A la surprise générale, Abdelaziz Bouteflika a procédé, jeudi matin, au lendemain même de la réunion du Conseil des ministres, à un remaniement partiel du gouvernement, deux mois à peine après le dernier en date. En moins de trois ans, depuis la nomination de Abdelmalek Sellal à la tête du gouvernement, l'on en est, depuis jeudi, à exactement 49 ministres à avoir «séjourné» à l'exécutif. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Un vrai record en la matière et un signe éclatant de l'instabilité qui frappe le gouvernement. Une instabilité qui caractérise des pays en crise, en règle générale. Il faut dire que la maladie de Bouteflika explique en grande partie cette situation déroutante et qui se répercute négativement sur le travail des secteurs. Jeudi, ce sont donc trois secteurs ou plutôt quatre, qui ont été concernés par des changements. Un seul nécessitait effectivement urgemment la nomination d'un nouveau ministre : celui de la Jeunesse et des Sports. Ce poste, resté vacant en raison de la longue maladie de son désormais ex-titulaire, Abdelkader Khomri, est confié à Hadi Ould Ali. L'homme, s'il est nouveau au sein du gouvernement, n'en reste pas moins un militant au parcours plein. Ancien militant du RCD, il a été également président du MCB (Mouvement culturel berbère). Après avoir quitté le RCD, il a été directeur de la culture et directeur de la maison de la culture de Tizi Ouzou depuis 2004. Depuis 2004 également, il était à chaque fois désigné comme directeur de campagne du candidat Abdelaziz Bouteflika à Tizi-Ouzou (2004, 2009, 2014). Le deuxième changement opéré était, de toutes les façons, prévu depuis quelques mois déjà, à savoir jumeler les deux secteurs de l'agriculture et de la pêche pour les confier à Sid Ahmed Ferroukhi. Le désormais ex-ministre de ce qui était le ministère de l'Agriculture, Abdelkader Kadi, sera, lui, «renvoyé» à son corps d'origine, celui des walis. Il est nommé wali de Tipasa. En somme, un changement d'ordre strictement technique. Ce qui est loin, mais alors très loin d'être le cas du troisième changement, le plus important et assurément celui qui a «entraîné» les deux autres. Ce troisième changement a, certes, touché un secteur technique, celui du commerce. Mais il est éminemment politique. «C'est un coup de Sellal contre Amara Benyounès et Ahmed Ouyahia», nous révèle une source très bien informée. C'est Abdelmalek Sellal et non pas Bouteflika qui a demandé et obtenu le départ de Amara Benyounès du gouvernement. Un départ d'autant plus surprenant que Amara Benyounès y siégeait en tant que président d'un parti, le MPA, classé troisième force politique du pays depuis les dernières élections législatives et locales de 2012. A ce niveau, déjà, l'on peut déceler la première «torpille» lancée par Sellal à Ahmed Ouyahia. Ce dernier n'avait-il pas lancé une initiative pour la constitution d'un pôle politique englobant son propre parti, le RND, le FLN, le TAJ et le MPA ? Le doute n'est, par ailleurs, plus permis lorsqu'on évoque le nom de celui que Sellal a choisi pour remplacer Amara Benyounès : Bakhti Bélaïd. Ancien ministre du Commerce sous Zeroual, Bakhti Bélaïd n'a «refait surface» sur la scène politique qu'à la fin 2012 lorsqu'il était l'un des principaux dirigeants du mouvement de redressement mené à l'intérieur du RND contre... Ahmed Ouyahia ! «C'est cette même guerre à distance entre Sellal et Ouyahia qui avait été à l'origine de l'incroyable bourde commise lors du dernier remaniement de mai dernier lorsqu'on s'était retrouvé avec deux ministres des Affaires étrangères pendant 24 heures», nous confie encore notre source. Le limogeage de Amara Benyounès est également inattendu pour plusieurs raisons. Au plan technique, le ministre du Commerce sortant avait réussi une prouesse qu'aucun autre de ses prédécesseurs n'a pu réaliser avant lui : empêcher les traditionnelles flambées des prix pendant le mois de Ramadhan. Et, au plan politique, il était l'un des promoteurs les plus en vue du quatrième mandat de Abdelaziz Bouteflika dont il était l'un des membres du directoire de campagne électorale pour la présidentielle de 2014. Enfin, l'on ne peut également pas occulter le fait que l'ancien ministre du Commerce représentait tout un courant politique au sein du gouvernement. Comme l'atteste sa guerre incessante au sein même du secteur du commerce contre le terrible lobby islamiste que le MSP y a solidement implanté... K. A. Changements à la tête de la Garde républicaine et la sécurité présidentielle Abdelaziz Bouteflika a procédé, durant ce week-end, à deux changements à la tête de la Garde républicaine et de la Direction de la sécurité et de la protection présidentielle (DSPP), selon des sources concordantes. C'est ainsi que le général de corps d'armée Benali Benali remplace le général Ahmed Moulay comme chef de la Garde républicaine, alors que le général Djamel Medjdoub cède sa place de patron de la Garde présidentielle au général Nacer Habchi, issu du même corps de sécurité.