La 6e édition du Festival international de Béjaïa s'est ouverte mercredi soir au port de la ville, où une soirée chargée attendait les convives. Pour cette année, Omar Fatmouche, commissaire de l'événement, et son équipe ont vu grand, trop grand peut-être ! Sans doute, les organisateurs du festival ont voulu à la fois innover et marquer les esprits. Contrairement aux autres éditions, ce 6e FITB s'est ouvert au port de Béjaïa lors d'une cérémonie que d'aucuns ont annoncée grandiose. Et pour cause : un grand navire marchand allait être la scène des différents spectacles de cette soirée, sans parler du cadre féérique du port de Béjaïa dont l'accès était certes conditionné par un carton d'invitation mais où les activités étaient également visibles de la place Gueydon. Cependant, entre les interminables discours officiels (wali, directeur de la culture, président de l'assemblée de wilaya et commissaire du festival) et les défaillances techniques, cette ouverture a frôlé la cacophonie et le côté sensationnel promis par le programme était visiblement au-dessus des moyens du festival. Après de très longues allocutions des autorités locales, les spectacles, dont la qualité fut très inégale, se sont enchaînés sur le bateau : performance de trapézistes, danses contemporaines et traditionnelles, hommage à la Palestine à travers une reprise de chants emblématiques par la chorale du théâtre et, enfin, un hommage au défunt scénographe Abdelkader Farrah auquel a participé, entre autres, l'écrivain Omar Azradj... Ensuite, retour au Théâtre régional Malek-Bouguermouh pour la pièce d'ouverture : un spectacle de danse contemporaine de la troupe portugaise «Quorum Ballet», intitulé «Eléments» et mis en scène par Daniel Cardoso. Connue pour son répertoire exigeant et ses performances audacieuses, la compagnie a séduit le public bougiotte dès les premiers tableaux de la pièce. Exécutée par deux couples de danseurs, cette chorégraphie, rythmée par des morceaux immortels de musique classique à l'instar de la 25e symphonie de Mozart et la Fugue de Bach, s'est déroulée sur cinq actes, mêlant techniques de ballet traditionnel et esthétique contemporaine. «Eléments» possède une forte consistance psychologique qui lui permet, non seulement, de porter à son apogée l'expression corporelle mais aussi d'en faire une allégorie complexe et raffinée des sentiments humains les plus enfouis. Dans leurs corps-à-corps, leurs déchirements, leurs moments de tendresse ou de violence, les danseurs traversent une multitude d'états d'âme, sublimés par la grâce et la beauté de leurs mouvements. C'est un spectacle complet, où la scénographie évolue selon le contenu des tableaux : tantôt douce et éthérée, tantôt nerveuse et électrisée, la dramaturgie est ouverte à toutes les interprétations mais elle est surtout rythmée d'une main de maître par le chorégraphe et directeur artistique de la compagnie, Daniel Cardoso. D'autres éléments constituent des atouts considérables pour la mise en scène, à l'instar des lumières qui façonnent l'essentiel de la scénographie et contribuent, surtout, à donner tout leur sens aux matières utilisées par les artistes comme la terre et le sable. La 6e édition se poursuit aujourd'hui avec, entre autres, la journée d'étude consacrée à la vie et l'œuvre de Kateb Yacine, dont on commémore cette année le 25e anniversaire de son décès. Au programme : une table ronde sur les trois versions de la pièce Le cadavre encerclé, un récital musical et poétique et une projection du documentaire La troisième vie de Kateb Yacine de Brahim Hadj Slimane.