«Un homme n'est jamais si grand que lorsqu'il est à genoux pour aider un enfant.» [Pythagore, vers 58 -495 av. J-C, philosophe et mathématicien] «La bulle était dans une pièce ordinaire de l'hôpital Edouard-Herriot à Lyon. Un 23 mars 1978. Des médecins, des infirmières, des puéricultrices et la famille du petit patient S.. Lui, seul dans sa prison de plastique. Intimidé par tous ces adultes qui l'entourent et l'observent. Inquiété par l'idée de l'immense. Pas exigé de lui pour sortir du cocon et affronter l'aventure. D'un côté, le confort douillet et la sécurité d'un «deuxième utérus», de l'autre, l'environnement hostile et brutal d'un monde inconnu. Pas plus qu'au nouveau-né, le choix ne lui a été offert ! Les adultes ont décidé pour lui... mais lui, petit bonhomme d'un an et demi, est fermement résolu à user de sa force et de sa ruse toutes neuves pour ne pas se laisser imposer une volonté étrangère. Et il le dit ! Avec le mot : «Non». Même s'il a été attiré, fasciné par les scintillements trompeurs du monde extérieur, même si, hier, il a sauté de joie en apprenant sa sortie prochaine, il ne veut aujourd'hui que le repos, la tranquillité, la paix ; il ne veut que prolonger la douceur du mode de vie qu'il connaît depuis un an et demi. «Là, tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté.» Il ne désire plus sortir. Il n'est plus intéressé par la découverte du vaste monde. Les adultes, ce jour-là, ne voient que le résultat de leurs efforts prolongés. Pendant cinq cent trente quatre jours, égrenés dans une bulle de plastique, S. a été protégé des microbes qui le vouaient à une mort certaine. Le déficit immunitaire dont il était affecté ne lui permettait pas de résister aux infections, mêmes minimes. Sans cet isolement, sans cette protection, la mort était inévitable avant l'âge d'un an. La barrière contre les microbes s'est révélée efficace puisque aucune infection n'est survenue. Mais si son développement est tout à fait normal, si l'enfant ne présente aucune maladie, aucune faiblesse, aucune défaillance, s'il paraît bien supporter la contrainte de la vie en bulle, comment imaginer sans frémir qu'il soit maintenu durant une vie complète dans un isolement aussi absolu ?» Telles sont les premières paroles du professeur Jean-Louis Touraine, pionnier et «père» de la première greffe au monde de cellules souches fœtales pour sauver ce bébé- bulle à Lyon, un 23 mars 1978, lors de sa sortie de bulle. Ainsi, tel est le récit romancé d'une aventure présidée par la plus grande des inégalités qui puisse exister sur terre qu'est la maladie. Maladie «gommée» par la recherche scientifique. Quant à l'aventure, c'est celle des déficits immunitaires. Celle des bébés-bulle. Aventure que j'ai partagée avec mon maître et Ami Jean-Louis Touraine pendant plus de 30 ans au service de l'immunologie des transplantations. Les bébés-bulle La bulle ? Il s'agit d'un territoire d'un mètre sur un mètre. La bulle de plastique est en effet un cube à parois souples qui repose sur un socle comparable à une table à roulettes. Tous les objets introduits, par l'intermédiaire d'un sas, sont préalablement stérilisés. La voix, la musique et les sons pénètrent dans la bulle de plastique, mais il n'est pas de contact possible avec l'enfant autrement que par des gants de caoutchouc sertis dans les parois latérales de la bulle. Les bébés ? Il s'agit d'enfants qui naissent sans défenses immunitaires. Ils ne produisent pas de globules blancs, cellules qui exercent les défenses contre les microbes. Ces globules blancs s'adaptent à tous les agressions infectieuses d'une façon adaptée et spécifique. Ces sont les lymphocytes. Il en existe deux grandes familles : les lymphocytes B produisant les anticorps et les lymphocytes T. Anticorps et lymphocytes T «attaquent» simultanément leur cible et la détruisent. C'est ce qu'on appelle les «défenses anti-infectieuses». L'enfant, généralement un nourrisson, atteint d'un déficit immunitaire avéré par des examens poussés et spécialisés est rapidement «isolé» dans la bulle stérilisée et exempte de germes. Cet isolement, dans la bulle, permet de placer une barrière physique entre l'enfant vulnérable et fragile, et le milieu ambiant extérieur plein de germes. Germes sans gravité pour vous et moi mais mortels pour un enfant dépourvu de défenses immunitaires. Le système immunitaire Il est nécessaire d'expliquer le fonctionnement du système immunitaire