait aux législations en vigueur dans le secteur, engendrant la multiplication des chances de rencontre entre les personnes. Rajoutant au tout, et dans le même contexte, l'apport considérable des nouvelles technologies spécialement celles se référant à la communication qui, reconnaissons-le, ont réduit les distances, rendu possible la rencontre entre les usagers d'une manière instantanée. Cela dit, cette révolution numérique et dont les jeunes suivent les moindres évolutions de très près constitue réellement un enjeu ainsi qu'une gageure de leur attachement à leur époque où le virtuel cherche à devenir réalité toutefois s'il n'en constitue pas déjà une.
Quelles sont les raisons qui poussent les jeunes à se marier avec des personnes de confession différente ?
Les raisons sont multiples ; on peut néanmoins esquisser un premier inventaire en ramenant quelques éléments de réponse parmi lesquels la raison du cœur et contre laquelle la raison n'y peut rien. On sait dorénavant que les jeunes Algériens, avec l'instruction et la désuétude de la société traditionnelle, choisissent de plus en plus leurs partenaires sans que la famille s'y oppose comme c'était le cas avant. Forts de cette marge de liberté, les jeunes peuvent faire fi des frontières de tous genres, y compris celle des religions et aller choisir un partenaire dans une autre obédience, et là et en tant que musulmans, les jeunes ont cette certitude que finalement le conjoint se rendra à l'évidence et finira par se convertir à l'Islam. Et là, le summum de la béatitude est atteint, car on sera récompensé par Allah et on récoltera l'admiration de toute la communauté comme étant un bon musulman qui agit en ambassadeur et qui pratique la prédication auprès des non musulmans. Mais d'autres causes viennent consolider ce choix, tel que la sensation que procure notre rapport aux Européens caractérisé à la fois par l'attraction et le rejet, l'admiration et le dédain et qui a été profondément exprimé par le défunt Tayeb Saleh, le célébrissime romancier soudanais dans son livre La saison de l'immigration vers le Nordet exprimant les rapports sentimentaux de son héro principal comme une revanche contre la suprématie de l'Occident, à l'heure où les Européens eux-mêmes remettent en cause leur canon de beauté. On s'obstine ici à dire et à répéter que les Européens sont les plus beaux, et du coup, les Européennes deviennent l'idéal à épouser. Un jeune qui rentre au pays au volant d'une voiture et au bras d'une Européenne donnant l'impression, au-delà de sa conquête amoureuse, qu'il a tout conquis et acquis n'est pas considéré uniquement comme un modèle de réussite sociale mais donne envie aussi.
On assiste également à des mariages de femmes avec des non-musulmans qui se convertissent à l'Islam. Qu'en pensez-vous ?
On ne peut pas confirmer ou infirmer l'authenticité de la conversion de ces personnes du fait que la foi relève du domaine du spirituel, de l'ésotérique et du privé. Or, on sait très bien, et sans vouloir tenter un procès d'intention, que beaucoup de gens le font d'une façon formelle et puis continuent à mener le même train de vie sans se soucier outre mesure des retombées d'un tel acte. Quant aux femmes, il y a celles qui l'assument pleinement et reconnaissent que c'est un simple stratagème afin de fuir les langues médisantes et venir à bout de la réticence parentale et quelquefois même un refus net, et celles qui le vivent mal et se font des cheveux blancs recourant bien des fois au divorce ou bien s'arment de patience en se disant que des hommes nés musulmans commettent des frasques tout autant et personne ne trouve rien à redire. Donc, un mariage mixte peut vite tourner en boîte de Pandore et aux concernés de savoir à quoi ils auront affaire car un mariage peut toujours miroiter monts et merveilles et un mariage mixte l'est davantage.
Souvent, ce sont pour des considérations de régularisation de papiers que des musulmans, notamment des Algériens, convolent en justes noces avec des chrétiennes. Votre avis sur ce point...
