Pour marquer comme il se doit son entrée en activité, la toute nouvelle association «Abane Ramdane pour la mémoire et l'histoire» a convié un auguste invité pour commémorer la journée du Chahid. Malgré le poids des années, Réda Malek n'a pas voulu, en effet, manquer l'occasion qui lui était offerte une nouvelle fois pour évoquer, devant un consistant auditoire à Tizi-Ouzou, son illustre frère d'armes, Abane Ramdane. Abane Ramdane est donc revenu au devant de la scène à travers un nouveau témoignage sur des pans de son parcours, revisités par l'ancien chef de gouvernement et membre de la délégation chargée des négociations ayant abouti aux accords d'Evian. Un des chapitres les plus tumultueux de l'histoire de la guerre de Libération rouvert, donc, par Réda Malek qui s'est fait comme un devoir de rappeler avant tout que le préalable de l'indépendance, c'est Abane qui l'a introduit, lorsque les Français voulaient prendre langue avec les Algériens. Ceci, pour dire que c'est avec Abane Ramdane que l'idée de l'indépendance du pays avait pris toute sa signification. C'est dans cette optique que le stratège qu'était Abane a imposé l'institution d'une autorité centrale à l'échelle nationale. Réda Malek se souvient qu'à l'époque, lorsque se dessinait la tenue du Congrès de la Soummam, il se disait : «Il faut être fou pour réunir tous les chefs au nez et à la barbe d'une armée comme l'armée française. Mais il fallait le faire...». Le Congrès de la Soummam, l'institution du CNRA, du CCE et de l'ALN sont autant d'œuvres ayant permis de conférer au FLN une structuration, dira Réda Malek, et se départir ainsi de son image de nébuleuse, de lui donner un visage afin de permettre à la révolution algérienne d'avancer et connaître un retentissement partout dans le monde. ‘'Tout cela est parti du Congrès de la Soummam et de la plateforme qui en a résulté pour donner une impulsion extraordinaire à la révolution», jurait presque Réda Malek avant d'évoquer le début des déboires de Abane «(qui) a failli être éjecté du Comité de coordination et d'exécution (CCE)». Une suite logique, eu égard à la remise en cause des principes de la primauté du politique sur le militaire, et de l'intérieur sur l'extérieur. En d'autres termes, la remise en cause des résolutions du Congrès de la Soummam, et l'exigence avancée jusqu'à effacer le mot révolution du vocabulaire. Par qui et pourquoi, Réda Malek ne le dira pas malheureusement, au grand dam des présents, qui même s'ils le savent, ils avaient tellement envie de l'entendre dire de la bouche même de l'un des acteurs de l'époque. Une situation imposée à Abane qualifiée d'inattendue par Réda Malek qui s'en ira, de façon peut-être un peu laconique, expliquer comment Abane Ramdane était donc mis en minorité, tout en assurant que ses idées n'ont pas été pour autant mises entre parenthèses, et même de clamer : «Les idéaux prônés par Abane Ramdane sont plus que jamais d'actualité», en expliquant «(que) l'Algérie qui avance, c'est Abane qui l'a pensée», parce que l'homme qui a réussi à réunir tous les courants de pensée politique, dépasser le tribalisme et le théocratique, cet homme ne peut être qu'un épris des valeurs universelles de modernité et de progrès social. Bien qu'il ait dans une certaine mesure laissé les présents sur leur soif de vérité, le membre de la délégation des négociateurs d'Evian a conforté tout de même son auditoire sur l'idée qu'il s'est faite depuis toujours sur certains des événements ayant émaillé la longue histoire du mouvement national et les dissensions ayant marqué les relations entre des figures de la Révolution, jusqu'à mener à des assassinats....