Entretenir son intérieur s'avère une tâche de plus en plus ardue. Généralement faute de temps, beaucoup de maîtresses de maison font appel à une femme de ménage. Cependant, la demande existe, mais peine à trouver preneur. Ce métier n'est pas encore pratiqué de façon professionnelle, car il y a celles qui répugnent à l'exercer. Pour l'heure, il n'est pas encore considéré comme un métier et souffre d'une assez mauvaise image. Meriem, cadre dans une entreprise étatique : «Lorsque je voudrais être généreuse, je saurais à qui m'adresser.» Pour Meriem, le métier de femme de ménage est nécessaire dans la vie de tous les jours. «C'est vrai qu'avant, nos mères s'occupaient exclusivement du ménage quotidien et des repas, aujourd'hui, ce n'est plus le cas, c'est une réalité à laquelle il faut s'adapter», dit-elle. Et malgré son emploi du temps chargé, Meriem fait en sorte de faire son ménage elle-même à contrecœur. «J'ai fait appel à plusieurs femmes de ménage ; j'étais à chaque fois insatisfaite. Ce qui importait pour elles, c'était combien elles gagneraient. J'avais l'impression qu'elles ne prenaient pas au sérieux ce qu'elles faisaient. A la fin de la journée, je me retrouvais encore plus fatiguée que si je l'avais fait seule. Je devais à chaque fois passer en revue ce qu'elles ont fait. Ce qui est stressant, enrageant et fatiguant !» Pour l'entretien de l'immeuble où elle vit, une femme de ménage a été engagée. «Une des locataires a décidé de faire appel à une femme de ménage une fois par semaine à raison de 300 DA pour chacun des six locataires. J'étais tellement contente, et du fait que j'étais souvent absente, j'ai payé quatre mois d'avance. Eh bien, elle venait lorsqu'elle le voulait. Elle a pris l'habitude de demander le seau d'eau et le frottoir. Le pire, lorsque c'était mon tour de les lui donner, j'ai appris à mes dépens — j'habite au dernier étage — qu'elle les laissent au rez-de-chaussée sans vous prévenir», relève cette maman de trois enfants. Ce qui énerve encore plus notre interlocutrice est l'image que ces employées donnent de leur métier. «Elles donnent l'impression d'être des mendiantes déguisées en femmes de ménage. Elles ne réalisent pas qu'elles sont en train de vendre un service. Elles sont tout le temps en train de mendier et de quémander. Cela me gêne. Lorsque je veux être généreuse, je saurais à qui m'adresser. On n'a pas besoin de me forcer la main. Moi, j'ai besoin de quelqu'un que je paye pour accomplir des tâches bien précises», poursuit-elle. Cependant, Meriem explique qu'il y en a qui ont trouvé la perle rare : «Ma sœur a pu dénicher une femme de ménage excellente, discrète et dynamique. Le seul inconvénient est qu'elle demande à être transportée à l'aller comme au retour. Mais ma sœur a pu combiner avec. Et tant mieux pour elle.» Farida, retraitée : «Je préfère donner de l'argent à une femme de ménage qu'à une mendiante.» Retraitée, Farida a une toute autre conception de la femme de ménage. «C'est vrai que je ne peux pas faire le ménage comme avant. Ma santé ne me le permet plus. Mes enfants passent régulièrement pour le faire. Cela ne m'empêche pas de faire appel de temps en temps à une femme de ménage.» A la question de savoir pourquoi puisqu'elle n'en a pas réellement besoin, Farida sourit avant de répondre : «Franchement, pour moi, il s'agit d'aider cette femme financièrement plus qu'autre chose. J'habite dans un quartier résidentiel et il y a plusieurs femmes qui font le tour de la maison pour mendier. Il y en a même qui ont des habitudes. Elles savent à quelle heure elles doivent passer et exigent de l'argent, en plus à partir d'un certain seuil. Elles refusent la nourriture et les vêtements. Ce qui les intéresse donc c'est l'argent sans rien en retour. Pour moi, j'ai dit stop. Alors lorsqu'il y a une femme qui se présente pour faire le ménage, je dis oui. Mes enfants ne sont pas d'accord car ils me disent qu'un jour je me ferai agresser ou voler. Alors, je fais attention, je ferme ma chambre à coucher et je dis toujours que mon mari ou mes enfants ne vont pas tarder à arriver ou bien carrément qu'il y a quelqu'un d'autre dans la maison. Je préfère donner de l'argent à une femme de ménage qu'à une mendiante. Je trouve que c'est une façon positive d'encourager le travail.» Amel, femme de ménage : «Je travaille pour aider mon mari.» Amel est une femme de ménage d'une vingtaine d'années. Mariée depuis une année à un homme sans revenu fixe, exerçant comme manœuvre dans les chantiers, elle enchaîne les ménages sans rechigner. «Ma mère a travaillé et travaille toujours comme femme de ménage. Nous sommes 11 enfants. Je n'ai pas fait des études poussées. Tout ce que je veux, c'est vivre dignement. Nos maigres revenus servent tout juste à couvrir notre loyer dans un misérable quartier. Mais bon, el hamdoullilah», explique Amel tout sourire. «Lorsque je fais le ménage chez les gens, je sens qu'ils ne me font pas confiance. J'évite par exemple d'entrer dans la chambre à coucher ou je demande carrément de la fermer. Lorsque je finis une tâche, je demande à ce que la propriétaire vienne vérifier mon travail. Je ne veux pas qu'en partant elle me dise que je l'ai bâclée ou bien encore que je les ai escroqués. J'aurais préféré faire un autre travail mais c'est mieux que rien et c'est encore mieux que de tendre la main. J'essaye de préserver ma dignité. En entrant dans une maison, on ne sait jamais à quoi s'attendre alors je prie Dieu et je compte sur Son aide. Je ne peux rien faire d'autre. Je voudrais que les gens changent de regard envers les personnes qui essayent de s'en sortir même si la vie ne les as pas gâtées», conclut-elle.