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Bonnes feuilles
Hiziya princesse d'amour des Zibans
Publié dans Le Soir d'Algérie le 05 - 10 - 2017

Le poète et écrivain Lazhari Labter vient de publier Hiziya, princesse d'amour des Ziban. Cette histoire d'amour, chantée depuis des décennies, a inspiré l'auteur de ce roman en raison du fait qu'il la considère «comme la plus belle histoire de notre patrimoine immatériel». Lezhari Labter, qui fut longtemps journaliste, puis éditeur de livres, fait ici une incursion dans le roman, dont nous vous livrons quelques bonnes feuilles.
R. C.
Issue de la grande et riche famille des Bouakkaz, établie dans la petite oasis de Sidi Khaled, pas loin de Biskra, de la puissante tribu des Dhouaouda, descendants des Banou Hilal, Hiziya, qu'on dit princesse, voit le jour en 1855, huit siècles après les invasions des troupes hilaliennes, composées d'hommes essentiellement dont les survivants prirent épouse dans les tribus berbères et se fondirent en eux.
En cette seconde moitié du XIXe siècle, cette région des monts du Zab ou monts des Ziban, de la grande chaîne de l'Atlas saharien, située entre le massif de l'Aurès à l'est et les monts des Ouled Naïl à l'ouest, sur laquelle régnait, sous la férule de Cheikh al-Arab, la tribu des Dhouaouda dont les terres de parcours s'étendaient de la luxuriante et riche oasis de Sidi Khaled aux vastes et fertiles plaines de Sétif au nord, allait vivre l'une des plus belles histoires d'amour entre Hiziya et son cousin S'aiyyad le paysan. Et des plus tragiques aussi.
C'est de cette idylle incroyable qu'il est question ici, semblable en beaucoup de points à celle vécue dans la première moitié du VIIIe siècle de l'hégire par le légendaire couple Qays et Leïla, dit Majnoun Leïla qui mourut d'amour pour celle que son père préféra donner à autre que lui.
Elle pourrait commencer comme un conte : «Il était une fois une jeune et belle fille répondant au joli nom de Hiziya, follement éprise de son jeune et beau cousin S'aiyyad, cavalier émérite et amant hardi, orphelin recueilli dès sa plus tendre enfance par son oncle paternel, père de la Reine des belles et puissant notable d'une famille de grande tente de l'oasis de Sidi Khaled, dans les monts des Ziban, à l'orée du désert, à la lisière du fascinant Sahara...»
Cette histoire nous a été rapportée par un immense poète du nom de Mohamed Benguitoun dans un long poème élégiaque intitulé Hiziya, écrit trois jours après sa mort, dit-on, soit Al-Ithnayn 14 Dhou Al-Hijja1295 correspondant au lundi 9 décembre 1878. (...)
L'histoire tragique de Hiziya, de sa famille et de sa tribu s'inscrit dans un long processus historique complexe plein de bouleversements sociaux, économiques et politiques qui va des invasions hilaliennes à la prise de la ville de Biskra en 1844 et ses localités dont Sidi Khaled, en passant par l'occupation de l'Algérie par les Ottomans durant trois siècles, de 1517 à 1830 et la colonisation de l'Algérie par les Français qui commença par la prise d'Alger en 1830. (...)
C'est à cette époque troublée et incertaine que vit le jour Hiziya en 1855 et qu'évoque Mohamed Benguitoun au tout début de son poème, écrit en 1878 à sa mort à la fleur de l'âge. (...)
Le poème de Benguitoun est en fait une élégie, un chant de mort, connu depuis l'Antiquité comme une des formes de la poésie, et devenue à partir de la Renaissance un genre poétique, faisant partie de la poésie lyrique, «mirthat» en arabe, considérée depuis toujours comme genre à part entière chez les Arabes. L'élégie est particulièrement adaptée à l'évocation d'un mort ou à l'évocation d'une souffrance amoureuse due à un abandon, une absence ou une perte. Et c'est exactement le cas de Hiziya, morte à la fleur de l'âge et en pleine passion amoureuse.
Pourquoi près de cent quarante ans après sa relation, cette histoire d'amour continue-t-elle à nous émouvoir et à nous bouleverser ? À part le poème de Benguitoun, que nous reste-t-il de ce couple légendaire hormis une tombe dans le cimetière de Sidi Khaled et les différentes versions orales colportées par les uns et les autres ? Le poète qui a composé Hiziya à l'âge de 35 ans avait-il connu Hiziya et S'aiyyad en personne ou avait-il composé le poème parce que leur histoire l'avait bouleversé ? Le poète qui ne composait que des «madayeh», des poèmes à la gloire du prophète Mohamed, a fait une seule fois, la bonne fois pour notre plus grand plaisir, une entorse à la règle qu'il s'était imposée, contrairement à son contemporain Abdallah Ben Kerriou de Laghouat, l'auteur du fameux Gamr Elleil, la pleine lune, qui n'avait, lui, composé que des poèmes d'amour ! (...)
