Abdelaziz Bouteflika a réuni, hier mercredi dans l'après-midi, au siège de la présidence de la République, le Conseil des ministres qui a essentiellement consacré ses travaux à l'examen et à l'adoption du plan d'action du nouveau gouvernement que conduit Ahmed Ouyahia. Un plan d'action qui va s'adosser sur une nouvelle loi sur la monnaie et le crédit, approuvée par la même réunion du Conseil des ministres. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Cette nouvelle loi sur la monnaie et le crédit permettra au gouvernement de recourir «au financement interne non conventionnel», comme souligné par le communiqué de la présidence de la République, autorisera la Banque d'Algérie à prêter directement au Trésor public afin de permettre à ce dernier de financer les déficits du budget de l'Etat, de financer la dette publique interne et d'allouer des ressources au Fonds national de l'investissement», explique encore le communiqué. Ce mode de financement, adopté par d'autres pays, permettra ainsi, d'abord, d'éviter le recours à l'endettement extérieur et, ensuite, «vise à éviter une régression de la croissance, dangereuse économiquement et socialement» comme le soulignera Bouteflika dans son intervention à l'issue de l'adoption de cette nouvelle loi sur la monnaie et le crédit. A cette occasion, Abdelaziz Bouteflika ne manquera pas, encore une fois, de tirer la sonnette d'alarme quant à la grave crise financière que traverse le pays depuis 2014. «Il appartient à chacun de nous, par-delà de tout clivage, y compris politique, de s'associer à la préservation de l'indépendance économique et financière du pays, par l'adhésion aux réformes et aux efforts que cela requiert». Bouteflika appellera ensuite les partenaires sociaux et le gouvernement à «faire preuve de solidarité et de coordination pour garantir la progression des réformes dans la paix sociale» fait certainement allusion ici, à certaines mesures impopulaires à venir comme les réformes sur les retraites. Aussi, Bouteflika s'adressera-t-il, directement aux travailleurs qui sont appelés «chacun dans son secteur, à redoubler d'efforts pour faire avancer les réformes destinées à moderniser la gestion du pays et notamment l'efficacité et la compétitivité de son économie pour offrir au pays des revenus substantiels à même de garantir , sur le long terme, la pérennité de la justice sociale et de la solidarité nationale». Au plus haut niveau de l'Etat, on ne cache plus la réalité de la grave crise économique. Dans son plan d'action, le gouvernement Ouyahia qualifie cette situation de «préoccupante». Cela est annoncé dans le communiqué de la présidence. On y lit, par exemple : Frappée depuis 2014 par une crise financière, «qui s'annonce durable», selon le plan d'action, l'Algérie enregistre un déficit commercial de plus de 20 milliards de dollars en 2016 et un déficit continu de la balance des paiements. L'Algérie demeure économiquement souveraine grâce aux réserves de change accumulées durant les années passées, mais ces réserves fondent sans cesse passant de 193 milliards de dollars en mai 2014 à 105 milliards dollars en juillet 2017. Au niveau interne, la situation des finances publiques est «préoccupante», car le recul de la fiscalité pétrolière a généré des déficits budgétaires répétés, entraînant la consommation de la totalité de l'épargne du Trésor qui était logée au Fonds de régulation des recettes (FRR), épuisé en février 2017. Le Trésor a eu recours à d'autres ressources complémentaires (emprunt national, des versements exceptionnels de dividendes par la Banque d'Algérie et un emprunt extérieur auprès de la Banque africaine de développement. Cependant, la situation «demeure extrêmement tendue au niveau du budget de l'Etat : dans la situation actuelle, l'année 2017 sera clôturée avec des difficultés réelles, alors que l'année 2018 s'annonce plus complexe encore». En l'absence de solutions nouvelles, le pays encoure le risque, ou bien, d'une «incapacité à assurer la dépense publique, avec des conséquences économiques, sociales et même politiques périlleuses, ou alors un processus de perte de souveraineté économique». Face à cette situation, le plan d'action du gouvernement Ouyahia, adopté en Conseil des ministres, prévoit plusieurs mesures visant toutes à «rationaliser les dépenses publiques» et à trouver les fonds nécessaires, hors les recettes de la fiscalité pétrolière, pour éviter «des conséquences économiques, sociales et même politiques périlleuses» comme le souligne le communiqué officiel du Conseil des ministres. C'est ainsi que des réformes fiscales sont annoncées, de même «qu'une répartition équitable des transferts sociaux». En plus de certaines mesures drastiques visant à réduire les dépenses publiques. Il s'agit, finalement, d'un plan d'action qui tient réellement compte des réalités froides du terrain et qui, partant, suscitera assurément des levées populistes au niveau du Parlement. A plus forte raison, à la veille d'une campagne électorale.