La question du retour à la terre natale des restes mortuaires de martyrs algériens de la bataille de Zaâtcha au XIXe siècle, entreposés actuellement au Musée de l'homme de Paris, rappelle l'existence de précédents. En janvier 2012, vingt têtes maories momifiées, acquises au XIXe siècle par des explorateurs et marins occidentaux et conservées dans des musées français, avaient été officiellement restituées à leur communauté. Le Parlement français avait en mai 2010 autorisé la restitution à la Nouvelle-Zélande de ces têtes conservées dans des musées français. Elles ont donc été remises à une délégation néo-zélandaise venue recueillir solennellement les restes de ses ancêtres lors d'une cérémonie organisée au musée du Quai Branly. «Les vingt têtes identifiées en France sont remises à la Nouvelle-Zélande au musée Te Papa, elles ne sont plus désormais des objets de collection mais seront entreposées dans un lieu sacralisé», avait déclaré le ministre français de la Culture, Frédéric Mitterrand. Le tatouage, dans la culture maori, avait une très grande importance, sociale et autres. Chez les Maori, la tête est considérée comme la partie la plus sacrée du corps. Les têtes tatouées des guerriers morts au combat étaient momifiées. Ainsi selon les croyances maories, elles pouvaient conserver leur esprit. Elles étaient ensuite exposées au peuple qui les vénérait. Quand l'âme du guerrier était considérée comme libérée par le peuple maori, la tête était enterrée. Considérées comme des trophées ou des objets de curiosité, les têtes maories ont fait l'objet d'un trafic et parfois de chasse à l'homme dès les débuts de la colonisation de l'Océanie au XVIIIe siècle. Bien qu'interdit en 1831 par le gouvernement britannique, ce commerce s'est poursuivi illégalement bien au-delà de cette date. Depuis 1992, la Nouvelle-Zélande fait des demandes de retour de tous les restes de dépouilles maories dispersés de par le monde. En janvier 2012, 322 têtes (dont les 21 de France) avaient été rapatriées sur environ 500 conservées dans les musées du monde. Plusieurs pays, notamment la Suisse, la Grande-Bretagne, le Danemark, les Pays-Bas et l'Allemagne ont répondu positivement à la demande néo-zélandaise de restitution de ces restes humains. En 2002, la France avait aussi restitué à l'Afrique du Sud, la dépouille de Saartjie Baartman (Sarah Bartmann) morte à Paris le 29 décembre 1815. Saartjie Baartman, surnommée la «Vénus hottentote», est née aux alentours de 1789 dans l'actuelle Afrique du Sud au sein du peuple khoïsan. Son histoire est révélatrice de la manière dont certains Européens considéraient à l'époque ceux qu'ils désignaient comme appartenant à des «races inférieures. Croyant aux (fausses) promesses d'hommes sans scrupules,Saartjie Baartman débarque à Londres en septembre 1810. Elle sera exploitée comme un animal de foire. Dans une salle louée de Piccadilly Street, elle est exposée dans une cage, sur une estrade surélevée, endurant l'humiliation sous le regard, les quolibets et le toucher de spectateurs, venus «admirer» l'anatomie de celle dont a été inventé le surnom moqueur mais aguicheur de «Vénus hottentote». L'African Association intente un procès le 24 novembre 1810 contre ses exploiteurs accusé de l'exploiter, de l'exposer de manière indécente et de violer l'acte d'abolition de la traite des esclaves de 1807. Mais ceux-ci la font passer pour une artiste, un contrat (probable subterfuge légal) faisant foi. La cour conclut à un non-lieu. Elle sera par la suite exposée dans le nord de l'Angleterre et l'Irlande. Mais le public britannique commence à se lasser de ce show indécent. Saartjie est alors exposée en Hollande, puis en France à partir de septembre 1814, où l'esclavage est encore légal. Elle sera exploitée par un organisateur de tournées, puis par un montreur d'animaux exotiques (sic) qui fait payer 3 francs pour la voir et plus pour la toucher dans les cabarets. Elle devient par la suite un objet sexuel et tombe dans l'alcoolisme. Vivant dans des conditions sordides dans un taudis, Saartjie Baartman meurt dans la nuit du vendredi 29 décembre 1815, probablement d'une pneumonie. En 1994, quelque temps après la fin de l'apartheid, les Khoïsan font appel à Nelson Mandela pour demander la restitution des restes de Saartjie afin de pouvoir lui offrir une sépulture et lui rendre sa dignité. La mobilisation des citoyens sud-africains est grande. L'écrivaine sud-africaine Diana Ferrus, publie en 1998 A poem for Sarah Bartman, texte dont la popularité joue un rôle important dans cette mobilisation. Mais ces demandes se heurtent à un refus des autorités et du monde scientifique français au nom du patrimoine inaliénable de l'Etat et de la science. Après le vote d'une loi spéciale de restitution, la France rend la dépouille à l'Afrique du Sud. Le 3 mai, la dépouille de Saartjie Baartman est solennellement accueillie au Cap. Le 9 août 2002, après une cérémonie religieuse, la dépouille, après avoir été purifiée, est placée sur un lit d'herbes sèches auquel on met le feu selon les rites de son peuple. Elle sera inhumée sur la colline de Vergaderingskop près de Hankey, son village natal. La cérémonie s'est déroulée en présence du président Thabo Mbeki et de plusieurs ministres et des chefs de la communauté khoïsan.