Le parti de Ali Benflis, Talaie El Houriet, réunissait son bureau politique samedi dernier à Alger et à l'issue duquel, il rend public un communiqué incendiaire contre la démarche du pouvoir, tant au plan politique qu'économique. De la dernière révision constitutionnelle au nouveau modèle de croissance économique, en passant par la loi électorale, le parti de Benflis en dresse un bilan cinglant et sans concessions ! Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Ainsi, «A l'entame de ses travaux et dans le cadre d'un échange de vues sur la situation générale prévalant dans le pays, le bureau politique a focalisé son attention sur le nouveau modèle de croissance économique annoncé par le Conseil des ministres réuni le 26 juillet 2016», lit-on dans le communiqué. S'en suit une série de constats et de critiques acerbes à l'encontre du «modèle», et de son auteur, le régime ! «le bureau politique a relevé la persistance du régime politique en place à traiter les grands dossiers nationaux dans l'opacité la plus totale, comme cela a été le cas récemment avec l'amnistie fiscale déguisée et l'emprunt national et, aujourd'hui, avec un prétendu nouveau modèle de croissance». Pour le parti, ce projet se caractérise par l'opacité la plus totale. Aussi, «le régime politique en place en réduit la présentation à un livre de recettes éculées et à un catalogue de vœux pieux, très loin de correspondre à la gravité exceptionnelle de la situation socio-économique actuelle». Toujours selon le même communiqué, «la présentation faite du prétendu nouveau modèle de croissance observe un silence troublant quant au contenu, aux échéanciers, aux instruments et aux objectifs mesurables et vérifiables de ce modèle, ce qui, en soi, révèle que le régime politique en place procède toujours par improvisation et par tâtonnement». Intervenant sur le tard, dans un contexte de disette, ce modèle «extrêmement coûteux (...) aurait été au moins compréhensible au moment de l'embellie financière qui avait offert au régime l'occasion qu'il n'a pas su saisir d'associer dans une même stratégie économique rénovée les nécessaires réformes structurelles et l'exploitation des gisements de croissance économiques disponibles dans le pays». De manière plus générale, le parti de Benflis relèvera que «le système économique actuel constitue, de par sa nature archaïque et dysfonctionnelle, la principale entrave à la croissance ainsi qu'en témoigne de manière irrécusable les niveaux remarquablement bas qu'elle n'a pu dépasser en dépit de l'injection massive de ressources financières à travers les différents plans de relance décidés tout au long des dix dernières années». Il s'agit, in fine, d'un «système économique, hostile à la croissance : sa conception clientéliste de la gestion économique, son utilisation de l'acte économique comme moyen de rétribution des allégeances et des sanctions des critiques et des insoumissions, son népotisme qui ne laisse pas de place à la rationalité économique, son caractère réfractaire au changement et à la réforme et la corruption généralisée (...)». Tout compte fait, le communiqué en conclut «qu'il serait vain d'attendre d'un système politique archaïque qu'il produise un système économique rénové et rénovant, tout comme il serait illusoire d'attendre de la performance, de la compétitivité et de la croissance soutenue d'un système économique dont les nombreux dysfonctionnements structurels sont eux-mêmes autant d'entraves dissuasives à la croissances et au développement». Au plan politique, ce n'est guère mieux, et le parti de Benflis use du même ton acerbe pour en dresser le bilan. Il cite , en l'occurrence, «la dernière révision constitutionnelle qui, en violation de toutes ses promesses, n'a servi au bout du compte qu'à offrir soit un nouvel ancrage juridique, soit une nouvelle couverture politique aux nouvelles vagues de restrictions des droits et des libertés, à la dénaturation du pluralisme politique et à l'amélioration du rendement de la tricherie politique et de la fraude électorale». Plus en détail, le communiqué cite aussi la nouvelle loi organique sur le régime électoral, «qui est venue conforter l'hégémonie politique des clientèles du régime politique en place qui met en elles tous les espoirs pour se reproduire, se reconduire et se perpétuer». Idem pour la loi organique sur l'instance de surveillance des élections qui, elle, «est venue conforter comme jamais auparavant la mainmise exclusive de l'appareil politico-administratif sur la gestion des processus électoraux tout comme elle est venue ajouter de nouveaux foyers de fraude à ceux déjà existants». L'une et l'autre loi, «prises ensemble, poursuit le communiqué, représentent une véritable machine de guerre contre l'opposition nationale à laquelle le régime en place est déterminé à imposer une compétition politique déloyale dont il fixe les conditions, établit les règles et prédétermine les résultats en persistant à recourir de manière éhontée à la tricherie politique et à la fraude électorale». A la veille d'importantes échéances électorales, l'ancien chef du gouvernement et candidat aux présidentielles de 2004 et 2014 sait, parfaitement, que le pouvoir ne fait jamais rien au hasard, s'agissant des dispositifs appelés à régir les élections.