Youcef Merahi [email protected] Oui, le feuilleton continue de plus belle. Cette campagne électorale me donne le tournis. Je ne sais pas ce qu'il en est pour vous ; mais, pour moi, je n'arrive pas à comprendre pourquoi cette perte de temps et cet argent gaspillé en déplacements, puisque le FLN – par la voix de son chef – tape sur le pupitre, utilise l'arabe, puis le français, dommage qu'il ne connaisse pas le tamazight, pour crier à qui veut le croire que son parti raflera la majorité des sièges de l'Assemblée. Pour plusieurs raisons : d'abord, le FLN est le père de l'indépendance, puis l'architecte du pays, et l'épine dorsale de l'Etat. Mieux encore, le FLN, c'est l'Etat ! Dans l'histoire du monde, il n'y a que Louis XIV qui a osé affirmer que «l'Etat, c'est moi». Personne d'autre à ma connaissance ! Le patron du FLN paie de sa personne ; il revient sur son parcours de moudjahid, condamné à mort par les forces coloniales ; il insiste ; il n'en démord pas ; contredit – me semble-t-il par un moudjahid –, il invente une formule qui va faire date dans l'histoire des discours politiques ; c'est toujours ça, non ? Il invente le concept de «martyr vivant». Autant que je sache, tous les martyrs sont morts ; à moins que certains d'entre eux soient revenus «cette semaine». Pour une nouvelle, c'en est une ! De programme économique, point ! Non, dit-il, le FLN n'a aucun programme à présenter. Le seul programme, pris comme vérité révélée, c'est celui du Président. Et avec ça, il annonce triomphant que son parti aura la majorité au Parlement. En fait, le patron du FLN n'a d'autre ambition que d'être, tout bonnement, l'Etat. Comme si les autres partis politiques n'ont pas droit au chapitre. A remarque, me diriez-vous, il y a des partis qui placardent des affiches, avec des photos sans photos. Si, si, ça existe ! Il n'y a qu'en Algérie qu'on peut réussir ce miracle. Là, il n'y a pas de programme ; là-bas, il y a des candidats fantômes. Et on nous demande d'aller voter en masse, le 4 mai prochain. Je rends grâce à cet internaute qui cherchait une occupation pour le jour du vote. Personnellement, je lui ai conseillé d'attaquer l'écriture d'un roman, en tamazight. D'autres internautes lui ont conseillé de vider une bouteille de vin, de faire une partie de pêche, de rester tranquille à la maison et d'attendre le 5 mai. Ah ce 5 mai qui semble affoler le patron du MPA ! Que ferons-nous le lendemain du vote s'il n'y a pas vote massif ? Impasse politique, répond-il. Et alors, suis-je tenté de lui répondre. Ne sommes-nous pas le pays des miracles ? Qu'on se rappelle du HCE ! Puis, si je m'en tiens au discours du chef du FLN, pourquoi devrais-je ne pas le croire, puisque l'Etat, c'est lui ? Les jeux sont d'ores et déjà faits. Le FLN dispose de la majorité, comme c'est toujours le cas. Je raisonne par l'absurde. Comment ? Il n'y a pas d'absurde en politique. Mais c'est le propre même de l'absurde absurde ! Il n'y a pas de morale ; oui, je te crois, mon frère. Le SG du RND, lui, tacle, gentiment, son alter ego du FLN. Il dénie l'idée au FLN de rêver d'une quelconque majorité. Eh oui, le gouvernement fait saliver ; le pouvoir, encore plus. Qu'on ne s'y méprenne pas du tout, 2019 n'est pas une échéance si lointaine que ça ; du reste, le chef du FLN l'a bien compris, puisqu'il a d'ores et déjà jeté l'appât du cinquième mandat. En attendant, la tirelire nationale chute de 10 milliards de dollars, en l'espace de deux petits mois. En attendant, licence d'importation ou pas, le gouvernement n'arrive pas à juguler la hausse des prix. En attendant, changement de DG de la Sonatrach ou pas, le pétrole fait du sur-place. En attendant, la décentralisation est restée lettre morte depuis les années soixante. En attendant, il y a ceux qui pensent que voter relève du djihad. En attendant, on nous jette à la figure comme un épouvantail la menace d'un «printemps arabe» en Algérie. Voilà les dés sont jetés : on s'amuse à nous faire peur. A tout moment, on nous brandit le spectre de l'unité nationale, comme si cette dernière était en sursis. A tout moment, on nous brandit cette main étrangère, aux doigts crochus de sorcière, qui attend son heure pour nous prendre à la gorge. A tout moment, on nous brandit – c'est tout nouveau – cette main intérieure, aux doigts traîtres, qui attend son heure pour dépecer la Nation algérienne. Cette campagne électorale est drôle. Je la ressens comme ça, personnellement. Ce ne sont pas ces affiches affichées, un peu partout, sauf dans les endroits indiqués par l'administration ; ni ces visages sans visages pour une élection fantôme. C'est plutôt ce discours qu'on nous tient depuis des lustres, sans changer des fois une virgule au texte. C'est plus qu'une tentation démagogique, c'est de la démagogie ! Primauté supposée du FLN, par-là. RND, parti préfabriqué par l'administration des années quatre-vingt-dix, «parti né moustachu» ; cette formule a été déjà utilisée, en son temps ; reprise par le patron du FLN, dernièrement. Partis, dits islamistes, qui invoquent le djihad, pour convaincre les électeurs de voter. Mais, point de programme social ou économique ! Les promesses sont faciles à donner, mais difficiles à tenir. Alors, je voudrais dire à cet internaute qui ne sait pas quoi faire de sa journée du 4 mai, jour du vote, d'aller conter fleurette à la mer, elle si facile à conquérir, pour peu qu'on sache lui faire les yeux doux et qu'on sache lui réciter un poème. Puis que chacun fasse selon sa conscience ! Personnellement, je sais quoi faire ce jour-là.