pour comprendre les maladies qui le touchent. La réponse immunitaire fait intervenir deux types de mécanismes qui sont d'apparitions successives au cours de l'évolution des espèces et sont intimement connectés chez les organismes supérieurs : - l'immunité naturelle (ou immunité innée), qui repose sur une reconnaissance du soi et du non-soi (dans le sens de faire la différence entre ce qui est propre à l'organisme et ce qui lui est étranger, «self» or «not self» chez les Anglo-Saxons). Elle est immédiate et non spécifique ; - l'immunité acquise, qui est adaptative et spécifique de l'antigène, qu'elle garde en mémoire. Ses mécanismes effecteurs se répartissent entre une réponse humorale et une réponse cellulaire. En ce qui concerne l'immunité innée, cette dernière est exercée par une catégorie de globules blancs (appelés aussi leucocytes) tels les monocytes/macrophages, les polynucléaires et les cellules dendritiques. Ces globules blancs agissent directement sur leur cible sans sensibilisation préalable. Ce sont les «sentinelles», qui surveillent l'ensemble de l'organisme tout en étant postées à un lieu précis. Par exemple, si un microbe (virus, bactérie ou autre) entre dans le nez d'une personne, ces sentinelles (cellules dendritiques ou macrophages) le reconnaissent comme un intrus, et vont le neutraliser. Si l'intrus est trop «agressif» ou s'il y en a beaucoup, les sentinelles donnent l'alarme à d'autres globules blancs, les monocytes, les polynucléaires neutrophiles, éosinophiles et/ou basophiles, afin qu'ils viennent en «renfort». Elles envoient des signaux très rapides, via les cytokines (molécules sécrétées par ces cellules produisant un signal précis), pour signaler leur position et de quoi elles ont besoin. Cet afflux de cellules et cette production de cytokines se traduit par un effet néfaste sur l'intrus en créant une réaction inflammatoire (un «feu» qui consume l'intrus). La personne la ressent par de la fièvre, des douleurs, une rougeur, entre autres. Il en va de même si une sentinelle telle la cellule NK (ou «Natural Killer», une catégorie de globules blancs très efficaces contre les cellules cancéreuses) détecte une cellule du corps envahie par un intrus et donne l'alarme. Lorsque l'inflammation est le résultat de l'arrivée de microbes, on l'appelle infection, alors que quand elle est déclenchée par erreur des sentinelles qui donnent l'alarme sans raison valable, on l'appelle maladie auto-inflammatoire. L'immunité acquise, quant à elle, est avertie par les sentinelles et met du temps à se mettre en place. Une fois l'intrus rendu inoffensif, il est acheminé dans des sites précis tels que les ganglions lymphatiques et la rate par les cellules sentinelles où il est examiné. Selon sa taille et sa composition, d'autres globules blancs très spécialisés sont appelés lymphocytes, en particulier les lymphocytes T auxiliaires. Ces derniers attirent d'autres lymphocytes : les lymphocytes T cytotoxiques et les lymphocytes B se sensibilisent par l'antigène intrus et agissent en le détruisant directement par les lymphocytes T cytotoxiques et par les anticorps produits par les lymphocytes B. Ce type de réponse immunitaire spécifique a pour avantage (non négligeable), de garder la mémoire de l'intrus. Cette mémoire servira alors de réponse immédiate chaque fois que le même intrus revient. Ce répertoire est gardé «à vie». A noter que les «rappels» de la vaccination servent à mettre en place une mémoire d'un microbe donné. Il s'agit d'une immunisation qui protège la personne vaccinée. Quand évoquer un déficit de l'immunité ? Les déficits immunitaires sont responsables d'une susceptibilité anormale à 3 types d'affections : les infections, les maladies auto-immunes et les cancers. En pratique, il est rare que le mode de révélation soit une maladie auto-immune ou un cancer. Le plus souvent, l'attention du clinicien va être attirée par une susceptibilité anormale aux infections. Cette susceptibilité peut schématiquement se manifester de deux manières. Dans le premier cas, il s'agit d'une infection due à un micro-organisme (germe) qui n'est habituellement pas pathogène chez l'homme immunocompétent (immunité normale). On dit qu'il s'agit d'un germe «opportuniste». Le prototype est la pneumopathie à pneumocystis jiroveci (longtemps appelé pneumocystis carinii), qui ne survient qu'en cas de déficit immunitaire sous-jacent. D'autres germes dits