La rencontre entre le Comité des trente représentants de la société civile d'In Salah et Abdelmalek Sellal, à Alger, a été définitivement annulée. Selon Abdelkader Bouhafs, chef de file du mouvement anti-gaz de schiste, ce sont les conseillers de Abdelaziz Bouteflika qui se seraient opposés à cette démarche initiée par le RND. L'option de rechange aura été finalement la récente visite parlementaire du FLN. L'animateur du mouvement contre l'exploration du gaz de schiste à In Salah livre des détails sur une question qui jusque-là, ne trouvait pas de réponse. Pourquoi la visite attendue la semaine passée, du comité des trente représentants de la société civile à Alger, pour rencontrer le Premier ministre, tardait à se concrétiser ? Contacté hier, Abdelkader Bouhafs affirme que c'est la présidence de la République qui s'est opposée à cette initiative. «D'après nos interlocuteurs, ce sont les conseillers de Abdelaziz Bouteflika qui n'ont pas voulu de cette rencontre. Ils ont d'ailleurs préféré l'envoi du vice-président de l'APN accompagné d'une délégation parlementaire du FLN». En effet, ladite délégation s'est rendue mercredi et jeudi derniers passés, pour discuter avec la population d'In Salah, et porter ses doléances au président de la République. Il est toutefois important de souligner que c'est le RND qui était l'initiateur de la rencontre d'Alger, à travers son sénateur d'In Salah, Abbas Bouâmama. Des sources proches affirment que depuis le début de la protestation à In Salah, les parlementaires du RND et du FLN se livrent bataille en coulisses pour le règlement du conflit. «Une course effrénée s'est installée entre les deux partis depuis les premiers jours de manifestations anti-gaz de schiste. Le RND et le FLN se sabotent mutuellement les initiatives de négociation avec les citoyens d'In Salah. La visite parlementaire du FLN dans la région était programmée déjà en janvier. Sauf que les parlementaires du RND ont réussi à convaincre les représentants des manifestants de ne pas les rencontrer. Après quoi, le sénateur RND, Abbas Bouâmama, a initié une rencontre à Alger entre le comité des trente et Abdelmalek Sellal. L'accord de principe a été donné par le Premier ministère et la visite était encore à l'ordre du jour la semaine passée. Mais voilà que c'est finalement la délégation parlementaire du FLN qui revient à la charge et part à la rencontre de la société civile d'In Salah», relèvent nos sources. Mais il se trouve que la visite du vice-président de l'APN, à la tête d'une délégation parlementaire du FLN, à In Salah, n'a abouti à aucun résultat. Bien au contraire, au lendemain de cette visite, la situation s'est davantage compliquée. Les citoyens ont coupé les pistes menant au forage expérimental du Tidikelt, à 25 km de la ville, où ils ont d'ailleurs installé des tentes et campent depuis lundi. C'est dire que les manœuvres politiques ont plus contribué au pourrissement de la situation à In Salah, qu'au règlement du conflit. Mehdi Mehenni Abdelkader Bouhafs, chef de file du mouvement anti-gaz de schiste, à In Salah : «C'est l'impasse !» Le Soir d'Algérie : Un mois et demi après le début des manifestations anti-gaz de schiste, où en est la situation à In Salah ? Abdelkader Bouhafs : C'est l'impasse. L'ambiguïté totale. Le Premier ministre Abdelmalek Sellal affirme que l'exploration du gaz de schiste prend du temps, et peut aller jusqu'à 2022. Le P-dg par intérim de Sonatrach, M. Sahnoune, annoncera bientôt la fin de l'opération des forages expérimentaux dans la région. Le directeur de l'exploitation à Sonatrach, M. Khanfer, explique que le gaz non-conventionnel est un projet de l'Etat, et que seul le gouvernement peut décider de l'arrêt des forages. Des déclarations somme toute contradictoires. Nous n'avons rien compris au mode de fonctionnement du gouvernement. C'est peut-être fait exprès, cette manière de semer la confusion. Le Comité des 30 attend toujours d'être reçu à Alger ? C'est annulé. La présidence de la République s'est opposée à cette initiative. D'après nos interlocuteurs, ce sont les conseillers de Abdelaziz Bouteflika qui n'ont pas voulu de la rencontre du Comité des trente représentants de la société civile, avec le Premier ministre, Abdelamalek Sellal. Ils ont d'ailleurs préféré le dépêchement du vice-président de l'APN, accompagné d'une délégation parlementaire du FLN. Nous avons discuté en tête-à-tête avec M. Bouras, et sans la présence des autres députés. Il nous a expliqué que notre message n'a pas été reçu à Alger. C'est tout de même étrange que chaque émissaire détruit ce qui a été fait par son prédécesseur, fait table rase et reprend le débat de zéro. Nourrissez-vous quelques espoirs après cette visite parlementaire ? Nous n'attendons rien de cette délégation. Nous sommes revenus à notre mode de contestation initial. Nous avons fermé les pistes menant au forage du Tidikelt, à 25 km de la ville. Les jeunes de In Salah ont installé des tentes et sont en campement depuis lundi. Ils laissent uniquement le passage du carburant et les vivres. A chaque fois qu'ils soupçonnent des matières pouvant servir à la fracturation hydraulique, ils font appel à des ingénieurs de la ville pour vérifier la marchandise. Comment voyez-vous l'évolution de la situation dans les prochains jours ? Nous sommes pessimistes. Nous savons que le gouvernement n'a pas l'intention de renoncer à l'exploration du gaz de schiste. Il y a actuellement un dispositif sécuritaire impressionnant pas loin du lieu de campement des manifestants. J'espère qu'ils n'ont pas l'intention de faire usage de la force pour continuer le forage du schiste. Cela contribuera à faire dégénérer les choses. D'un autre côté, ils emploient d'autres machinations pour disperser les rangs des manifestants et casser la mobilisation. Ils usent des mêmes ruses et méthodes employées par le passé, en Kabylie et à Ghardaïa. Ils créent la zizanie et tentent en même temps d'acheter les gens. Des dossiers de concessions et projets agricoles bloqués depuis des années au niveau de l'administration ont été subitement remis sur la table et le wali de Tamanrasset a invité les concernés à assainir leur situation. Nos agriculteurs ont, bien sûr, refusé. Jusque-là, ils n'ont réussi à acheter personne. Nous sommes déterminés à ne pas faire marche arrière. Propos recueillis par