L'Algérie célèbre aujourd'hui le 61e anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération nationale. Qu'avons-nous retenu et que reste-t-il de l'esprit du 1er Novembre, après plus d'un demi-siècle d'indépendance ? «Nous sommes encore loin de l'Etat souverain, démocratique et social pour lequel nos glorieux martyrs se sont sacrifiés», regrettent des partis politiques. Atmane Mazouz, secrétaire national chargé de la communication au RCD : «Novembre est à réinventer» «Novembre est à réinventer et la conjoncture nous y invite, plus que jamais, à éclairer les vérités pour éviter leur perversion. Pour la majorité des jeunes, il est facile de céder à l'air ambiant qui veut que nos martyrs se sont sacrifiés pour qu'une caste d'usurpateurs saigne indignement le pays. Le pouvoir, depuis 1962, a tout fait pour occulter la longue lutte du peuple algérien contre la France coloniale. Les livres d'histoire truffés de mensonges et de célébrations de faux héros ont fini par produire un malaise identitaire chez la jeunesse qui, parfois, vire à la haine de soi et au rejet. Le pouvoir actuel qui perdure, en partie, grâce à son offre néocoloniale par des concessions inimaginables à la France est peut-être le pire dans cette opération de mutilation de la mémoire de la Nation. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres, le retentissement de la Révolution algérienne est mondiale. Il a sonné la libération de nombreux peuples d'Afrique et d'ailleurs. A ce titre, en plus du combat de nombreux Algériens pour restituer la mémoire, le combat et les sacrifices de générations entières d'Algériennes et d'Algériens, partout où on va dans le monde notre combat contre la France coloniale est cité en exemple. Le peuple algérien a appris à célébrer ses martyrs loin des cérémonies festives officielles. Les acquis de notre révolution demeurent vivants dans chacun d'entre nous ; c'est la raison principale qui fait que le peuple algérien refuse de vivre sous l'autoritarisme et combat pour l'égalité en droits et toutes les libertés. Le combat de Novembre ne doit pas être vain et notre génération doit fabriquer son propre destin face à ceux qui nourrissent la volonté d'occulter une histoire dont ils renient et violent les valeurs qui l'ont produite.» Soufiane Djilali, président de jil jadid : «Le peuple algérien est toujours soumis à un pouvoir qui lui est extérieur» «Le capital symbolique a été consommé par le régime, la date du 1er Novembre était un mythe fondateur de l'Etat algérien mais, malheureusement, ceux qui avaient en charge la défense de cette mémoire collective l'ont au contraire consumée pour des intérêts politiciens et souvent personnels. Cette année, le 1er Novembre intervient dans une conjoncture très difficile pour l'Algérie. La perte des illusions et le retour progressif au réel et le réel nous dit que plus d'un demi-siècle après l'indépendance, nous n'avons toujours pas un Etat de droit, nous n'avons pas d'institutions fiables, la souveraineté populaire ne s'exprime toujours pas et si le 1er Novembre a abouti à l'indépendance du pays, celle-ci reste incomplète et le peuple algérien est toujours soumis à un pouvoir qui lui est extérieur. Notre espoir est que les changements qui devront intervenir permettront le parachèvement de l'idéal des Pères fondateurs de la Révolution en accédant à un Etat moderne démocratique, profondément algérien dans toutes ses dimensions et pour cela, il nous faut un néo-nationalisme porteur d'une vision de bâtisseurs et non pas de prédateurs mais malgré toutes ces difficultés, l'espoir est permis et le devoir d'agir est toujours là.» Abderezak Mokri, président du MSP : «Nous sommes loin des principes de la Déclaration du 1er Novembre» «L'occasion nous a été donnée aujourd'hui pour faire une évaluation des principes de la Déclaration du 1er Novembre et malheureusement, nous sommes loin de ce qui a été décrété dans la Déclaration du 1er Novembre notamment dans son article 2 qui détermine la nature de l'Etat dans lequel les Algériens doivent vivre, à savoir un Etat démocratique, social et souverain, or, nous ne sommes pas un Etat démocratique puisque la démocratie a été bafouée par d'abord le parti unique pendant 30 ans et ensuite, par la fraude électorale qui a dénaturé le champ politique et l'a totalement éloigné de la réalité de la société et cela a déséquilibré les rapports de force et a empêché le contrôle des affaires publiques et a fragilisé les institutions de l'Etat et aussi marginalisé les forces de la société en empêchant l'émergence d'une société civile. Nous sommes aussi loin du principe populaire de l'Etat car aujourd'hui, nous avons deux peuples, celui des privilégiés, proches du pouvoir qui accède facilement aux postes de l'Etat et un peuple qui ne décide pas de son sort. Nous ne sommes pas également un Etat social vu l'échec flagrant de réaliser le développement économique, et les richesses dilapidées par la corruption et l'incompétence des gouvernants qui ont dépensé 800 milliards de dollars sans avoir réussi à réaliser une richesses économique dont le taux de croissance est d'à peine 4% et nous ne sommes pas aussi un Etat souverain, car les forces étrangères sont omniprésentes dans les affaires de l'Algérie dans la non-transparence, notamment la France qui se sert sans limite et use de son influence pour faire des affaires en Algérie. Nous avons acquis notre indépendance, certes, et nous avons réalisé des progrès dans les secteurs de l'éducation, la santé et réalisé certaines infrastructures mais nous n'avons pas fait de l'Algérie un Etat démocratique, social et souverain.» Yacine Teguia, membre du bureau national du MDS : «L'esprit de la résistance de la société algérienne est toujours présent» «Ce qui reste du 1er Novembre, c'est l'esprit de la résistance de la société, algérienne. Celle-ci a refusé tout compromis avec les idées islamiques tout comme elle a refusé dans le passé toute forme de compromis avec le colonialisme. C'est cet esprit de résistance qui anime la société algérienne qu'il faudrait inscrire dans la Constitution algérienne. Ce qui reste du 1er Novembre, ce sont les aspirations à édifier une Algérie démocratique et sociale et le pouvoir qui a tourné le dos à cette aspiration est toujours soumis au feu de la critique de la société.»