L'après-Cameroun aura en définitive laissé des séquelles sur la sélection nationale. Première conséquence d'un nul qui freine l'élan des Verts dans la course pour Russie-2018, le limogeage du technicien serbe, Milovan Rajevac. L'idylle FAF-Rajevac a tourné court. Quelque 70 jours après l'amorce de la relation de travail entre l'ex-coach du Ghana et le président de la FAF Mohamed Raouraoua, les deux parties ont convenu d'arrêter les frais d'une collaboration condamnée par le semi-échec de dimanche soir face au Cameroun, lors de la première journée des qualifications au Mondial-2018. Un nul qui n'aura fait qu'aggraver le sentiment d'exaspération qui régnait au sein du Club Algérie dès les premiers échanges avec le coach serbe dont la difficulté de communiquer n'était pas la seule tare. Ses choix techniques étaient tout aussi contestés. Cela s'est vérifié lors de la sortie face au Lesotho durant laquelle, outre le dérapage disciplinaire Slimani-Boudebouz, des interrogations pesaient sur le véritable rôle de Rajevac dans le choix des joueurs mais aussi sa décision de ne pas faire profiter ces derniers, du moins ceux qui n'avaient pas la chance de participer à la démonstration de force face au Lesotho, d'une joute amicale internationale (Rajevac avait préféré, en dernière minute, livrer un match face au WA Boufarik) durant la trêve internationale de septembre dernier. Pis, alors que les forfaits de joueurs-cadres se multipliaient et que, par ailleurs, la logique des statistiques du temps de jeu de certains convoqués au stage en prévision de la confrontation devant les Lions indomptables était implacable, Rajevac a fait le sourd, préférant adopter sa petite «philosophie» et partir en vrille sur des questions élémentaires de la préparation d'un match crucial face à un adversaire d'un autre calibre que celui qu'il a affronté le 4 septembre à Blida. Un entêtement qui a vexé les joueurs mais aussi les collaborateurs nationaux et étrangers (français) du Serbe. Ces derniers ne comprenaient pas particulièrement les «réflexions» émises par le nouveau sélectionneur concernant l'attitude par trop offensive des Verts (pressing haut et permanent), lui qui «conseillait» à son nouveau monde de faire preuve de prudence dans la gestion des matchs. Quelques détails à régler Une stratégie qui n'était pas du goût des joueurs, des autres membres du staff mais également du président de la FAF en personne. Ce dernier n'a, certes, pas apostrophé le nouveau premier responsable à la barre technique des Verts, préférant laisser le temps au temps. Cependant, l'impact de la contre-performance de la sélection devant une équipe du Cameroun qui ne constitue, de l'avis général, pas ce foudre de guerre devant lequel Feghouli et consorts allaient trébucher, de surcroît sur un terrain où ils restaient sur une série de 13 matchs sans défaite entamée depuis le 4-0 infligé au Rwanda (éliminatoires du Mondial-2014) en juin 2012, est tel que la séparation est inévitable. La FAF, dont le premier responsable a fermé tous les canaux de communication depuis dimanche soir, s'est exprimée hier suite à une sollicitation de l'APS. Une source fédérale, certainement Mohamed Raouraoua, ayant révélé la tenue d'un tête-à-tête entre Rajevac et Raouraoua, a soutenu que la cassure «entre lui (Rajevac, ndlr) et les joueurs (...) s'est bel et bien produite ». Une «cassure» exprimée par le capitaine de l'équipe Carl Medjani qui est allé voir l'entraîneur serbe pour l'informer que le groupe n'était pas disposé à continuer le travail sous sa coupe. Des sources proches de la FAF ont confié au Soir d'Algérie que le président de la fédération, Mohamed Raouraoua, a cautionné l'approche des joueurs, montrant son «dégoût» tout au long du match face au Cameroun. «Le président de la FAF était tellement en colère qu'il n'était pas en mesure de rejoindre, durant la mi-temps, le salon d'honneur lors de la pause-café en compagnie des VIP invitées à la rencontre dont des ministres», assure notre source qui confirme que la séparation entre la fédération et le technicien serbe est «consommée». «Il ne s'agit pas d'une séparation à l'amiable. C'est un limogeage en bonne et due forme. Rajevac attendra la décision de Raouraoua jusqu'à ce que ce dernier trouve un successeur dont le nom sera annoncé probablement aujourd'hui lors de la réunion du bureau fédéral », souligne notre interlocuteur qui confirme, d'autre part, que «Rajevac n'aura droit qu'à une mensualité (40 000 euros) en guise de dédommagement». Il semble bien que le président Raouraoua ait pris les devants au sujet de