Dans une tribune commune publiée lundi dans Le Monde et le Washington Post, Barack Obama et François Hollande ont évoqué l'Afrique, particulièrement le Sahel. «Plus qu'ailleurs, c'est peut-être en Afrique que notre nouveau partenariat trouve son expression la plus visible» et de citer le Mali, «tout le Sahel (....) tout le continent, du Sénégal à la Somalie». Dans leur ligne de mire, en tête, la Libye. «Le Sud-libyen est devenu un véritable trou noir», déclarait le 26 janvier l'amiral Edouard Guillaud, chef d'état-major des armées françaises aux journalistes, propos rapportés par le Canard Enchaîné dans son édition du 29 du même mois. On apprend également qu'Américains et Français se sont mis d'accord sur la constitution d'un «groupe de travail de haut niveau» sur la sécurité en Afrique. Sans perdre de temps — c'est d'ailleurs l'un des objectifs de la tournée du ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian en Afrique — la France est en train de reconfigurer son dispositif militaire en Afrique pour le rapprocher des foyers de tensions djihadistes, notamment dans le Sud libyen. Dans cette perspective, Tessalit (nord du Mali) à une centaine de kilomètres de l'Algérie, figure en bonne place dans le dispositif militaire en cours qu'il a d'ailleurs présenté le 24 janvier à son homologue américain Chuck Hagel ! Quant aux Etats-Unis, leurs forces spéciales sont déjà à pied d'œuvre dans ce Sud libyen regorgeant de richesses minières, non loin de la frontière algérienne. «Les Etats-Unis estiment que la menace de désintégration du Sud libyen est telle qu'ils ne peuvent plus se contenter d'un simple traitement aérien de cette menace», écrivait Le Figaro du 1er février citant une source militaire française. Sans crier gare, le Maroc, sur les conseils amicaux de l'Elysée, est en train de s'inviter au Mali et sera sans doute partie prenante du dispositif militaire franco-américain en cours. D'ores et déjà, le 31 janvier, Mohammed VI a reçu en audience une délégation du MNLA (Mouvement de libération national de l'Azawed, touareg) venue solliciter son aide dans le conflit qui l'oppose à Bamako. «Cette audience, indiquait un communiqué du Palais, s'inscrit dans le cadre des efforts soutenus et permanents de Sa Majesté le Roi, en vue d'instaurer durablement la paix et la stabilité dans ce pays frère et de contribuer à un règlement de la crise malienne.» Avec l'aval des Français — Bamako n'a malheureusement pas son mot à dire — les services marocains s'activent au Mali depuis déjà quelque temps. Il n'est pas inintéressant d'ailleurs de noter que parmi la délégation accompagnant Mohammed VI au Mali où il effectue une visite de deux jours depuis mercredi, figure le patron des services marocains Mohamed Yacine Mansouri. Au regard de ces faits, force est de constater que l'Algérie est confrontée à ses frontières sud et est à des évolutions dangereuses pour sa sécurité nationale. Elle risque d'être entraînée dans un conflit où le militaire primera sur les solutions de type politique impliquant les acteurs régionaux. Et que vient faire le M'zab dans cette affaire ? Révélateur d'une crise identitaire non résolue parce que non assumée par l'Etat algérien, la crise du M'zab, région située à proximité des sites gazier (Hassi R'mel) et pétrolier, peut réveiller des particularismes régionaux de nature à embraser tout le Sud algérien. Des revendications de type identitaire combinées aux colères nourries par des décennies de frustrations sociales sur fond d'activisme wahhabite et djihadiste constituent assurément un mélange explosif pouvant créer une situation d'ingouvernabilité propice aux pressions internationales. Ces dernières sont d'autant plus fortes qu'il s'agit de minorités en proie aux exactions meurtrières impulsées par les appels à la haine, comme cela s'est vu au M'zab à l'endroit des Mozabites traités de «kharedjites» par des gens nourris au biberon salafiste-wahhabite. Et ce, d'autant que pour les capitales occidentales, «chacun ne peut pas faire ce qu'il veut chez lui en dépit du droit international» tient lieu d'argumentaire pour intervenir. Ce n'est donc pas en minimisant la gravité de la situation au M'zab en la réduisant à un conflit interconfessionnel — ibadite contre sunnite — voire à un complot fomenté par on ne sait qui, que l'Algérie sera à l'abri. H. Z. P. S. Mes sincères condoléances aux familles des militaires mort dans le crash de l'avion.