Par Aziouz Mokhtar Lors des joutes contre le Mouloudia d'Alger, les seules qui vaillent, les plus importantes pour les peuples Noir et Rouge et Vert et Rouge, la galerie de l'USMA chambrait les Chnaoua par des «Douar, douar ya Guittoun, Mouloudia ouelate chifoune»... En ces temps-là, les Mouloudéens n'étaient pas encore devenus chnaoua... guittoun était un artiste. Un vrai manieur de ballons, maniaque de la passe, du corner et du coup franc. Temps béni. Véritable métronome au milieu du terrain, Lakhdar en faisait voir de toutes les couleurs aux CRB, ESS, ES Guelma de Séridi et de Hachouf, au MCO de Fréha, à l'USM Blida des Guerrache et Zaragossi... Face au CRB des Lalmas, Kalem, Achour, Hamiti, Djemaâ, Ammar, guittoun marquait et faisait marquer. Il n'aimait pas perdre. Surtout contre le Chabab et le Mouloudia. Contre le Mouloudia, ça se comprend, houma ouahda (mêmes quartiers - Bab El Oued, Notre Dame, Rampe Louni-Arezki (Erranvali), Soustara, Saint-Eugène (Santodji) Bab Ejdid, Fort l'Empereur, Cadix... il a joué et fait jouer plusieurs générations d'Usmistes. Salah, El Okbi, Krimo, Djermane, Meziani, Bernaoui, la main de Dieu bien avant Maradona contre l'Angleterre. guittoun ravissait les supporters de l'USMA dès son apparition sur le terrain. C'était la souffrance garantie pour les défenseurs adverses. Surtout celle du Mouloudia, d'Alger, évidemment. Contre les autres Mouloudias d'Oran et de Constantine, l'USMA pouvait perdre, ça ne prêtait pas à conséquence. Très à l'aise aussi bien comme milieu récupérateur offensif que comme animateur d'attaque, à l'époque on disait «inter», guittoun était un brillant footballeur. Avant l'indépendance, il opta pour l'ASSE, l'autre club de Bologhine (ex-Saint-Eugène), nanti, taâ legouar (celui des Européens) par opposition à l'OMSE, le Santodji des Algériens. Ce n'était pas un choix doctrinal, pourtant. C'était venu comme ça, la bande de copains de la «Consolation» entre Bab El Oued et le stade se décida de tenter le «disputement» en petites catégories, guittoun a été repéré et pris. Ensuite l'indépendance, les années USMA, les fabuleuses finales contre le CRB dont une par 3 à 5 et sur des décisions litigieuses — selon l'USMA — de l'arbitre. But de Hamiti contre son camp refusé par l'arbitre, blessure de El Okbi, le gardien volant non sanctionné et un penalty non sifflé. L'arbitre s'appelait Chekaïmi. Ce nom est bien connu à Soustara, quartier général de l'USMA. Lors de cette rencontre, trois buts de Bernaoui, tous servis par guittoun, ont répondu aux réalisations du trio d'enfer belcourtois Lalmas-Kalem-Achour. guittoun est mort, hier, à Paris suite à une pénible maladie. Cela fait longtemps que les supporters de l'USMA n'ont plus chanté «Douar douar ya guittoun, Mouloudia oualate choufoune (anime le jeu, anime le jeu guittoun, Mouloudia est devenu chiffon). La belle époque. De l'USMA, du Mouloudia et du football algérien.