Le ministre de la Justice et garde des Sceaux, M. Charfi, a usé de tous les arguments pour plaider l'avant-projet de loi portant organisation de la profession d'avocat, lors d'une séance plénière de l'Assemblée nationale. Selon lui, «ce projet de loi vient consolider le secteur de la justice». Abder Bettache - Alger (Le Soir) - Les débats en plénière sur l'avant-projet de loi portant organisation de la profession d'avocat va durer deux jours durant lesquels les députés de l'opposition et de la majorité feront valoir leurs arguments et donneront leurs avis sur la question. La commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l'APN a, pour sa part, présenté son rapport relatif au projet dans lequel elle propose plusieurs amendements, dont 9 sur le fond et plusieurs autres sur la forme. Elle propose également des amendements, notamment aux articles relatifs aux cas d'incompatibilité avec l'exercice de la profession d'avocat, aux incidents d'audience et aux cas d'agression contre l'avocat lors de l'exercice de ses fonctions. A ce sujet, elle a estimé nécessaire de clarifier «les cas de non-incompatibilité pour inclure les tâches d'enseignement dans les universités et les établissements de l'enseignement supérieur dans l'article 26 du projet de loi définissant les cas d'incompatibilité ». Cet article prévoit que la profession d'avocat est incompatible avec toute fonction administrative, judiciaire ou activité commerciale ou industrielle ou tout emploi impliquant un lien de subordination. L'avocat investi d'un mandat parlementaire ou d'un mandat de président d'une assemblée locale élue ne peut cependant, et pendant la durée de ce mandat, exercer la profession. Concernant les incidents d'audience survenant entre l'avocat et le magistrat, la commission propose en cas d'incident grave lors de l'audience, la levée immédiate de celle-ci et la dévolution du traitement de ces incidents au président de la juridiction compétente et au délégué du bâtonnier pour un règlement à l'amiable. En cas de non-résolution du problème, l'incident sera soumis au président de la cour et au bâtonnier. Le texte initial stipulait qu'en cas d'incident d'audience entre le juge et l'avocat, ce dernier est suspendu de ses fonctions et le traitement du différend est dévolu au bâtonnier. L'article en question figurait parmi les principaux articles rejetés par les avocats qui avaient boycotté les audiences et organisé un mouvement de protestation durant l'été 2011. Selon l'article initial, l'avocat peut être suspendu de ses fonctions et présenté devant le conseil de discipline à compter du «jour de l'incident» jusqu'à ce que ce dernier statue sur l'action disciplinaire. Concernant l'article 25 relatif à l'outrage fait à un avocat dans l'exercice de ses fonctions, la commission propose d'introduire l'agression contre l'avocat sachant que l'article prévoit les mêmes peines stipulées dans le code pénal relatives à l'outrage à un magistrat. La commission suggère également la suppression de la condition d'âge de l'article 33 qui exige que le candidat à l'accès à la préparation au certificat d'aptitude à la profession d'avocat soit âgé de 23 ans au moins. S'agissant des conditions d'accès à la profession d'avocat prévues par l'article 34 du même projet de loi, la commission propose de réduire l'ancienneté d'exercice exigée des magistrats voulant intégrer la profession d'avocat de 15 ans à 10 ans au moins. Selon ledit article, sont dispensés du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les magistrats ayant au moins 15 ans d'ancienneté et les titulaires d'un doctorat ou doctorat d'Etat en droit. Pour rappel, les représentants des avocats au sein de l'Union des barreaux ont affiché, à cet effet, une fin de non-recevoir concernant certains articles contenus dans ledit avant-projet. A ce propos, les avocats considèrent «que la démarche de la chancellerie, notamment à travers l'article 24, s'inscrit à contrecourant des principes universels portant exercice de la profession d'avocat». Et pourtant, dans l'exposé des motifs de l'avant-projet de loi portant organisation de la profession d'avocat, il est indiqué que la «profession d'avocat revêt une importance particulière dans le sens où elle est indissociable des droits de la défense, en particulier et des droits de l'Homme et des libertés en général. Elle constitue une des garanties de l'Etat de droit. C'est la raison pour laquelle, les Etats lui ont consacré une place prépondérante dans leurs constitutions respectives, et l'Algérie à l'instar de tous ces pays en dispose dans son article 151 de la Constitution». Pour les membres de l'Union des barreaux d'Algérie, «l'avant-projet de loi portant organisation de la profession d'avocat tel qu'il est conçu par la chancellerie, notamment dans son article 24, est en contradiction totale avec tous les textes et lois portant garantie des droits de la défense et du justiciable». Pour eux, «il est inconcevable qu'un avocat soit soumis lors de l'exercice de son métier à l'appréciation du procureur général. C'est une violation flagrante du droit de la défense»..