Enveloppé dans son burnous, il savait en ces moments où le temps semblait se précipiter qu'il emportait au fond de son cœur un morceau de cette terre qui l'avait vu naître, grandir et combattre pour la liberté. Il n'aurait jamais imaginé que le duc d'Aumale pût, après lui avoir serré chaleureusement la main avant son départ, faillir à sa parole, à son engagement. Après une résistance contre le corps expéditionnaire français qui aura duré quinze ans, l'Emir Abdelkader signe sa reddition. La nuit du 24 décembre 1847, il attend sous une pluie battante et un froid mordant d'embarquer avec ses proches et ses compagnons sur Le Solon, qui a mouillé dans le port Djemâa-Ghazaouet, à une centaine de kilomètres des frontières marocaines. C'est cette dernière nuit passée sur le sol natal qui a donné son titre au récit historique de Abdelkader Djemaï. 97 personnes (dont l'Emir) embarquèrent sur cette frégate cette nuit-là. L'Emir avait obtenu du duc d'Aumale la promesse que lui et sa smala seraient conduits à Alexandrie ou à Saint-Jean d'Acre. Engagement non respecté... «Enveloppé dans son burnous, il savait en ces moments où le temps semblait se précipiter qu'il emportait au fond de son cœur un morceau de cette terre qui l'avait vu naître, grandir et combattre pour la liberté... Il n'aurait jamais imaginé que le duc d'Aumale... pût, après lui avoir serré chaleureusement la main avant son départ, faillir à sa parole, à son engagement. » (page 149). En effet, c'est à Toulon que l'Emir et ses proches seront débarqués. Libéré quelques années plus tard, l'Emir est envoyé en exil en Syrie. Il décédera à Damas le 26 mai 1883. «Il mourut, dans sa soixante-quinzième années, d'une maladie du cœur. Depuis son départ de Djemâa-Ghazaouët, qui portera le nom de Nemours jusqu'en 1962, le fils de Zohra et de Mahieddine avait vécu loin de son pays durant trentesix années d'exil, soit presque la moitié de son existence. Abdelkader l'Algérien, comme l'appelaient les Syriens et les gens du Moyen-Orient, fut inhumé à proximité du tombeau d'Ibn Arabi, dont il avait habité la maison » (P161). Le 5 juillet 1966, sa dépouille est rapatriée à Alger où il est inhumé au carré des Martyrs du cimetière d'El Alia. Abdelkader Djemaï est né à Oran en 1948. Après un court passage dans l'enseignement, il travaille comme journaliste collaborant dans plusieurs périodiques de la presse nationale. L'auteur de La dernière nuit de l'Emira déjà signé : Mémoires de nègre, Camping, Zorah sur la terrasse et Matisse à Alger. Sabrinal La dernière nuit de l'émir,de Abdelkader Djemaï, Editions Barzakh, 2013, 600 DA, 167 P.