Les mutations qui ont marqué l'économie algérienne, durant ces dernières années, imposent le développement de nouveaux instruments de croissance dont l'objectif est d'accroître et de promouvoir en priorité la production nationale. La réalisation de cet objectif passe, nécessairement, par la mobilisation de toutes les énergies nationales, y compris la diaspora algérienne à l'étranger, ainsi que par la coordination la plus étroite entre les différents secteurs et les acteurs économiques. La modernisation de l'outil de production et l'amélioration de la qualité des produits ainsi que le lancement de nouveaux produits ou le développement de procédés de fabrication, de marketing, de renforcement de la sécurité des produits sont des éléments à maîtriser pour élever le produit local au niveau des standards internationaux et relever, par conséquent, le défi de la concurrence étrangère et de l'informel. Le développement de la production nationale tant en qualité qu'en quantité doit constituer, aujourd'hui, une des priorités majeures de tous les acteurs économiques (pouvoirs publics, chefs d'entreprises et partenaires sociaux) pour atteindre l'objectif de la substitution des importations par une offre locale de qualité susceptible de couvrir, non seulement les besoins nationaux de consommation mais de dégager, également, des excédents à l'exportation. Pour ce faire, le ministère du Commerce a lancé une campagne dédiée à la promotion de la consommation des produits algériens, en direction des ménages, des institutions publiques et d'autres agents économiques. Le coup d'envoi a été donné hier, à l'hôtel El-Aurassi, par le ministre Benyounès. Une cérémonie qui a vu la présence de plusieurs ministres, du SG de l'UGTA et du patron du FCE. Salah Benreguia Amara Benyounès : «le marché intérieur profite aux produits importés» Action de promotion et de valorisation du produit algérien, la campagne «consommons algérien», lancée hier par le ministre du Commerce, est accompagnée par l'organisation, durant une semaine, (jusqu'au 3 mai prochain), des rencontres de vulgarisation, de sensibilisation et de stimulation des citoyens et des producteurs pour les inciter à consommer les produits algériens. Toutefois, cette relance effective et durable, aux dires d'Amara Benyounès, demeure subordonnée à l'engagement des mesures pratiques et pragmatiques susceptibles d'améliorer le taux de croissance de la production nationale et de permettre la satisfaction de la demande domestique. «Durant les deux dernières décennies, notre marché intérieur a connu un essor considérable qui profite, malheureusement, aux produits importés en raison, notamment, du manque de compétitivité de la production nationale, de l'insuffisance de l'offre, de la poussée démographique, des changements dans les habitudes de consommation et des contraintes bureaucratiques qui favorisent l'acte d'importation au détriment de celui de l'investissement et de la production», a reconnu, d'emblée, le ministre. Et d'ajouter que «la demande intérieure augmente d'année en année mais à un rythme plus rapide que celui de l'offre issue de la production nationale». «Le résultat de ce déséquilibre est, bien entendu, un accroissement des importations dont le financement est entièrement assuré par les recettes générées par les exportations d'hydrocarbures», selon le ministre. Toutefois, il reconnaît également que la question à laquelle il faut répondre aujourd'hui, est comment convaincre le citoyen algérien et l'amener à consommer le produit local et en faire bénéficier les entreprises productives. «Dans cet objectif, je dois rappeler que dans un contexte d'ouverture économique, il faut que l'entreprise algérienne arrive à gagner la bataille de la compétitivité pour, non seulement préserver ses parts de marché et en gagner de nouvelles, mais, également, pour faire face à la rude concurrence des produits importés.» Et de suggérer plus loin aux chefs d'entreprises et aux industriels algériens de redoubler d'efforts, sur tous les plans, en vue d'améliorer la compétitivité et la performance de leurs entreprises et pour combler les retards enregistrés au plan technologique et managérial. Amara Benyounès et les concessionnaires : «la loi sera appliquée dans toute sa rigueur» Comme il fallait s'y attendre, la réaction du ministre du Commerce à l'encontre de certains concessionnaires automobiles ayant procédé à des domiciliations bancaires d'importation d'importantes quantités de véhicules ne s'est pas fait attendre. Hier, au cours d'un bref point de presse organisé en marge de la Journée nationale «consommons algérien», le ministre du Commerce s'est montré menaçant envers les contrevenants. Pour M. Benyounès, «les lois de la République seront appliquées dans toute leur rigueur». Indiquant que l'attitude de «certains concessionnaires a pour objectif de contourner la loi», le ministre du Commerce soutient, toutefois, que