Un nez rouge, un grand sourire et des cheveux colorés. C'est la panoplie d'un parfait clown. Mais sous cet air enjoué se cache une personne. C'est pour aller au-delà de la scène, que nous avons choisi de vous faire vivre la vie de Mino arc-en-ciel. Sac en bandoulière, habillé à la mode, Amine passe pour le parfait jeune Algérien bien dans sa peau. Dynamique et affable, il gère son agenda bien chargé pour cette période de l'année. «Nous sommes très demandés durant la période de fin d'année et pour la fête de l'enfance. Personnellement, je suis réservé pendant une quinzaine de jours d'affilée. Et Je ne m'en plains pas», dit-il tout de go en souriant. Mais que gère ce jeune de 28 ans ? Eh bien sa carrière et pas n'importe laquelle, celle d'un... clown. Ce jeune homme natif de Kouba est le cadet d'une famille de cinq enfants. Son choix de carrière n'est pas fortuit. Il explique : «Je ne pense pas que ce soit par hasard que je sois devenu clown. C'est un métier qu'on fait par envie, je dirais que c'est un choix, une vocation. Il faut l'aimer. C'était un rêve d'enfant. J'ai toujours fait en sorte de faire le pitre à la moindre occasion qui s'offrait à moi. Cela s'est s'accentué au sein de ma famille. Nous avons chez nous une ambiance très chaleureuse et formidable. C'est très important.» Ce n'est pas, en effet, par dépit qu'il suit une carrière de clown. Avec un niveau terminale, Amine n'entame pas directement sa carrière mais décroche un diplôme en informatique. «Par la suite, j'ai suivi une formation en animation sanctionnée par un diplôme et j'ai fait un stage en tant que clown auprès de professionnels étrangers. J'ai fait aussi du théâtre ce qui m'a permis d'avoir des notions artistiques. Cela m'aide énormément sur la scène devant mon public.» En quelques années, Amine a pu marquer son empreinte dans le monde clownesque algérien : «Mon nom de scène est Mino Arc-en-ciel. Mino est le diminutif d'Amine. Sur mes vidés postés sur Youtube, vous pouvez constater que je m'investis énormément auprès des enfants. Ils représentent pour moi l'innocence. J'essaye de m'améliorer chaque jour un peu plus dans cet art.» Pour cela, Mino se prépare minutieusement. Au-delà du maquillage et la tenue, il faut prendre le temps de comprendre la psychologie enfantine, de choisir les thèmes et de s'identifier à l'espace dans lequel il évolue. «Je m'exerce et me prépare régulièrement. Je m'auto-forme à cet art par la technique et le comportement. Malgré l'apparence, on ne peut pas s'autoproclamer clown du jour au lendemain. Il faut prendre en considération l'influence qu'on a sur l'enfant, apprivoiser ce bambin qui peut avoir peur ou bien aussi transmettre un message», relève encore Mino, qui voit la vie en couleurs. Et il préfère la voir ainsi pour ne pas considérer les regards malveillants des personnes. «En toute sincérité, le métier de clown en Algérie est mal vu, car on ne lui donne pas les moyens nécessaires pour qu'il ait sa place parmi tous les autres métiers. Dans le monde culturel en général, et artistique an particulier, il n'est pas pris en considération. Dans notre société, le choix d'être clown est souvent incompris. En un mot, un clown n'a pas de statut», résume Amine très lucide quant au regard qu'on porte sur son travail. Il ne restera pas sur cette pointe négative. Bien au contraire. «L'avenir du clown en Algérie peut être prometteur en considérant la demande et l'ouverture d'esprit de certains parents. Cependant, pour que sa place soit bien réelle, et en bon pôle, il faudrait que les choses soient prises au sérieux, pour qu'il ne soit pas relégué au second plan. Il doit être considéré comme un métier artistique au même titre que tous les autres. Il faudrait investir plus dans la formation, les échanges d'informations entre collègues et étrangers et surtout encourager l'organisation d'évènements en faveur des enfants en les sponsorisant.» Sur scène, Mino Arc-en-ciel met de côté toutes ces histoires de statut et autres tracasseries quotidiennes. «En face des enfants, j'oublie tout. Ce qui me plaît dans le métier de clown, c'est surtout d'être tout près des enfants, de l'innocence, de voir leurs grands yeux curieux. J'ai en face de moi le sourire sain et pur des bambins. C'est de donner de bons exemples pour bien vivre et bannir les mauvaises manières. Contribuer en quelque sorte à leur éducation, pas comme à l'école, mais dans la joie et la bonne humeur. Je suis très à l'aise car je me sens très complice avec ces petits anges.» Mino a ainsi le privilège d'entrer dans un monde qui peut être éphémère pour les uns mais constant pour les clowns. Celui d'un être immergé dans le monde angélique de la spontanéité, et la naïveté. Il conclut : «Pour moi, c'est un monde que personne ne peut comprendre, sauf lorsque nous sommes près des enfants, lorsque nous ressentons leur joie, leur tristesse et tout ce qu'ils dégagent comme sentiments, comme émotions. Pour les aimer il faudrait qu'on arrive à ressentir tout ça. Ce monde est tout simplement sain et quand je suis sur scène, je ne peux pas tricher avec. J'essaye de participer à tous les événements où l'enfant est présent. Pour cela, je suis bénévole dans les hôpitaux et dans divers centres spécialisés. Je me déplace aussi dans les villages démunis pour apporter un peu de joie de vivre.» Et faire voir la vie en arc-en-ciel !