Les critiques contre Ali Haddad se multiplient. Ses nombreuses interventions publiques sur des sujets politiques ne sont plus du goût de ses collaborateurs, et même de certains de ses amis qui l'accusent d'avoir mis les pieds là où il ne fallait pas. L'un d'eux, Mahieddine Tahkout, a même claqué la porte du FCE avec fracas au moment où des voix s'élèvent donc pour dénoncer la démarche et les déclarations d'un homme dont le rôle est aujourd'hui fortement controversé. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - La manière même dont s'est déroulé le départ de Mahieddine Tahkout, patron de l'entreprise de transports de voyageurs, semble révéler un ras-le-bol et une situation pas très visible jusque-là. Ali Haddad et ses plus proches collaborateurs semblent d'ailleurs eux-mêmes avoir été surpris par la démission de Tahkout qui a préféré annoncer sa décision lors d'un entretien téléphonique avec la chaîne privée Ennahar. Aucune lettre de démission et encore moins préavis n'a été transmise au patron du FCE qu'il accuse de s'être engagé dans des débats politiques n'ayant rien à voir avec son rôle d'opérateur économique. «Il y a, a-t-il ajouté, une guerre de clans et une situation conflictuelle au FCE pour des intérêts économiques et individuels». Selon lui, d'autres démissions pourraient survenir dans les prochains jours. Pas de réaction, cependant, au niveau du Forum des chefs d'entreprises. Contactés, ses responsables ont préféré s'abstenir de commenter un départ qui les a cependant laissés perplexes, affirment des sources informées. En fait, cette démission intervient suite à une série de faits peu anodins qui peuvent laisser entendre que le tout-puissant patron du FCE ne nage plus dans les eaux calmes. Ainsi, quatre ministres du gouvernement ont carrément boudé la Journée de l'entreprise algérienne organisée par le Forum des chefs d'entreprises à l'hôtel El-Aurassi après s'être pourtant engagés à assister à cette réunion. Ils se sont rétractés, sans prévenir et sans fournir la moindre explication. Dans le pays, aucun évènement pouvant expliquer ce geste n'a par ailleurs été enregistré. Quelque temps auparavant, une telle attitude aurait paru peu probable tant le personnage qu'incarne Ali Haddad avait pris de l'ampleur au point où des partis de l'opposition ont fini par le présenter comme l'un des véritables patrons de l'Algérie, détenteurs de pouvoirs illimités. Les membres du gouvernement ont-ils été instruits afin d'éviter de cautionner la démarche d'un personnage trop controversé ? Ce lundi, l'ancien ministre de la PME-PMI, M. Réda Hamiani, n'a pas manqué de critiquer à son tour ce rôle dans lequel s'est engagé le FCE car cette organisation, dit-il, est aujourd'hui dans la «mêlée politique». Cette critique rejoint non seulement celle de Mahieddine Tahkout, mais aussi celle du producteur de médicaments Merinal. Il y a quelque temps, Nabil Mellah avait lui aussi préféré se démarquer du FCE sans donner d'explication. Mais ses propos sur la web radio Maghreb Emergente ont suffi à lever l'équivoque puisqu'il reprochait déjà à ce moment à Ali Haddad de «caresser le pouvoir dans le sens du poil». Il faut dire que ses initiatives n'échappent pas non plus à la critique et à la polémique puisque l'association des consommateurs algériens l'accusent de vouloir voguer seul. Elle a ainsi fustigé le FCE qui n'a pas pris le soin de l'associer au projet Label origine Algérie (OGA) destiné essentiellement à encourager la production nationale et la diversification de l'économie du pays. D'autres voix se sont également élevées un peu partout pour attirer l'attention sur le flou qui entoure l'initiative dont les modalités ne seront pas connues avant la fin du mois de juin prochain. Ali Haddad, qui n'a pas hésité à répondre aux questions d'actualité brûlantes, préfère cependant garder le silence sur ces questions. En intervenant de la sorte sur tous ces sujets à la pointe des débats sur le devenir du pays et les dérives en cours, il s'est notamment attiré les foudres de certaines personnalités et formations politiques telles que le Parti des travailleurs. Le PT s'interroge depuis un moment sur le véritable rôle qu'assume «cet homme qui se permet de s'immiscer dans les activités des ministres et d'exiger d'eux ce que personne ne pourrait se permettre». Dans une interview parue jeudi dernier dans notre quotidien, Louisa Hanoune le présente d'ailleurs comme une personne appartenant à un cercle qui risque de «mener l'Algérie tout droit vers l'abîme si rien n'est entrepris». Elle avait également expliqué que la demande d'audience du groupe des 16 vise justement à alerter le président de la République sur tous ces faits afin qu'il intervienne pour stopper la dérive. Ali Haddad, on s'en souvient, avait fustigé y compris la démarche de ce groupe qu'il a qualifié de «salonnards». En fait, le patron du FCE s'est livré à des commentaires sur tous les sujets d'actualité en cours, y compris le départ du général Toufik. «L'institution militaire, avait-il déclaré, ce n'est pas des personnes. Tous les Algériens doivent être à son service». Ali Haddad aurait-il franchi la ligne rouge ? Les critiques qui fusent interviennent en tous les cas au moment où d'autres personnes qui se sont érigées en porte-voix de la présidence de la République ont été désavouées. C'est le cas de Ammar Saâdani, secrétaire général du FLN.