Les belles journées d'été qui n'en finissaient pas de s'étirer en longueur étaient loin derrière eux. Celles du mois de ramadan, en septembre, avaient été les plus éprouvantes pour les hommes et les femmes à cause du jeûne. Les trois jours de liesse et de bombance de l'Aïd Seghir, fêté comme il se doit, leur avaient fait oublier l'épreuve de l'abstinence et surtout la soif sous la chaleur.
Les nuages qui commençaient à s'amonceler dans le ciel chargé de promesses de pluies bienfaisantes en cette fin du mois de novembre, le soleil dont les feux ne brûlaient plus les chairs des hommes et des bêtes, l'herbe des plaines, les feuilles des arbres, la terre et les pierres et qui asséchait tôt le matin la rosée sur les herbes folles des berges de la sebkha, annonçaient la fin des pâturages, du troc et des marchandages sur les riches terres à blé de Bazer Sakhra où, depuis des temps immémoriaux, ils avaient pris l'habitude d'établir leur campement, au nord d'El-Eulma et de son célèbre souk où se vendaient et s'achetaient blé de grandes qualités, ovins et bovins de race, moutons et chèvres, ânes, mulets et dromadaires, et rappelaient à tous l'imminence du retour vers le Sahara pour y passer l'hiver, après les longs mois loin de leurs foyers. (...)
Aux toutes premières lueurs de l'aube, dans le froid piquant du petit matin, après avoir prié, ranimés le feu et pris du thé sucré accompagné de galette, les hommes frais et pleins d'énergie, et les dizaines de dromadaires, reliés par une corde l'un à l'autre pour parer à toute dispersion, portant chacun deux guerbas et lourdement chargés de chaque côté de marchandises, les palanquins bien attachés sur le dos d'une vingtaine de bêtes, abritant les femmes du soleil, de la poussière, des essaims de mouches qui énervent les hommes et les bêtes par leur bourdonnement et leurs piqûres, la caravane s'ébranla en direction d'Aïn Azel.(...)
Comment trouver les mots justes pour parler de Hiziya, la décrire ? Un jour, Mohamed, l'ami intime de S'aiyyad, poète à ses heures perdues, auquel il s'était confié, lui révélant l'amour qu'il avait pour elle depuis toujours, lui demanda de la décrire au cours d'une halte sous un arbre de «btoum» à la fin d'une partie de chasse à l'autruche qui les avait épuisés. Après avoir réfléchi quelques instants, S'aiyyad lâcha : «Incomparable !» Et, comme pour se faire bien comprendre, il ajouta : «Incomparable comme le ciel étoilé de la nuit au désert qu'on ne peut comparer qu'à lui-même.» (...)
Cette nuit-là, ses lèvres rouges et brûlantes, au goût exquis de miel d'acacia mêlé au doux lait des brebis, s'offrirent comme si c'était la première fois. Cette nuit-là, sa rose à nulle autre pareille s'ouvrit en déployant en corolle ses pétales roses et délicats, livrant au soleil de son désir son pistil que le bout de sa langue affola jusqu'à ce qu'il perlât en gouttes de rosée.
Cette nuit-là, sa source d'eau vive jaillissant des monts du Zab à la moindre parole, au moindre regard posé sur elle, au moindre attouchement, lui prodigua le meilleur du «legmi» et il ne se priva pas du plaisir de boire avec délectation cet élixir fermenté qui lui faisait tourner la tête et réveillait ses sens, le revigorait et le rendait immortel.
Cette nuit-là, il chercha frénétiquement son bouton de rose lové dans l'entremêlement des chairs fines et légèrement salées pour le ramener de l'obscurité de son nid douillet à la lumière du jour et le faire s'épanouir au soleil de sa force virile qui s'impatientait à la porte de son royaume de feu.
Cette nuit-là, il but la rosée à l'aube de son sein.
Cette nuit-là, il cueillit ses pétales de chair à la lisière de sa rose.
Cette nuit-là, il goûta au plaisir extrême de sa douce Lune et brûla au feu ardent de son Soleil.
Cette nuit-là, en Hiziya il se disloqua.(...)
De retour, Hiyzia rejoignit sa tente et commença à s'apprêter pour son homme qui, comme à son habitude, faisait le tour du camp pour s'assurer que tout allait bien et que les gardes étaient à leur poste. Elle versa de l'eau de sa guerba dans sa gnouna et se lava avec soin les mains et le visage devant la tente. Elle lâcha sa belle chevelure et se glissa sous un «hanbal» après s'être désaltérée avec l'eau qui restait au fond de l'outre...