la question des indemnités à verser en cas de rupture unilatérale du contrat qui le liait jusqu'en mars 2019. Le Serbe, qui était au chômage depuis cinq années, aurait, selon nos sources, négocié sa collaboration avec la FAF en position de faiblesse. Sur un plan financier, les 40 mille euros consentis par la Fédération algérienne représentaient une «belle ristourne » comparativement au salaire et autres royalties versés au Français Christian Gourcuff. Ce dernier était rémunéré à 65 mille euros et avait droit à de nombreux avantages. Sur le plan contractuel, Rajevac ne semble pas avoir pris la peine de fixer des préalables en cas d'échec. Son contrat d'objectif ne prévoyait pas, selon nos sources, des échéances précises même si, publiquement, il déclarait qu'il avait accepté la mission de diriger l'EN algérienne avec laquelle il comptait aller en demi-finale du Mondial-2018 en sus d'un titre africain au Gabon, l'hiver prochain. La piste française réactivée Reste maintenant à savoir si l'interprète et entraîneur adjoint de Rajevac, Kristian Cvijetic, aura droit au même traitement. A savoir le versement d'un seul salaire en guise de dédommagement. C'est, grosso modo, ce détail qui devait prévaloir durant la rencontre prévue hier entre Raouraoua et le désormais ex-driver des Verts. Un entraîneur étranger qui aura battu le record d'éphémérité à la barre technique de la sélection nationale après le Belge Robert Waseige resté à la tête des Verts pendant quatre mois (mai à septembre 2004) avec, à la clé, le cuisant échec à Annaba face au Gabon (0-3) en éliminatoires du Mondial-2006. Son compatriote, Georges Leekens, a fait mieux avec une longévité de six mois (janvier à juillet 2003) durant lesquels il a dirigé 7 matchs dont deux à caractère officiel (qualifications à la CAN- 2004) matérialisés par un succès face à la Gambie et un nul à Ndjamena face au Tchad. La parenthèse Rajevac fermée, la FAF est à la recherche de son successeur. Depuis lundi après-midi, la quête du nouveau sélectionneur accapare l'emploi du temps du patron de la FAF plus que jamais convaincu que seule la piste française est en mesure de sauver les meubles. Un choix qui vient battre en brèche les «injonctions» de certains pour qui l'entraîneur local ou des binationaux serait la meilleure des solutions. Les noms d'Abdelkader Amrani (ESS) ou Rabah Saâdane (parti à la retraite) mais également celui de Djamel Belmadi (Lekhwiya, Qatar) avaient circulé sur les réseaux sociaux au même titre que ceux des Français Roland Courbis, Raymond Domenech ou Laurent Blanc. Cependant, Raouraoua semble persuadé que les techniciens français offrent de meilleures garanties. Sauf que pour les attirer et les convaincre du bienfondé du projet de la FAF, cette dernière devrait mettre les moyens. A titre de référence, Roland Courbis, qui exerce la fonction de consultant chez RMC, touchait à Montpellier, son dernier club en France, 50 000 euros, soit dix fois moins que Laurent Blanc qui avait un salaire de 500 000 euros au P-SG version qatarie. Pour l'ancien sélectionneur de l'équipe de France, libre depuis le Mondial en Afrique du Sud, les chiffres sont encore plus affolants. S'il est vrai qu'avant de partir à la retraite forcée, Domenech percevait un net annuel de 560 00 euros, soit une mensualité de moins de 47 000 euros (Rajevac touchait 365 000/an avec le Ghana alors que Rabah Saâdane avait une rentrée annuelle de 245 000), aujourd'hui la donne a nettement évolué. Hier, une gazette américaine spécialisée a fait de Domenech, le sportif-entrepris, la personne la mieux payée avec des gains de l'ordre de 82 millions/an, somme amassée entre septembre 2015 et septembre 2016. D'après les calculs de People With Money, ces chiffres tiennent des gains directs mais aussi des revenus issus de partenariats publicitaires, des royalties et des investissements. Pour le magazine américain, Domenech (64 ans) pèserait 245 millions d'euros engrangés à partir de gains professionnels, placements boursiers, un patrimoine immobilier conséquent et le très lucratif contrat publicitaire avec les cosmétiques CoverGirl. L'ex-latéral gauche de l'OL posséderait, par ailleurs, plusieurs restaurants à Paris (dont la chaîne «Chez l'gros Raymond»), un club de football à Lyon, et serait également impliqué dans la mode adolescente avec une ligne de vêtements «Domenech Séduction», ainsi qu'un parfum «L'eau de Raymond». De quoi donner le tournis à tous ceux qui songeraient à tâter le pouls du néo-président du syndicat des entraîneurs en France (Unicatef). Réponse probable ce jour d'Achoura...