Par Ahmed Halli [email protected] Selon une étude réalisée par une institution sérieuse et relayée par un magazine électronique aussi sérieux, Algérie-Focus, l'Algérie serait le pays le moins sensible à l'influence de Daesh. Se basant sur les chiffres du recrutement de candidats terroristes dans les pays musulmans, l'étude montre que jusqu'à décembre 2015, quelque 200 Algériens seulement ont suivi la filière terroriste. Un chiffre qui peut paraître étonnamment faible, pour l'Algérie, comparée à la Tunisie qui compte quelque 6 000 à 7 000 terroristes, contre 1 200 à 1 500 pour le Maroc. Ceci «en dépit de sa proximité des régions touchées par l'extrémisme et ayant connu un passé mouvementé de militantisme», constate l'étude des Réseaux d'information régionaux intégrés (IRIN en anglais). L'IRIN, créé en 1995, met des informations brutes et des analyses à la disposition des acteurs engagés dans l'action humanitaire ou le développement économique et développement humain, nous dit Wikipedia. Les réseaux IRIN sont rattachés au Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) de l'ONU, mais activent en toute indépendance, précise la même source. Ainsi donc, nous serions mieux immunisés contre les tentations djihadistes que nos voisins tunisiens et marocains, malgré notre passé récent et nos prédispositions certaines. Ce serait effectivement une vraie bonne nouvelle, s'il n'y avait pas tous ces minarets qui contredisent d'une certaine façon ces statistiques, en faisant de la propagande indirecte pour Daesh. Comme dirait l'autre, nos imams ne visent personne en particulier, sauf quand ils appellent Dieu à faire des coupes sombres dans les rangs des ennemis agresseurs judéo-chrétiens. Mais lorsque les ennemis sont issus du camp musulman, il y a deux possibilités : si ce sont des chiites et des sunnites qui se massacrent entre eux, en Irak, en Syrie et au Yémen, le choix est clair. Mais lorsque l'Arabie Saoudite lâche ses combattants sunnites, envoyés en Syrie pour déboulonner Béchar, et mobilise contre eux d'autres sunnites, il faut choisir soigneusement ses mots. Et encore ! Lorsque vous entendez cette invocation : «Allahouma, donne la victoire aux musulmans en Syrie et en Irak», vous êtes en droit de vous poser des questions. S'agit-il des troupes turques engagées en Syrie pour combattre Daesh, mais qui préfèrent casser du Kurde, en attendant de rencontrer des terroristes du califat, bien à l'abri en Turquie ? On sait que la cible prioritaire qu'on veut désigner à la divine providence est le dictateur Béchar Al-Assad, qui a aussi le tort d'être un peu chiite et d'être soutenu par le Hezbollah, mais le doute persiste. Pour l'Irak, on peut comprendre que le nœud central est la majorité chiite, mais il peut être question aussi des minorités religieuses, autrefois épargnées par le régime de Saddam Hussein. Quant aux Kurdes, connus pour leur tendresse avec leurs femmes, ils sont à la fois avec et contre Daesh, avec et contre le gouvernement d'Irak, et ils prennent part aux divers massacres, avant que les Turcs ne se chargent d'eux. Bref, nos imams se déchaînent tous les vendredis, coulent des flottes entières de «kouffars», avec leurs équipages, remplissent la terre de veuves et d'orphelins. Mais dès qu'il s'agit de faire des choix clairs, de sortir le «vive Daesh» qui trépigne au fond de leur gorge, c'est Dieu qu'ils mettent dans l'embarras en le sommant de reconnaître les siens. Au fait, quand est-ce qu'ils s'aviseront d'invoquer Dieu pour la paix universelle, au lieu de le supplier de préserver un monde musulman, engagé furieusement dans sa propre destruction ?