Par Hassane Zerrouky A l'heure du tout visible et du citoyen connecté, ce qui a changé par rapport à 2002 dans cette Algérie gagnée par la fièvre du Web, c'est l'irruption des réseaux sociaux, des vidéos des youtubeurs, vues par des millions d'Algériens. Fait remarquable, plus que le taux de participation (38,35%) et des résultats en eux-mêmes, c'est l'irruption de ces youtubeurs et leurs vidéos décalées (Anes Tina, entre autres) et autres facebookers dans cette campagne électorale. Leurs vidéos, vues par des millions de personnes de tout âge, exprimaient un besoin de changement. Elles montrent combien les réseaux sociaux sont en train de bouleverser, à une vitesse incroyable et sans bruit, le rapport au politique et au social. En quelques années, l'introduction de la G3, puis de la G4, avec un débit et une hyper-connexion exceptionnels, a tout changé. Toute la différence avec le scrutin législatif de mai 2002, qui s'était déroulé en plein printemps dit arabe et dans une Algérie vivant à l'ère du G2, est là. Et c'est ce que n'a pas vu et compris le pouvoir politique. Avant, «le processus communicationnel était à sens unique, sans aucune possibilité de feedback ou d'interaction», observe le consultant en communication Damien Liccia (Les Echos du 25/2/16). Aujourd'hui, l'émetteur (le dirigeant politique, un parti ou un dirigeant syndicaliste) peut être interpellé, contredit ou raillé, en temps réel, par Tweet ou Facebook, sans attendre le commentaire avisé et forcément décalé du politologue, par une multitude d'internautes anonymes. C'est le cas aujourd'hui dans cette Algérie gagnée par la fièvre du Web et du citoyen connecté. A l'heure donc du tout visible, où des femmes invisibles – un voile sans visage – se sont présentées aux élections, dans une campagne électorale caractérisée par une absence de débats, d'opposition de projets socio-politiques afin que les Algériens puissent trancher en connaissance de cause, où des candidats, se succédant l'un derrière l'autre sur la télévision, débitant un discours à peine audible, on a l'impression que le temps a marqué un coup d'arrêt en Algérie. C'est comme si rien ne se passait autour, comme si l'Algérie n'était pas une partie d'un tout, qui s'appelle le monde, et auquel elle est reliée par une infinité de liens humains, informationnels, économiques, scientifiques, technologiques, culturels et sociaux.