«On ne peut plus continuer comme ça !» sont les propos soutenus par le directeur du laboratoire de valorisation des hydrocarbures à l'Ecole polytechnique d'Alger, le professeur Chems Eddine Chitour, l'invité de la rédaction de la Chaîne III, hier. La crise énergétique que subit l'économie algérienne nécessite la reconsidération impérative du modèle socio-économique archaïque et de la mise en place d'une vision d'ensemble. Naouel Boukir - Alger (Le Soir) - «Les problèmes sont connus, idem pour les solutions», répond le professeur Chitour aux interrogations concernant le plan à préconiser pour que l'Algérie s'extirpe définitivement de la crise énergétique, à tendance économique. Selon lui, les constats ont été exposés maintes fois que ce soit pour la perte de plus de 42% de recettes en devise ou l'augmentation de la consommation interne. Or le passage à l'action est l'ultime issue. Dans un contexte international extrêmement perturbé et ponctué de rebondissements géostratégiques, l'unité est ce qui permettra à l'Algérie de passer outre l'exemple de la Libye, du Soudan, du Mali ou encore du Yémen, dira le directeur du laboratoire de valorisation des hydrocarbures à l'Ecole polytechnique d'Alger. Selon lui, l'enjeu majeur aujourd'hui est de comprendre : «Qu'est-ce qu'un Algérien au XXIe siècle» de «nous accepter tels que nous sommes» pour pouvoir aller de l'avant. Par ailleurs, il y a lieu de réconcilier les Algériens avec eux-mêmes, entre eux et avec leur passé et avenir : la jeunesse algérienne doit être consciente de son importance et «doit prendre le relais» avec les référents et les acquis de la révolution qu'ont menée leurs prédécesseurs. Impliquer le citoyen dans le système de réformes «Réunir tous les Algériens autour d'une utopie commune» et cultiver «le vivre-ensemble» furent le souhait et l'appel du professeur Chitour afin de dépasser et de contrecarrer le développement de toute forme de népotisme ou de régionalisme. Il y a lieu d'éclaircir ce que le professeur désigne par «utopie» cette «vision d'ensemble» qui doit impérativement être mise en exergue par le gouvernement et qui associe inconditionnellement le citoyen algérien. Pour ce faire, le professeur invite ce dernier à «consommer ce dont il a besoin» car «tout a un coût» et le gaspillage en a un également : Si l'Algérie maintient ce rythme de consommation effréné, «nous serons à sec dans trois années», confirme-t-il sans grand pessimisme. Effectivement, l'économie d'énergie constitue la responsabilité de tout un chacun : l'écocitoyenneté peut garantir jusqu'à 20% des besoins en énergie ce qui doit être «pédagogiquement» expliqué au citoyen de façon à ce qu'il adhère au système de réformes à envisager et qu'il reprenne confiance en ses dirigeants. Le développement durable est d'abord immédiat Comment aborder la problématique du développement durable sans impliquer le système éducatif ou la matière grise ! C'est justement à ce titre que l'invité de la Chaîne III met l'accent sur la nécessité d'inculquer les valeurs de l'écocitoyenneté au citoyen dès son bas âge, sur les bancs de l'école. D'autre part, il traite des «gisements de connaissances et de savoir» qui sont aujourd'hui marginalisés : des retraités qui ont encore tant à donner et des jeunes compétences à qui on ne laisse pas l'opportunité de s'épanouir. Pour revenir à l'énergie, le professeur Chitour s'indigne des sommes faramineuses que l'Algérie perd dans ses embouteillages et dans ses décharges constituant un «véritable trésor» et une réelle industrie. Concernant le système de subventions, le professeur affirme que plus de 75% des subventions «vont à ceux qui n'en ont pas besoin, aux riches» : L'Algérie est le pays des «paradoxes», souligne-t-il. Pour finir, le directeur du laboratoire de valorisation des hydrocarbures à l'Ecole polytechnique d'Alger rappelle l'urgence de la mise au point d'un modèle économique adéquat, permettant d'une part l'exploitation des richesses géothermiques, éoliennes et hydrauliques qu'offre le pays et la conservation de l'énergie fossile pour les générations futures : Assurer cette boucle énergétique n'est plus la question mais la réponse si on ne veut pas solliciter l'endettement extérieur et retourner à la tragédie des années 1990.