S'aiyyad ne tarda pas à rejoindre sa belle sous la lourde couverture, attirant contre lui son corps chaud à la peau douce à la caresse. Les lèvres de Hiziya fondirent sous ses baisers passionnés. Elle eut un petit cri de satisfaction quand sa main s'empara de son sein droit et le pressa.
«J'aime ta main sur mon sein qu'elle épouse parfaitement !», lui dit-elle. (...)
Ils arrivèrent sans encombre à El Hania, juste avant la tombée de la nuit. Ils n'étaient plus qu'à deux journées de marche d'Ouled Djellal et Sidi Khaled. L'excitation gagnait hommes et femmes. Ils choisirent une étendue de sable et y établirent leur campement pour la nuit. Ils voyaient, de là où ils étaient, les milliers de palmiers de Tolga qui donnaient cette date à nulle autre pareille, la «deglet nour», appréciée et recherchée par tous.
Hiziya se sentait fatiguée.
Pour la distraire, S'aiyyad s'assit à côté d'elle, à l'entrée de la tente où un feu crépitait, face au soleil couchant qui embrasait l'horizon au-dessus des faites des palmiers, sortit sa flûte et la porta à ses lèvres. Quelques secondes après, en sortirent des sons d'une douceur infinie qu'il fit varier en virtuose avec des inflexions différentes, tantôt caressantes et tantôt déchirantes, qui firent verser les larmes de Hiziya qui lui posa sa main sur son bras musclé sous ses habits et le serra de manière significative.
«Je ne sais ce qui m'arrive, mais je me sens si lasse. Je sens que mes forces m'abandonnent petit à petit. S'ayyad, promets-moi que s'il m'arrivait un malheur, tu ne m'oublierais pas...» (...)
Il se souvint des séances où, à sa demande, il avait tatoué certaines parties de son corps. Point par point, en points réguliers, nets et bien alignés, avec soin et patience, comme une brodeuse qui fait dans la dentelle, S'aiyyad avait tracé entre le sillon des seins de Hiziya un palmier, cet arbre à nul autre pareil qui vit jusqu'à un siècle et fournit jusqu'à sa mort des richesses multiples, de la tête au pied, les dattes pour manger, le «jrid» ou palmes pour protéger et couvrir, le «joummakh» ou cœur de palmier pour déguster, le «legmi» ou suc de palmier pour se désaltérer ou s'enivrer une fois transformé en vin de palme, le «lif» pour couvrir, le «ziouay» pour balayer, le «kernaf» pour se chauffer, les noyaux pour nourrir le bétail, le tronc pour bâtir.
«Quoi de plus beau qu'un palmier, symbole de l'étreinte amoureuse et de la naissance d'un enfant, entre tes seins adorés, ces pommes interdites faites pour ma bouche et mes mains ?», lui avait-il dit tout en continuant son minutieux et délicat travail. Il l'agrémenta d'un côté et de l'autre de ses seins d'un œil de perdrix, l'oiseau symbole de beauté et de liberté, qui a la réputation d'être difficile à apprivoiser.
Après avoir tracé des palmes, symbole de fécondité, source de richesse et figure protectrice, sur ses belles et fines chevilles, il lui dit en souriant : «Ainsi aucun sein ne sera jaloux de l'autre et aucune cheville n'enviera l'autre, ma belle perdrix apprivoisée !»
Elle lui sourit malgré la douleur.
«Tu vivras cent ans comme le palmier !», ma bien-aimée, ajouta-il.
Elle se contenta de lui dire : «Tatoue ton nom, Sidi, sur mes poignets, au-dessus des bracelets d'argent ! » (...)
Il posa sa flûte à côté de lui, se tourna vers elle, lui prit amoureusement le visage et lui dit d'une voix aussi douce que du miel : «Jamais je ne laisserai, ma ‘‘nakhla'' tomber, jamais aucun vent n'arrachera mon si beau palmier !» Elle lui sourit en faisant un effort pour ne rien laisser paraître de la lassitude qu'elle sentait s'installer en elle, de plus en plus, heure après heure.
La douceur et la langueur des sons de la flûte qui montaient au ciel où des milliers d'étoiles commençaient à danser la danse mystérieuse des origines et des fins de toutes choses firent remonter les beaux souvenirs des jours de liesse...
Hiziya, princesse d'amour des Ziban
Editions El Ibriz, Alger, 290 pages, 1 000 DA.
La présentation du roman aura lieu le samedi 7 octobre à 14h au «Sous-Marin» (siège du MDS), 67 boulevard colonel Krim Belkacem, Télemly (à côté du lycée de filles Zineb-Oum-El-Massakine (ex-Sainte-Elisabeth), Alger.
À Laghouat, le jeudi 12 octobre à partir de 14h au Musée communal de Laghouat (ex-Basilique Saint Hilarion de Laghouat).
Signature tous les jours au Salon international du livre d'Alger du 26 octobre au 5 novembre au niveau du stand des éditions El-Ibriz.


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