C'est juste et d'ailleurs cela est valable au même titre pour les musulmanes et pour les mêmes motifs, sauf que pour ces dernières, la religion musulmane est formelle : le mariage avec un non-musulman est interdit mais en frôlant l'interdit les frondeuses, la plupart des cas, le cachent à leur famille et surtout au père, figure du patriarche par excellence, garant de la transmissibilité des traditions et pas des moindres puisqu'il s'agit de la religion. L'explication de ce fait trouve ses racines dans le fait que les lois à l'encontre des immigrés se sont endurcies de par la montée de la droite qui, même en s'absentant du pouvoir, le temps de quelques mandats, laisse des lois souvent indélébiles, un état d'esprit et des attitudes qui trahissent un mépris à peine maquillé contre les étrangers ce qui poussent ces derniers à chercher des subterfuges pour pouvoir survivre et le mariage mixte en fait partie quitte à acheter le consentement du partenaire et de se faire colorier blanc ou gris afin de décrocher la résidence, sésame d'un nouveau départ et du bon pied cette fois-ci, puisque au bout du compte, pour ne pas dire du tunnel, il y a le travail au grand jour et enfin un simulacre de stabilité chèrement payée.
On relève que les mariages entre les musulmans et les juives ou juifs et musulmanes sont minimes par rapport aux unions entre personnes de confessions musulmane et chrétienne ? Quelle est votre analyse ?
D'abord, et là aussi, les statistiques nous font terriblement défaut parce que la proportion des juifs par rapport à la population générale en Occident est minime, car si nous voulons rester pertinent, ne serait-ce que pour un court instant, nous devrons spécifier le détail suivant : qu'est-ce que nous entendons par chrétien : si cela signifie une personne pratiquante, il y en a peu par rapport aux personnes non pratiquantes, mais en revanche, si nous ciblons les personnes issues de tradition chrétienne, là, nous nous retrouverons devant un fourre-tout, à savoir les athées, les convertis au bouddhisme, hindouisme et toutes les autres formes de religion asiatiques et non monothéistes. Mais pour revenir au cœur de la question, je dirai que la représentation du juif dans l'imaginaire arabo-musulman est pour quelque chose et qui est rattachée à trois blocs majeurs de notre histoire, que je résumerai succinctement et successivement dans le rapport au prophète Mohamed que la paix soit sur son âme et qui a souffert de la trahison des juifs et lors de l'édification du premier Etat musulman, le rôle des juifs dans le conflit franco-algérien et qui se sont positionnés à côté des Français après la loi Crémieux effaçant d'un revers de main deux millénaires de présence et d'identité algérienne et enfin la question palestinienne qui, au demeurant, constitue pour les Algériens un souci majeur qui, disons-le, n'a rien à envier à leur propre libération. Rappelons au passage les traits de ressemblance à s'y méprendre entre les deux destins algérien et palestinien particulièrement en ce qui concerne la nature de l'occupant et sa logique d'occupation à la fois ségrégationniste et expansionniste. Tout cela fait que l'Algérien se méfie du juif et l'accepte moins que le chrétien et bien entendu encore moins dans ce qui a trait à l'intime, comme une relation de mariage qui, comme on le sait, génère une parenté par alliance et donc ascendance et, par voie de conséquence, héritage et succession. Il ne faut pas omettre également que les membres de la communauté juive de France ou d'ailleurs ne brûle pas non plus de désir ou d'impatience pour convoler en justes noces avec des Arabes ou des musulmans désignés comme goyim et donc jugés infréquentables.
Un dernier mot...
Le mariage mixte ou interculturel est en soi une aventure humaine agréable et pleine de promesses de par le brassage des races et ethnies, la fusion de deux cultures ou plus, une chance inouïe pour les enfants de se ressourcer, sauf qu'il peut vite virer à la mésaventure si les conjoints ne s'y sont pas suffisamment préparés ou si la décision de s'unir dans l'urgence répond uniquement à l'urgence administrative ; c'est pourquoi Rousseau disait : «Le plus lent à promettre est toujours le plus fidèle à tenir.» Malencontreusement, le mariage mixte et dans la plupart d'entre eux finit brisé et avec des dégâts collatéraux considérables qu'on sait, surtout en ce qui concerne les enfants victimes des feux croisés et qui en plus de leur déchirement entre leurs parents connaissent d'autres formes de déchirement psychologique et identitaire portant souvent des prénoms hybrides témoins de leur destin ou des prénoms qu'ils verront très vite changés selon le bon gré des accueillants et de la terre d'accueil. C'est la raison qui a fait dire à Friedrich Nietzsche : «Le mariage est une longue conversation, mais pour que la conversation soit un succès il faut que les interlocuteurs sachent parler et prennent le temps de le faire.»


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