opportunistes ont cependant un pouvoir pathogène réel chez l'hôte immuno-compétent mais ce pouvoir est faible et sans aucune mesure avec la sévérité des manifestations observées chez l'immuno-déprimé (immunité affaiblie). Par exemple, la toxoplasmose est peu ou pas symptomatique chez le sujet sain tandis qu'elle entraîne des encéphalites très sévères au cours des déficits immunitaires. Ces germes dits «opportunistes» sont observés en cas de déficit de l'immunité cellulaire (lymphocytes T). Dans d'autres cas, les germes en cause sont des pathogènes «habituels», c'est alors la répétition des épisodes infectieux et la gravité inattendue de l'infection qui font suspecter un déficit de l'immunité. Ce type de susceptibilité est observé au cours des déficits de l'immunité humorale. Les signes cliniques d'appels sont : - infections récurrentes des voies aériennes hautes ou basses (à titre indicatif : 8 otites/an chez les moins de 4 ans, 4 otites/an chez les plus de 4 ans, 2 pneumonies/an ou plus de 2 sinusites/an ; - infections sévères à des germes de type pneumocoque, haemophilus, neisseria : un seul épisode de méningite ou de sepsis (ensemble de symptômes générés par l'organisme suite à une inflammation systémique) justifie une exploration ; - infections récurrentes (qui se reproduisent régulièrement) à bactéries pyogènes (suppurantes) ; - infections récurrentes avec le même type de pathogène ; - infections inhabituelles et ou d'évolution inhabituelle ; - cassure de la courbe pondérale ou diarrhée persistante ; - antécédents familiaux de déficits immunitaires héréditaires ou de signes cliniques similaires. Les déficits de l'immunité Le déficit immunitaire primaire (DIP) regroupe plus de 200 affections qui touchent les cellules, les tissus et les protéines du système immunitaire. En présence de DIP, le système immunitaire ne fonctionne plus du tout ou de manière inadéquate, de sorte que le patient atteint est plus vulnérable aux infections. Certaines formes de DIP ne touchent qu'un seul type de cellule immunitaire, tandis que d'autres peuvent s'attaquer à plus d'un constituant du système immunitaire. En ce qui concerne les causes et dans la plupart des cas, le DIP est une maladie héréditaire transmise par les parents à leurs enfants. Dans cette situation, on observe habituellement des antécédents familiaux de DIP. Dans d'autres cas, la cause du DIP est inconnue, mais on est généralement d'avis que la maladie est liée à des facteurs tant génétiques qu'environnementaux. Les symptômes du DIP sont variables et dépendent du déficit du système immunitaire. Les infections récurrentes ou persistantes constituent les manifestations les plus fréquentes du DIP. Ces infections peuvent toucher la peau, les sinus, la gorge, les oreilles, les poumons, le cerveau ou la moelle épinière, ou encore les voies urinaires ou les intestins. Les autres symptômes possibles sont : - Infections graves exigeant l'hospitalisation ; - infections inhabituelles causées par un organisme normalement inoffensif ; - infections chroniques des sinus et/ou des oreilles ; - pneumonie récurrente ; - diarrhée chronique ; - nécessité de recourir à l'antibiothérapie intraveineuse à cause de l'échec de l'antibiothérapie orale ordinaire ; - antécédents familiaux de vulnérabilité aux infections ; - chez le nourrisson, retard staturo-pondéral (incapacité de prendre du poids ou de grandir normalement). On pensait autrefois que le DIP était extrêmement rare, mais on sait maintenant que certaines formes de DIP sont relativement répandues. Par exemple, le déficit sélectif en immunoglobuline A (anticorps IgA) touche 1 personne par tranche de 500 à 1000. D'autres formes moins courantes de DIP ne touchent que 1 personne par tranche de 10 000 à 100 000. Le DIP frappe les hommes et les femmes sans distinction, peu importe leur âge. Même si on le diagnostique surtout chez les enfants, il est maintenant établi que le DIP touche des adolescents et des adultes. Vivre avec le DIP peut être une expérience à la fois effrayante et frustrante, car les maladies qui accompagnent cet état peuvent être très graves, tandis que l'absence de diagnostic catégorique signifie que bien des questions restent sans réponse. De plus, la méconnaissance générale du DIP, notamment chez les enseignants et les infirmières des écoles, peut accroître l'anxiété des parents d'enfants d'âge scolaire atteints de cette maladie. On peut