[email protected] Erdogan en rêvait, sans trop y croire, Al-Baghdadi qui ne jurait que par sa grandeur, l'a fait : le califat est ressuscité, avec son calife bien sûr, son passeport, dont on ne sait encore s'il est biométrique ou non, et sa capitale Mossoul. En attendant d'imposer son autorité à tout le monde islamique, Al-Baghdadi installe les rudiments de l'Etat islamique en territoires conquis. Il s'agit essentiellement, vous l'aurez compris, de l'instauration de la Charia, et principalement de sa réglementation en matière de statut et de costumes féminins. Sont aussi concernés au premier chef les citoyens appartenant à des religions minoritaires et soumis désormais à l'impôt dit de capitation (djizia). Normalement, les pays qui ont soutenu le bras armé du califat, à savoir l'Etat islamique en Irak et au levant (EIIL), auraient dû se manifester sans tarder. Mais ils se tiennent cois, sans doute gênés et quelque peu honteux, après une victoire aussi facile, et si peu glorieuse, mais surtout inquiets devant les débordements des maîtres de Mossoul. L'Arabie Saoudite, qui a tout à voir malgré ses dénégations, dans les succès des insurgés sunnites, joue l'apaisement pour l'instant, en attendant que leurs alliés américains décident du sort de l'Irak. Ceci, alors que se dessine déjà en pointillés la partition du pays sur des bases confessionnelles, en plus du Kurdistan autonome qui deviendrait un Etat indépendant. Toujours est-il que ce califat nouveau ne paraît pas devoir semer la joie autour de lui, et surtout au sein de la famille qui l'a engendré. Comme il fallait s'y attendre, l'internationale des frères musulmans a refusé de donner sa bénédiction à la nouvelle entité politico-religieuse. Le cheikh Karadhaoui, cité ce dimanche par le quotidien Al-Quds, affirme que la proclamation du califat est nulle et non avenue. Cette initiative ne contribue pas à la réalisation du projet islamique, a affirmé le mufti du Qatar, parlant au nom de l'Union internationale des savants musulmans, dont il est le président. «Nous sommes plus que jamais pour l'avènement du califat, et aujourd'hui plus que demain, dit-il, mais l'initiative de l'Etat islamique en Irak et au Levant peut avoir des conséquences dangereuses pour les sunnites en Irak, et pour la révolution en Syrie». Karadhaoui estime, au demeurant, que l'EIIL, cette organisation connue pour son extrémisme porte atteinte au projet du califat, et qu'elle est la moins qualifiée pour contribuer à la réalisation de ce projet. Autrement dit, le califat doit être porté et dirigé par les Frères musulmans, la mouvance de Karadhaoui, dont les plans ont été m^is à mal, depuis la chute du président Morsi en Egypte. Un an après la chute du président islamiste, on apprend que la décision de l'armée de le déchoir n'est pas due seulement à l'impopularité grandissante de sa gestion des affaires du pays. Selon Mustapha Bakri, le très médiatisé directeur du magazine Al-Yawm-Al-Sabaa, l'armée égyptienne aurait décidé de destituer Morsi, dans l'urgence, et pour deux raisons : 1- Le président élu avait décidé de faire intervenir l'armée égyptienne en Syrie, afin d'aider à la chute de Bachar Al-Assad contre lequel il avait pris publiquement position. 2- Il s'apprêtait à destituer Sissi, le chef de l'armée, qui ne voulait pas engager le pays dans cette aventure. Mustapha Bakri, que l'on dit proche des dirigeants militaires, rappelle le discours enflammé du président Morsi, lors du meeting du 15 juin 2013 au stade du Caire, dans lequel il annonçait la rupture avec le régime de Damas, et son engagement aux côtés des insurgés. Le lendemain, un communiqué de l'armée précisait que le rôle des forces armées égyptiennes se bornait à défendre la sécurité nationale, et non pas à intervenir à l'étranger. Ce communiqué peut être considéré comme le premier coup de semence au président Morsi, ajoute notre confrère. Plus grave encore, en réponse à un mémorandum de l'armée sur la situation du pays, Morsi a répondu comme à son habitude : «Nous allons voir», puis il a demandé, comme si de rien n'était, que l'armée prenne en charge l'entraînement des insurgés syriens. Encore plus présent dans le champ médiatique, quoique moins crédible, Tewfik Okacha, le propriétaire de la chaîne satellitaire Les Pharaons, a été lui aussi un adversaire virulent de l'ex-président Morsi. Conséquence de son hostilité, la chaîne avait été suspendue et interdite de diffusion(1), avant de reprendre à nouveau ses activités après la chute du pouvoir des Frères musulmans. Comme il ne perd jamais le sens des réalités et des opportunités, l'ancien député du parti de Moubarak se mêle volontiers de morale publique et de défense de la vertu offensée. Il vient de se distinguer, en tirant à boulets rouges sur la chanteuse libanaise Haïfa Wahbi, déjà mise à mal par la presse égyptienne, à cause d'une série interdite, et parce qu'elle a des projets de mariage avec un Egyptien. Haïfa, dont un simple déhanchement fait chavirer les stades, vient de défrayer la chronique avec la série «Halawat rouh»(douceur de l'esprit ou des sens ?) interdite par la censure égyptienne(2). La série contiendrait des séquences hard et inflammables en vertu de la plastique particulière de l'artiste libanaise, souvent accusée de recourir à la chirurgie esthétique. Ce qui ne suffit pas à décourager ses admirateurs mâles, dont le futur mari égyptien. Or, c'est semble-t-il à cet heureux élu que Tewfik Okacha s'adresse indirectement en s'en prenant à tous les artifices dont l'artiste se serait pourvue durant ces dernières et longues années. Selon lui, la peau de Haïfa serait desséchée à force de recours systématiques à la chirurgie réparatrice, tout en nous chantant «Bouss-Al-Wawa», un tube plein de promesses. L'homme de télévision jure en bon patriote que la moins favorisée des paysannes d'Egypte est plus douce et plus tendre que Haïfa. Question de point de vue et de doigté, mais alors pourquoi Tewfik Okacha s'acharne-t-il à demander au ministre de l'Intérieur l'expulsion de la sculpturale libanaise? A. H. 1) Merci de ne voir là aucune allusion ou signe de sympathie à l'égard d'une chaîne privée nationale suspendue il y a quelques mois, et dont le directeur arpente le pavé parisien en se faisant passer pour une victime du «système». Une précision nécessaire ayant été justement victime, comme de nombreux autres confrères, des pratiques de ce marchand de quincaillerie et de ses acolytes, plus ou moins anonymes. J'y reviendrai en temps voulu. 2) Déjà disponible sur certains sites pour ceux qui veulent s'assurer que les atouts de Haïfa n'ont pas encore succombé à la sécheresse saisonnière. http://ahmedhalli.blogspot.com/