Les forces irakiennes ont remporté mardi une nouvelle victoire face aux djihadistes de l'Etat islamique en s'emparant de secteurs d'une autoroute stratégique, mais à Baghdad des proches de soldats disparus ont exprimé leur colère en envahissant le Parlement. Après avoir déjà reconquis miaoût le barrage de Mossoul (nord), l'armée, les combattants kurdes et les miliciens chiites ont remporté ces derniers jours de nouveaux succès face aux extrémistes sunnites de l'EI. Ils ont brisé dimanche le siège imposé par les djihadistes à la ville turcomane chiite d'Amerli, puis repris lundi la petite cité de Souleimane Bek, à 175 km au nord de Baghdad, et le village proche de Yankaja. Mardi, ils ont poursuivi leur contre-offensive, en reprenant le contrôle de certains secteurs d'une autoroute stratégique reliant le nord du pays à Baghdad, selon le général Abdelamir al-Zaidi. Fermée depuis près de trois mois, l'autoroute sera rouverte après avoir été nettoyée d'éventuels obstacles et mines placés par les djihadistes. A Amerli, les habitants ont accueilli dans la joie les premiers convois militaires après avoir résisté plus de deux mois au siège de l'EI, souffrant de la faim et de la soif, et craignant d'être massacrés. Sur le bord de la route, des enfants et des jeunes faisaient le «V» de la victoire. Mais la distribution de sacs de céréales et d'eau par les combattants a ensuite donné lieu à des échauffourées entre des habitants affamés. Tueries de masse Le début de l'offensive des djihadistes, le 9 juin, avait été marqué par la déroute des forces de sécurité, de nombreux soldats et policiers abandonnant leurs positions. Quelque 1.700 soldats s'étaient alors rendus aux insurgés, qui s'étaient emparés en quelques jours de vastes pans de territoires dans le nord du pays. L'EI avait par la suite publié des photos semblant montrer l'exécution de dizaines d'hommes en civil dans une zone désertique, affirmant en avoir tué des centaines au total. Exprimant leur colère, des proches de membres des forces de sécurité disparus ont pris d'assaut mardi le Parlement à Baghdad, où ils ont entamé un sit-in dans l'hémicycle, selon un responsable. Des policiers anti-émeutes tentaient de faire sortir du bâtiment ces manifestants qui exigent de savoir ce qu'il est advenu de leurs proches, a déclaré cette source. Les manifestants ont brisé des chaises dans la cafétéria du Parlement et attaqué certains députés et employés. Le Parlement devait aborder mardi la question de ces soldats disparus, mais les manifestants ont fait irruption avant l'ouverture de la session, qui a été repoussée à mercredi. Dans un rapport publié mardi, Amnesty International a dénoncé la «campagne systématique de nettoyage ethnique» lancée par l'EI pour «effacer toute trace des non-Arabes et des musulmans non sunnites» dans le nord de l'Irak. Amnesty assure avoir des «preuves» que plusieurs «tueries de masse» ont eu lieu en août dans la région de Sinjar où vivaient de nombreux Yazidis, une minorité kurdophone non musulmane. A Genève, le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a décidé lundi soir d'envoyer une mission pour enquêter sur ces atrocités, des «actes à une échelle d'inhumanité qui est inimaginable» selon la Haut- Commissaire adjointe de l'ONU aux droits de l'Homme. Alors qu'aucun bilan précis des pertes humaines depuis le début de l'attaque des djihadistes n'est disponible, l'ONU a indiqué qu'au moins 1.420 personnes avaient été tuées et 850.000 déplacées en raison des violences en août, mois au cours duquel les insurgés ont relancé leurs attaques. Négociateurs de l'ONU au Golan Cette crise a poussé les Etats- Unis à intervenir avec des frappes aériennes depuis le 8 août, premier engagement militaire de Washington en Irak depuis le retrait de leurs troupes fin 2011. Les raids ont notamment aidé à la reprise par les Kurdes du barrage de Mossoul, le plus important du pays. Selon l'élu américain Dutch Ruppersberger, les Etats-Unis pourraient préciser leur stratégie pour lutter contre l'EI cette semaine. Face à la menace représentée par ce groupe, le Premier ministre australien Tony Abbott a estimé mardi que l'usage de la «force extrême » était justifié. Plusieurs gouvernements ont d'ailleurs décidé d'armer les Kurdes, dont l'Allemagne. L'EI, qui a proclamé fin juin un califat à cheval sur l'Irak et la Syrie, est également impliqué dans le très complexe conflit syrien, où il affronte à la fois les rebelles et forces de Bachar al-Assad. Le Front Al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda, a demandé à sortir de la liste noire des organisations terroristes établie par les Nations unies en échange de la libération de plus de 40 Casques bleus fidjiens qu'il a enlevés jeudi sur le plateau du Golan, a révélé mardi l'armée fidjienne. Une équipe de négociateurs de l'ONU est arrivée sur le plateau du Golan en provenance de New York, selon la même source.