C'est une ministre très consciente de ce qu'elle fait et surtout très convaincue du bien-fondé de son projet, que nous avons découverte ce jeudi lors de sa visite dans la wilaya de Bouira. Nouria Benghebrit, car c'est d'elle qu'il s'agit, la ministre de l'Education nationale, en pédagogue aguerrie qu'elle est, sait de quoi elle parle et surtout, à qui elle a affaire. Tant du côté de ceux qui lui sont favorables et elle sait qu'ils sont la majorité dans le pays, mais aussi ses détracteurs dont elle sait également les capacités de nuisance. Cela elle le sait et elle le dit clairement lors d'une conférence de presse, animée au Centre national de lutte contre l'analphabétisme à Bouira, à la chandelle pendant une partie de cette conférence, à cause d'une coupure d'électricité en cette journée pluvieuse et glaciale. Nouria Benghebrit, imperturbable, s'est donné tout le temps qu'il fallait pour expliquer ses chantiers, sa vision du futur pour ce secteur des plus sensibles duquel dépend l'essor de tout pays, et le nôtre, surtout aujourd'hui, plus que d'autres tant notre système éducatif a été longtemps otage de considérations qui n'avaient rien à voir avec le savoir et la pédagogie qui hissent les peuples au firmament. Ainsi, notre ministre de l'Education s'attellera à expliquer les grands chantiers engagés depuis la première réforme de l'année 2003-2004 et l'évaluation qui s'est faite durant l'année 2014 sur les deux cycles, le primaire et le moyen. Une évaluation faite au mois de juillet 2014 avec tous les syndicats de l'éducation et les acteurs agissant dont les parents d'élèves. Depuis cette rencontre nationale, la ministre explique que des conclusions ont été faites et des recommandations engagées. Il y aujourd'hui nécessité de généraliser le préscolaire pour que l'équité ne soit pas un vain mot, entre tous les élèves de l'Algérie. Cependant, dira-t-elle encore, «l'on sait également que dans ce chantier engageant les cycles obligatoires que sont le primaire et le moyen, il y a un élément qui a été marginalisé : il s'agit de l'inspecteur qui doit être dorénavant au cœur de cette rénovation à laquelle nous aspirons ». La formation des enseignants doit également se faire en continu, rappelle-t-elle. Ainsi, la ministre décortique le triptyque : cycle obligatoire avec généralisation du préscolaire, population cible qu'est l'inspecteur et enfin, moyen qu'est la formation continue des enseignants. «Nous ne pouvons avoir un bac de qualité et des étudiants de qualité sans un enseignement de base de qualité», dira-t-elle. Après avoir détaillé son chantier concernant le cycle obligatoire dont la réhabilitation et les rénovations qui sont lancées au niveau de toutes les wilayas dans les écoles primaires et les collèges, et dont la ministre a eu à inspecter un très grand nombre ce jeudi à travers plusieurs communes de la wilaya, — des inspections qui l'ont ravie tant à Bouira, ces chantiers sont très bien avancés — la ministre parlera longtemps du deuxième chantier concernant le secondaire. Un chantier qui vient d'être lancé le 18 janvier avec des rencontres avec les directeurs d'éducation de tout le pays, puis des rencontres au niveau des wilayas avec les partenaires sociaux, les syndicats, les parents d'élèves, ainsi que les directeurs des lycées avec les inspecteurs, pendant le mois de février, avant d'aller vers les rencontres régionales au mois de mars ; pour finir avec une rencontre nationale au mois de juillet. Une explication et une conclusion qui amènent la ministre à parler de l'actuelle session du baccalauréat 2015 où, «rien ne changera» dira-t-elle. La ministre qui évitera de prononcer le mot «Ataba» ou seuil dont elle a visiblement horreur, expliquera que ce qu'elle avait avancé sur la fiche d'évaluation n'était que des propositions qui sont soumises à l'appréciation des partenaires sociaux, les syndicats. Là, elle explique que cette fiche d'évaluation ou de synthèse, qui ne sera comptabilisée que pour ceux qui ont leur bac, c'est-à-dire pour les candidats admis, ne sera valable et profitable que si cette note de synthèse est supérieure à celle du bac. Le candidat admis pourra profiter de sa moyenne générale de l'année car celle-ci sera ajoutée à la note du bac qui sera multipliée par trois, et le total divisé par quatre. Autant dire que la moyenne générale de l'année rentrera à 25% dans la note du bac mais à condition que cette moyenne générale soit supérieure à celle du bac pour permettre au candidat admis de l'avoir comme un bonus. Rappelons que sur ce dossier, la ministre a été accueillie durant la matinée et dès sa première escale à Lakhdaria, au niveau du nouveau lycée qu'elle a inauguré, par des dizaines d'élèves de la terminale venus des autres lycées de la ville, pour réclamer la fameuse «Ataba», en y inscrivant sur une grande banderole en arabe : «Talaba youridoune al Ataba» (les étudiants veulent le seuil ) et en scandant toujours en arabe, «Achaâb yourid al ataba» (Le peuple veut le seuil). La ministre a reçu dans une salle certains élèves de la terminale et leur a longuement expliqué la justesse de ses positions en leur rappelant les recommandations de l'Unesco qui est intransigeante sur les 32 semaines de scolarité et l'examen final qui doit porter sur tout le programme. «Voulez-vous que votre bac soit rejeté et non reconnu ailleurs ?» dira-t-elle à l'adresse de ces élèves avant de les rassurer sur les épreuves qui vont se baser sur un élève moyen. Cela dit, durant la conférence de presse, la ministre évoquera également le dossier des œuvres sociales sur lequel elle dira avoir donné le feu vert aux syndicats de l'éducation pour faire les propositions qu'ils jugent utiles pour leur bonne gestion, ainsi que le cas de l'enseignement de tamazight sur lequel elle réitère son appel aux directeurs et autres acteurs sociaux à l'échelle locale et au niveau du territoire national pour sensibiliser les gens sur cette langue afin de s'y intéresser et d'aller vers sa généralisation, mais tout en faisant encore une fois l'impasse sur l'abolition de son caractère facultatif, au moins dans les régions où cette langue est la langue maternelle de la population comme la Kabylie ou les Aurès. Elle terminera sa conférence par rappeler sa conviction que les réformes sur lesquelles elle s'est engagée ont gagné en maturité et en soutien de la part de tous les acteurs agissant au sein de la société et avec ces soutiens, avec ces engagements et ces moyens mis par l'Etat et le dévouement des responsables locaux pour leur mise en œuvre et leur concrétisation, «les fruits de ces réformes seront concrétisés dans 3 à 4 ans». Mais pour ce faire, et pour que «tous ces chantiers engagés soient réussis», la ministre en appelle également et surtout aux journalistes qui étaient présents en force dans la salle. «Je n'en appelle pas seulement à votre soutien, mais à votre engagement et votre contribution», dira enfin la ministre qui terminera ses réponses à 19 h40 et quittera la wilaya sous une pluie glaciale et torrentielle, mais avec une lumière éclatante puisque le courant électrique a été rétabli après une coupure qui aura duré une vingtaine de minutes alors que le point de presse a duré près d'une heure.