Le jugement prononc� tr�s tard dans la soir�e de lundi par la cour de Biskra dans la sombre affaire dite d'"El-Ha�cha" a �t� diversement appr�ci� par les associations f�minines pr�sentes � ce proc�s. Pour les unes, c'est une r�elle �volution, pour les autres les condamnations sont loin d'�tre � la hauteur des atrocit�s v�cues par les femmes. Les victimes, elles, celles qui ont fait le d�placement de Biskra, estiment que c'est d�j� un grand pas, m�me si elles consid�rent qu'aucune sentence aussi lourde soit-elle ne peut effacer les s�quelles physiques et morales provoqu�es lors de cette horrible nuit du 13 au 14 juillet 2001 dans le quartier d'El-Ha�cha, � Hassi-Messaoud. Apr�s la condamnation de trois agresseurs sur les six pr�sents le 3 janvier dernier au box des accus�s de la cour criminelle de Biskra � huit, six et trois ans de prison ferme et l'acquittement des trois autres, le procureur de la R�publique a acc�d� � la demande de r�paration civile introduite par les avocats. Requ�te qu'il avait refus�e auparavant. Les avocats de la d�fense n'y ont pas vu d'inconv�nient. "Il y a condamnation, il y a donc r�paration", nous pr�cisera ma�tre Khaloudja Khalfoune durant les d�lib�rations de la cour � ce sujet. Le collectif auquel appartient cette avocate, auteur d'une tr�s belle plaidoirie qui fera baisser la t�te aux accus�s et jettera l'�moi dans la salle d'audience, a demand� un million de dinars de r�paration pour chaque victime. Le juge, prenant certainement en consid�ration l'indigence des accus�s pour la plupart des ch�meurs, accordera � la partie civile cent mille dinars. Une d�cision que les victimes per�oivent comme une insulte. "Est-ce � ce prix qu'ils estiment notre honneur bafou� et tout ce que nous avons v�cu ?", s'interroge sur un ton col�reux M. F. qui demandera aux avocats de faire appel � ce verdict, avant de se raviser et d�clarer ne jamais pardonner au journaliste d' El Khabar dont le compte rendu de l'exp�dition punitive d'El-Ha�cha a �t� tr�s d�favorable � cette trentaine de femmes viol�es, battues et tortur�es. "Plusieurs femmes n'ont pas pu retourner chez elles parce qu'il avait dit que nous �tions dans des maisons de prostitution qui ont �t� attaqu�es par des gens qui voulaient purifier le quartier." Parce que l'intention premi�re de cette descente punitive men�e sous les cris "d'Allah akbar" comme le racontera une des victimes devant les juges et comme le fera remarquer au cours des d�bats ma�tre Salah Hanoun �tait de "nettoyer" le quartier de ces femmes qui vivaient seules, venues du nord du pays en qu�te de travail dans des entreprises p�troli�res, tout comme le font des milliers de jeunes gens. La cour de Biskra qui a pris en compte les circonstances att�nuantes pour prononcer l'acquittement de trois des jeunes accus�s qui, pour la premi�re fois se retrouvent devant la justice, a reconnu les autres coupables de viols, vols qualifi�s, atteintes � la pudeur, coups et blessures avec armes blanches. C'est l� une premi�re "victoire" pour les victimes puisque le tribunal de Ouargla avait condamn� les pr�venus � des petites peines de prison, et des peines avec sursis sous les chefs d'inculpation d'attroupement et d'incitation � l'attroupement. Verdict, pour rappel, rejet� par le procureur de Ouargla qui a introduit un pourvoi en cassation. Une d�marcha qui aboutira au proc�s qui s'est d�roul� cette premi�re semaine de l'an 2005 � la cour de Biskra. Contrairement � Ouargla, les victimes ont �t� accompagn�es dans leur d�marche par un collectif d'avocats qui aura eu une seule nuit pour d�cortiquer le volumineux dossier de cette tristement c�l�bre affaire d'El-Ha�cha. Les associations f�minines, telles que Rachda sans qui la pr�sence de trois des victimes n'aura pas �t� possible, ont �t� d�terminantes. Pr�sence qui d'ailleurs a beaucoup pes� dans ce proc�s, tant la cour n'est pas rest�e insensible aux t�moignages des femmes viol�es, qui ont v�cu les pires des s�vices sexuels. Les avocats de la partie civile en sont convaincus : les peines auraient �t� beaucoup plus lourdes et il n'y aurait peut-�tre pas eu de relaxe si toutes les victimes avaient fait le d�placement � Biskra. Il demeure que les victimes qui ont choisi de refaire leur vie, d'oublier et d'essayer de se reconstruire ont le droit de ne pas venir au tribunal. En principe, cela ne devrait pas peser sur la sentence. Ce qui n'est pas le cas des autres accus�s, plus d'une vingtaine, qui n'ont pas r�pondu aux convocations de justice et qui se sont vu condamn�s par contumace � vingt, dix et cinq ans de prison ferme. La cour de Biskra vient de "rendre justice" aux 39 femmes victimes de Hassi- Messaoud, reste que l'Etat doit aussi payer sa d�me � ces citoyennes alg�riennes qui veulent se reconstruire. Djamel Ould Abb�s, au d�partement duquel les femmes victimes ont rendez- vous ce matin, Chakib Khelil et Nouara Djaffar devraient tenir les promesses faites � ces femmes au lendemain du drame. Promesses jamais tenues. Les organisations de femmes qui ont par solidarit� et devoir tenu � assister au proc�s de Biskra comme l'Association f�minine pour l'�panouissement de la personne et l'exercice de la citoyennet� (Afepec), l'Association pour l'�mancipation des femmes (AEF), Bnet Fatma N'Soumer, le groupe femmes MDS et le R�seau Wassila, ont aussi le devoir d'accompagner dans leur progression ces femmes meurtries � jamais. Aucun verdict, aucune r�paration mat�rielle et toute la compassion du monde n'effaceront de leur corps, de leur m�moire les horreurs qu'elles ont subies au nom d"'Allah". Le drame dans cette affaire, � en juger par les d�clarations des victimes, les commanditaires et les meneurs n'ont m�me pas �t� inqui�t�s. Elles en tiennent pour responsable le procureur de la R�publique de Hassi- Messaoud en charge de l'affaire � ce moment-l�. Elles n'ont pas manqu� de remercier le procureur de la R�publique de Ouargla sans qui ce proc�s n'aurait jamais eu lieu.