le gouvernement est «décidé à réduire les importations et favoriser la consommation du produit algérien». Interrogé sur l'application du crédit à la consommation, une mesure prise récemment par le gouvernement, le conférencier a fait savoir qu'elle sera effective «d'ici le mois de Ramadhan, au plus tard». Le ministre Benyounès a souligné que le taux d'intégration d'au moins 40% pour les entreprises qui assemblent des biens destinés aux particuliers n'est plus exigé. «Ce sont, en tout, les produits fabriqués ou assemblés localement qui seront concernés par le crédit à la consommation», a-t-il justifié. Au sujet de la journée organisée par son département ministériel, le ministre a reconnu que «les résultats obtenus jusque-là, à la faveur des nombreuses mesures prises par le gouvernement durant ces dernières années et visant à encourager la mise à niveau de l'appareil national de production, restent en deçà des objectifs tracés et des moyens mobilisés». Et de citer l'exemple de la filière boissons alcoolisées dont les exportations ne dépassaient pas les 39 millions de dollars en 2014. S. B. Ali Haddad : le FCE projette de créer un label «Origine Algérie Garantie» Le président du Forum des chefs d'entreprises a, dans son intervention, indiqué que le FCE s'est toujours engagé en faveur de la promotion de la production nationale. «Le FCE a, dès 2002, perçu l'intérêt incontestable et l'impact important qu'une campagne de communication sur le thème "consommer national " peut avoir sur le développement de notre appareil de production», a fait savoir M. Haddad. Et de souligner que les consommateurs et les décideurs économiques doivent être sensibilisés à la nécessité de se mobiliser face aux enjeux de l'ouverture et, en particulier, au lien étroit qui unit la consommation de produits fabriqués localement et la défense et la promotion des emplois nationaux. «Lorsqu'un consommateur achète un produit importé, il favorise l'emploi dans le pays d'origine du produit», a-t-il insisté. Et d'annoncer que le FCE projette de créer un label : «Origine Algérie garantie» dont le lancement s'inscrit dans le prolongement de l'initiative «Mentoudj B'ladi». Sans toutefois les nommer, Ali Haddad fustige «les partisans du statu quo». «Allons-nous continuer à nous voiler la face, en engageant de faux débats stériles, faits d'amalgames insidieusement entretenus, et qui, en définitive, ne visent qu'à entretenir le statu quo ?» s'est interrogé le patron des patrons. Abdelwahab Nouri : «l'import-import sape le moral des producteurs locaux» Le ministre de l'Agriculture et du Développement rural a, lors de son intervention, souligné le caractère «déloyal» exercé sur les producteurs locaux par certains importateurs. Abdelwahab Nouri a également fait savoir que les importations tous azimuts sapent le moral des producteurs locaux, à tel point que certains songent à changer d'activité et pour se verser dans le segment de l'importation. «L'analyse des structures des importations montre que les produits viennent de 116 pays. On importe tout. La question qui se pose est de savoir si on a vraiment besoin de ces produits importés», a souligné M. Nouri. Et de noter que le secteur agricole a, toutefois, enregistré une croissance de 11% durant le précédent quinquennal. Son homologue de la pêche a rappelé que l'Algérien consomme de plus en plus de produits finis, une tendance à ne pas perdre de vue, en ce sens que l'innovation, la transformation en produits finis sont, entre autres, les segments qui pourraient tirer vers le haut l'économie nationale. Abdesselam Bouchouareb : «c'est une campagne utile, nécessaire et institutionnalisée» Le ministre de l'Industrie et des Mines a abondé dans le sens de la promotion de la production nationale. Pour M. Bouchouareb, «dans chaque acte d'achat d'un produit fabriqué localement, se joue le destin d'une famille, d'une usine». «L'outil industriel national existe. Mais les producteurs ont besoin d'un soutien plus efficace», selon M. Bouchouareb qui soutient que cette campagne ne doit pas viser uniquement les ménages mais doit toucher également les entreprises. Abdelmadjid Sidi Saïd : «c'est une journée historique, c'est un éveil et un réveil» Le secrétaire général de l'UGTA a appelé clairement à constituer un front commun contre une certaine catégorie d'importateurs. Pour Sidi Saïd, il y a désormais un «consensus national» concernant la politique de production et de consommation. «Au nom de l'UGTA, et différentes organisations patronales et de 2 millions de travailleurs, vous avez notre solidarité totale dans les démarches entreprises pour notre économie», a déclaré, hier, le patron de la Centrale syndicale. Et de qualifier «d'anormal» le fait que l'Algérie importe à hauteur de 300 millions de dollars de sardine congelée, de 50 millions de dollars de chewing-gum. «Maintenant, on dit basta à cette catégorie d'importateurs étrangers.»