classer, globalement, les déficits immunitaires comme suit : - les déficits de l'immunité innée dominés par les neutropénies (baisse plus ou moins importante des polynucléaires) chroniques centrales, la granulomatose (troubles du métabolisme oxydatif des cellules phagocytaires) septique chronique et des déficits vis-à-vis d'une famille de microbes sans autre infection ; - des déficits de l'immunité cellulaire, dont les déficits immunitaires combinés sévères (DICS), qui se révèlent dans les premiers mois de vie (syndrome de Di George, déficit en adénosine désaminase, syndrome des lymphocytes dénudés...) et peuvent bénéficier d'une greffe de cellules souches de moelle osseuse, de foie fœtal ou de sang de cordon ; - des déficits de la production d'anticorps : ces déficits concernent l'ensemble des immunoglobulines ou certaines classes ou sous-classes. Un taux normal n'élimine pas un déficit en sous-classes. Dans ce groupe, on retrouve la maladie de Bruton, bien identifiée par un déficit en lymphocytes B et une agammaglobulinémie (absence d'anticorps) et les déficits immunitaires communs d'expression variable. Le diagnostic Le dépistage rapide est essentiel à la prévention des séquelles permanentes que pourrait entraîner une infection grave. Le diagnostic du DIP repose sur la reconnaissance de la nature particulière des infections observées et des autres manifestations de la maladie. Le diagnostic est établi catégoriquement à la suite d'analyses immunologiques comportant un hémogramme (numération des cellules du sang) complet et le dosage du taux des immunoglobulines. Un bilan de suspicion ou d'exploration de déficit immunitaire doit être envisagé. Il comporte : Hémogramme : Neutropénie (baisse des polynucléaires), lymphopénie (baisse des lymphocytes) surtout chez l'enfant où elle revêt une importance particulière puisqu'il existe une lymphocytose physiologique de l'enfant). Chez l'adulte, un résultat est significatif s'il est inférieur à 1 gramme par litre. Une lymphocytose (augmentation des lymphocytes) peut traduire une leucémie lymphoïde chronique. L'anémie (baisse de l'hémoglobine des globules rouges) ou la thrombopénie (baisse des plaquettes) sont habituellement des stigmates d'auto-immunité, parfois associée au déficit immunitaire, Immunophénotypage (recherche des marqueurs membranaires des cellules) des lymphocytes B, T, NK : il permet le diagnostic d'une leucémie lymphoïde chronique chez l'adulte. Le déficit peut être quantitatif avec la mise en évidence d'une lymphopénie (B dans l'agammaglobulinémie, T dans les déficits immunitaires combinés, des sous-populations CD4/CD8 pour le VIH), Tests fonctionnels : Dosage des anticorps naturels (allohémagglutinines de groupe ABO) et des antigènes vaccinaux (diphtérie, tétanos, polio, pneumocoque) ; prolifération lymphocytaires in vitro aux mitogènes et antigènes vaccinaux ; tests fonctionnels des polynucléaires neutrophiles : nitro bleu de tétrazolium, chimiotactisme, phagocytose. Les traitements et la recherche Le traitement du DIP dépend du type d'anomalie immunitaire en cause. Une prophylaxie peut être envisagée selon les cas : – le cotrimoxazole (prévention de la pneumocystose et de la toxoplasmose dans les déficits cellulaires) : – l'acyclovir ou valaciclovir (prévention des infections à herpes simplex et zona), – l'oracilline en cas d'asplénie ou d'antécédent d'infection invasive à pneumocoque (myélome ou leucémie lymphoïde chronique). Une substitution en immunoglobulines est en règle générale associée à : – l'antibiothérapie prophylactique alternée (cotrimoxazole, amoxicilline, céphalosporine orale de 3e génération), surtout chez l'enfant avec hypogammaglobulinémie ; – la vaccination qui doit être proposée autant que possible. Les vaccins vivants atténués sont contre-indiqués en cas de déficit de l'immunité cellulaire. Les déficits immunitaires cellulaires ou humoraux profonds rendent cependant l'efficacité des vaccins très aléatoire ; – la substitution en immunoglobulines (intraveineuse ou sous-cutanée) en cas d'hypogammaglobulinémie symptomatique. Une antibiothérapie curative peut être mise en place. Dans ce cas, il faudrait s'acharner à documenter tout épisode infectieux pour permettre un traitement adapté (prélèvements ciblés). Les exacerbations d'infection broncho-pulmonaires ou ORL chez les patients avec hypogammaglobulinémie doivent être traitées par antibiotiques pour réduire le risque de