Par Kader Bakou Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé n'est ni fortuite ni involontaire. Toute ressemblance avec des événements passés ou présents n'est pas une pure coïncidence. Je vous ai compris est une pièce théâtrale belge, interprétée et conçue par des Françaises d'origine algérienne. La pièce a été jouée en France, en Belgique et en Algérie, à Béjaïa et à Alger, ville où avait retenti le fameux «Je vous ai compris !» Deux Françaises Sinda Guessab et Valérie Gimenez sont parties étudier en Belgique, à l'Ecole supérieure d'acteurs de Liège (Esact). Pour leur projet de fin d'études, elles avaient pour seule consigne : «Qu'avez-vous envie, besoin, de dire aujourd'hui ?» Sinda Guessab proposa de travailler sur une interview de sa mère née en 1953 en Algérie et dans laquelle elle revient sur son arrivée en France avec un père engagé dans la lutte pour l'indépendance, sur les années de guerre et sur sa vie familiale dans l'Hexagone. La vie et la guerre en Algérie ont aussi laissé des empreintes dans la vie de Valérie Gimenez, dont le père est né en 1954 en Algérie au sein d'une famille d'origine espagnole. Cela a donné la pièce Je vous ai compris dans laquelle Sinda Guessab et Valérie Gimenez incarnent leurs deux parents. Samir Guessab, le frère de Sinda, sur son ordinateur, dessine en direct le décor dans lequel évoluent les deux comédiennes-conteuses. Le pied-noir raconte ses souvenirs d'Algérie heureux ou douloureux et sa propre version de l'histoire. «L'Algérienne de souche» en fait de même. Dans les deux récits croisés, l'émotion est reine. A Béjaïa lors de l'édition 2013 du Festival international du Théâtre, Sinda Guessab et Valerie Gimenez ont rappelé qu'elles ont tenu à éviter tout discours manichéen au sujet des événements historiques racontés dans leur œuvre d'art dramatique. «Je vous ai compris» est la phrase-clé du discours de Charles de Gaulle, le 4 juin 1958, à Alger. Sur le coup, les pieds-noirs partisans de l'Algérie française pensent que c'était un soutien à leur cause. Plus tard, certains historiens ont fait remarquer que la phrase était volontairement ambiguë, destinée à rassurer tout le monde, sans prendre position. Mais pour Alain Duhamel, interviewé par Historia en septembre 2009, la trahison la plus retentissante de la Quatrième République fut celle du général envers les Français d'Algérie. L'humoriste français Pierre Desproges est allé même jusqu'à dire que le message réel aux pieds-noirs était : «Je vous hais, compris ?» Les partisans de «L'Algérie française» pensent, jusqu'à aujourd'hui, que de Gaulle les a trahis. Le FLN, en revanche, considère le général comme le plus implacable ennemi de la Révolution algérienne. Si de Gaulle a, apparemment, «compris» tout le monde, personne en revanche n'a compris de Gaulle ! K. B.