Le Soir d'Algérie : Quel bilan faites-vous de la journée de protestation de l'Intersyndicale de la Fonction publique ? Dr Merabet : Le bilan est positif même si le rassemblement d'Alger qui devait se faire au nom des bureaux de wilaya a été empêché grâce à un déploiement inédit des forces de l'ordre. Tous les chemins menant au lieu du rassemblement ont été bouclés. Des syndicalistes ont été arrêtés. Les présidents des syndicats ont été empêchés d'accéder au siège de l'Unpef où devait se tenir une réunion pour l'évaluation de la grève. A Alger, il y avait plus de policiers que de manifestants. Même des citoyens n'ayant aucun lien avec les syndicats ont été incommodés par des contrôles d'identité. La grève a, quant à elle, été une réussite. Comment jugez-vous la réaction des pouvoirs publics ? Les pouvoirs publics essayent de contenir la situation qui est née des difficultés sociales qui s'expriment dans différents secteurs. On essaye d'étouffer toutes les actions de protestation par un recours à la justice qui déclare sans surprise tous les mouvements de grève illégaux. Cette situation perdure depuis 2004, date à laquelle plusieurs mouvements de protestations avaient touché de nombreux secteurs. Sous couvert des décisions de justice, les pouvoirs publics ont recours systématiquement aux ponctions sur salaires. Dès le premier jour de grève, le salaire des grévistes est touché sans possibilité de négocier. C'est une manière d'affamer le salarié et de le dissuader de recourir à toute forme de protestation. Les lois sur le travail sont piétinées. Des personnes en grève sont mutées, remplacées voire licenciées. Il s'agit là de messages clairs et de mesures disciplinaires et répressives qui sont légitimées par des décisions de justice qui deviennent un standard même lorsque le service minimum est assuré. Des solutions doivent pourtant exister ? On ne peut parler de solutions sans reconnaître la pluralité syndicale. Pour le moment, cette dernière reste dans les textes alors que cette pluralité est un acquis et le fruit de luttes menées par les Algériens. Dans les faits, il n'y a que des entraves. Les pouvoirs publics n'arrivent toujours pas à intégrer cette réalité. Si les différentes franges de la population s'expriment aujourd'hui dans le mécontentement, c'est la résultante de politiques économiques qui ont montré leurs limites. On ne peut pas gérer l'urgence avec l'esprit de rente. C'est dans cette situation que nous essayons d'avancer. Il nous faut travailler dans l'unité. L'urgence, c'est de mettre en place la conféderation des syndicats autonomes pour instaurer dans l'esprit des pouvoirs publics l'idée de travailler avec nous.