séquelles (dilatation des bronches). La substitution en immunoglobulines polyvalentes est envisagée en cas d'infections sévères. Ce sont des injections préparées à partir de plasma de donneurs volontaires selon une réglementation bien codifiée. Elles s'administrent par voie intraveineuse (toutes les 3 à 4 semaines en hôpital de jour ou à domicile) ou sous-cutanée (une fois par semaine, gérée par le patient, à domicile). La surveillance de l'efficacité se fait sur la clinique (réduction des épisodes infectieux) et sur le dosage pondéral d'IgG (cible entre 5 et 8 g/L). La substitution en immunoglobulines est définitive, sauf dans les cas de déficits secondaires où elle peut n'être que transitoire, le temps de la récupération (plusieurs mois). Dans les hypogammaglobulinémies modérées, la substitution en immunoglobulines polyvalentes peut être limitée à la période la plus à risque d'infections (automne et hiver). La greffe de cellules souches hématopoïétiques et la thérapie génique ne sont justifiées que pour des déficits sévères et compliqués chez l'enfant. Les déficits immunitaires primitifs avec hypogammaglobulinémie au premier plan ne sont pas des indications de greffe du fait du bon pronostic moyennant une prise en charge adaptée. La kinésithérapie respiratoire est indispensable à la prise en charge des patients atteints de déficit primitif avec hypogammaglobulinémie profonde pour prévenir l'apparition ou l'aggravation de la dilatation des bronches et des surinfections. Des mesures psychosociales peuvent être mises en place car les déficits immunitaires primitifs peuvent entraîner ou s'associer à un handicap physique (insuffisance respiratoire chronique, déficit neurologique syndromique), psychologique (retard mental syndromique ou syndrome dépressif réactionnel) ou social (absentéisme scolaire ou au travail) qui doit être pris en charge (prestations adultes handicapés, soutien psychologique).Des travaux expérimentaux ont été conduits chez la souris pour montrer l'application des greffes de cellules souches (moelle osseuse, cellules fœtales) au traitement des leucémies (souris AKR), au transfert du diabète (souris NOD) et à la correction partielle de certaines maladies de surcharge (maladie de Niemann-Pick type C chez la souris LSD). Les souris SCID (atteintes de déficit immunitaire combiné sévère primitif comme les bébés-bulle) reconstituées grâce à des greffes de tissus fœtaux humains (SCID-Hu) ont développé un système immunitaire réceptif aux agents infectieux touchant l'homme (VIH, hépatite...) au niveau des greffons comme au niveau des cellules du sang périphérique murin. L'injection de peptides préparés à partir de VIH chez la souris SCID-Hu, dans certaines conditions, est susceptible de déclencher une réponse anticorps primaire (IgM) puis secondaire (IgG).Ce modèle se prête à la recherche dans le traitement des déficits immunitaires et dans l'étude de l'efficacité de diverses molécules à visée thérapeutique, de schémas de thérapie génique ou de vaccins.En conclusion, l'identification de signes d'alerte, de type infectieux généralement, associée à des examens biologiques simples, permettent d'orienter le diagnostic de déficit immunitaire primitif (génétique) ainsi que les analyses immunologiques spécialisées à réaliser pour compléter et étayer le bilan diagnostic. Un diagnostic précoce permettra ainsi une prise en charge efficace du patient afin de diminuer la morbidité et la mortalité associées, ainsi qu'une prise en charge préventive, éventuellement, d'autres membres de la famille pouvant être atteints du même déficit immunitaire. De plus, l'identification génétique du déficit immunitaire permet le conseil génétique aux patients et à leur famille. Il est important de garder à l'esprit que le diagnostic d'un déficit immunitaire génétique est avant tout clinique et n'est pas écarté par une normalité des explorations immunologiques. Il ne faut donc pas hésiter à demander conseil à un immunologiste, d'autant plus que de nouveaux déficits sont régulièrement identifiés. Le suivi des patients, en plus du suivi immunologique, devra également évaluer le retentissement du déficit immunitaire héréditaire en recherchant des stigmates d'auto-immunité, ainsi que la survenue de maladies malignes, notamment lymphomateuses. K. S. (*) Professeur des universités, directeur de recherches. Service d'immunologie des transplantations CHU de Lyon, France.