De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari Erdogan, le Président turc, a du mal à prononcer le mot Daesh. Nous verrons pourquoi. Après l'attentat hier dans le quartier touristique d'Istanbul, instruction sans doute a été donnée aux médias proches du pouvoir de brouiller, encore un peu, encore un moment, les pistes. Quelques heures après, le communiqué officiel de l'agence Anatolia reprend les termes du Président et parle d'une «personne d'origine syrienne» comme étant celle qui s'est fait exploser à proximité de la mosquée Bleue. La Turquie est, sans doute, la puissance régionale qui a le plus aidé, financé, manipulé et orienté le terrorisme en Syrie et en Irak. Le mouvement Daesh n'aurait jamais pris autant d'ampleur sans l'apport turc et l'argent saoudien. Dès le début de ce que l'on a considéré comme insurrection contre le régime syrien, en définitive un vaste complot concocté par la CIA et l'Otan et dont le management a été confié à la Turquie et à l'Arabie Saoudite, Ankara a accepté ce rôle avec un zèle et une disponibilité effarants. La résistance des populations syriennes dans toutes leurs composantes (latine chrétienne, orthodoxe, Eglises araméennes, arméniennes, musulmans sunnites effrayés par le wahhabisme de Daesh, chiites, laïques, sans dieux et citoyens lambda— majoritaires —) et la détermination de l'armée régulière ont anéanti les espoirs turco-saoudiens de voir s'effondrer l'Etat syrien. Il est vrai que le positionnement clair de la Russie en faveur de la Syrie n'a pas été pour peu dans la sauvegarde de la Syrie. Depuis, le rapport de force a longuement évolué en faveur des forces antiténèbres. Partout, les criminels de Daesh sont combattus, pourchassés, terrassés. Les USA et la France n'ont plus, dès lors, d'autre issue que de se déclarer contre le terrorisme dans le Moyen-Orient. Les attentats du Bataclan, de la «Belle Equipe», du «Petit Cambodge» en la sanglante soirée du 13 novembre 2015, ne laissent, d'ailleurs, guère le choix à François Hollande que celui de consentir, enfin, que l'on ne peut vaincre Daesh sans dialoguer et coordonner avec Bachar Al-Assad. La diplomatie française change donc de fusil d'épaule, du moins dans les proclamations de foi. A la Turquie et à l'Arabie Saoudite, d'autres missions sont assignées. Trois essentiellement. Charcuter la probable victoire syro-russe sur Daesh, être là au moment des négociations sur le démantèlement des réseaux terroristes dont la plupart sont l'œuvre de laboratoires occidentaux et annihiler le retour de l'Iran dans l'affaire. Les attentats d'hier aux alentours de la mosquée et sans doute d'autres à venir, sont la réponse immédiate et sanglante de Daesh à la nouvelle politique turque. «Tandhim Edawla» ne voulant pas, spécialement, être le dindon de la farce (force ?) des nouveaux plans de l'Otan comme l'ont été les nébuleuses Talibane en Afghanistan ou les GIA, AIS, FIS en Algérie qui, après avoir été actionnés ont été sommés d'accepter les défaites. Ceci, évidemment, après avoir été vaincus militairement et mis hors d'état de nuire. En Algérie, c'est l'ANP qui a déjoué le complot. En Syrie, ça sera sans doute aussi le cas. La Turquie peut s'en sortir du piège avec la neutralisation ou le départ d'Erdogan. Un, deux ou trois autres attentats comme ceux de la mosquée Bleue et le débat s'ouvrira à Ankara sur la gestion aventureuse du terrorisme par l'Etat Erdogan. Selon les correspondants des principaux médias européens dans la capitale turque, il (le débat) a déjà lieu...