La Conférence nationale sur l'évaluation de la mise en œuvre de la réforme s'est achevée hier. Le retour au bac professionnel, la refonte de l'examen du baccalauréat, l'allégement des matières pour les classes d'examens, la suppression de l'examen de 6e et l'introduction de la fiche de synthèse font l'unanimité des experts. La ministre de l'Education nationale annoncera aujourd'hui les recommandations finales. L'école va-t-elle connaître une révolution ? Salima Akkouche - Alger (Le Soir) - Le ministère de l'Education nationale a mobilisé pendant deux jours l'ensemble de la famille éducative pour un diagnostic profond de la réforme de l'école. Dix ateliers à thème ont été installés pour décortiquer les mesures appliquées de la réforme de 2003, celles en attente et les problèmes de l'école algérienne pour apporter des solutions. Le premier ministre, lors de son discours d'ouverture, samedi, a affirmé que le gouvernement est ouvert à toutes les propositions pour moderniser l'école et améliorer la qualité du système éducatif. Le retour au bac professionnel, la refonte de l'examen du baccalauréat, l'allégement des matières pour les classes d'examens du secondaire et le cycle primaire, la suppression de la 6e, l'introduction de la fiche de synthèse et la réduction de la durée des journées d'examen du bac, ont été les principales propositions des experts réunis au Palais des nations, à Alger. Selon Nedjadi Messeguem, inspecteur général au ministère de l'Education nationale, la commission spéciale évaluation des examens de fin de cycle a émis beaucoup de propositions notamment l'option du retour au bac professionnel. «Nous adhérons à cette idée de mettre en place un autre moyen d'accéder à l'université et nous souhaitons l'implication du ministère de l'Enseignement et de la Formation professionnelle et celui de l'Enseignement supérieur pour voir les mécanismes pouvant aboutir à la mise en place du bac professionnel, d'autant que c'était aussi l'une des recommandations du Premier ministre». Selon M. Messeguem, l'atelier chargé de l'orientation scolaire se penche sur tous les aspects liés au bac professionnel. Une option soulevée déjà depuis plusieurs années par le ministère de l'Enseignement et de la Formation professionnelle. Une démarche qui vise à valoriser les diplômes de l'enseignement professionnel mais l'idée n'a jamais abouti. Benghebrit aura-t-elle les moyens pour arriver à bout de ses projets ? Taux d'échec très élevé dans les langues étrangères et les mathématiques Le cri d'alerte des experts Les élèves algériens sont faibles en langues étrangères et en mathématiques. Le constat a été fait déjà depuis plusieurs années. M. Belaaziz, inspecteur central en pédagogie au ministère de l'Education nationale a indiqué hier que le taux de réussite nationale en langue arabe dans les résultats du BEM était de 74%. «L'arabe a aidé les élèves à décrocher leur examen du BEM» a-t-il soutenu. Le malheur, c'est que la moyenne nationale en maths était de 7/20 et 8/20 en langue française, soit un taux de réussite nationale de 30%. Plus de deux tiers des élèves n'ont pas eu une moyenne à l'épreuve de français au BEM. Le français, affirme cet inspecteur, est une matière à échec au BEM. Les choses ne s'améliorent pas à l'examen du baccalauréat. La moyenne nationale prise sur un échantillon d'élèves des filières des sciences appliquées et des lettres et philosophie, était de 10 contre 48,12 % du taux de réussite. La moyenne nationale en maths était de 7,47% contre 28% du taux de réussite. «Le français est une matière à échec et un problème dans le système éducatif, nous alertons et tirons la sonnette d'alarme car de nombreux étudiants arrivent à l'université avec de bonnes moyennes en français mais une fois à l'université, où le français est la langue d'enseignement, l'étudiant change vite pour une filière enseignée en arabe car il ne maîtrise pas la langue. Une situation qui nous interpelle et il faut chercher à quoi c'est dû», s'interrogent les experts. Selon M. Baâziz, la moyenne nationale de réussite dans les matières essentielles ne doit pas descendre de la barre des 30%. Autrement, c'est une matière à échec. S. A. Ben Ramdan Farid, conseiller auprès de la ministre de l'éducation nationale, chargé de la pédagogie : «Le problème du taux d'échec élevé en langues étrangères est didactique, pédagogique» Selon Ben Ramdan Farid, pédagogue et conseiller auprès de la ministre de l'Education, le problème de la langue française est «éminemment didactique, pédagogique». Nous avons à faire, explique t-il, à une nouvelle génération qui, elle, a suivi son cursus totalement en langue arabe. Le statut de la langue française, poursuit-il, est un statut qui est différent d'une région à une autre en Algérie. «Nous avons à faire à une génération pour qui le français est une langue étrangère, pour d'autres, c'est une langue étrangère privilégiée et pour d'autres encore, c'est une seconde langue». Le français, dit-il, fait partie du paysage sociolinguistique algérien mais il y a un décalage générationnel du fait que la langue arabe s'est installée dans le système éducatif algérien et les compétences linguistiques en langue française ont fortement baissé. Il y a aussi, dit-il, les pratiques de l'enseignement de la langue française. Selon lui, aujourd'hui, on n'enseigne pas en français mais on enseigne le français et ce n'est pas la même chose. «Les enseignants n'arrivent pas à comprendre qu'il faut enseigner le français comme langue étrangère», dit-il. La preuve, selon ce pédagogue, on obtient de meilleurs résultats en anglais car dans la méthodologie de son enseignement, l'anglais est enseigné comme langue étrangère. Le pédagogue qui reconnaît que le français n'est pas suffisamment enseigné au sud, estime que cette langue n'est pourtant pas un luxe mais une nécessité. D'ailleurs, annonce-t-il, la ministre de l'Education se déplacera ce mardi à Laghouat où dix wilayas du sud et des Hauts-Plateaux vont se réunir pour prendre en charge les problèmes liés à la performance de la langue française. «Nous devons augmenter la performance linguistique des élèves par la pédagogie», recommande-t-il.