�Je ne suis qu'un bouc �missaire et victime d'une ville connue pour ses luttes de clans.� Cette phrase l�ch�e par Bachir Frik, l'ex-wali d'Oran poursuivi par la justice, pour �d�tournement et dilapidation de biens publics�, r�sume � elle seule l'ambiance qui r�gnait hier lors du troisi�me jour du proc�s, qui se tient depuis mercredi dernier au niveau du tribunal criminel pr�s la cour d'Alger. Un proc�s qui n'est qu'� son d�but, mais d�j� caract�ris� par des interventions magistrales des principaux acteurs, � savoir les avocats de la d�fense, le repr�sentant du minist�re public, mais surtout la pr�sidente du tribunal criminel, Mme Benyoucef, qui, de l'avis de tous les observateurs, s'est acquitt�e admirablement de son r�le de magistrat pour �faire toute la lumi�re dans cette affaire �. Hier, jusqu'� � une heure tardive, le tribunal criminel poursuivait les auditions des pr�venus, dont le dernier a �t� entendu par �tait l'ex-wali d'Oran. L'audition de ce dernier a d�but� � 16h pr�cises, soit juste apr�s l'audition de l'ex-directeur g�n�ral de l'agence fonci�re de la ville d'Oran. Une audition qui a dur� plus de six heures durant lesquelles beaucoup de choses ont �t� dites aussi bien par le pr�venu que par le procureur g�n�ral, qui ne ratait aucune opportunit� pour mettre en exergue �les chefs d'inculpation des mis en cause�. Mais, il n'en demeure que le passage de Bachir Frik � la barre �tait jusqu'� maintenant un des moments les plus forts de ce proc�s. �Tout le monde m'avait applaudi, y compris Maghlaoui� Portant des lunettes et v�tu d'un costume de couleur beige, Bachir Frik s'est pr�sent� � la barre en affichant s�r�nit� et assurance. Le verbe facile et ma�trisant aussi bien les deux langues, l'ex-wali d'Oran a pr�f�r� user de la langue arabe soutenue par quelques mots en langue fran�aise pour expliquer la �d�b�cle dont je suis victime �. Mais avant qu'il ne s'explique sur les faits qui lui sont reproch�s, le pr�venu demande � la pr�sidente de porter � sa connaissance les circonstances dans lesquelles il s'est retrouv� comme premier magistrat de la wilaya d'Oran, mais surtout �ce que j'ai r�alis� pour cette r�gion et comment je me suis retrouv� derri�re les barreaux durant quarante moi�. �Expliquez-vous, mais sachez que le plus important pour le tribunal criminel est de s'expliquer sur les chefs d'inculpation pour lesquels vous �tes poursuivi �, lui explique la pr�sidente du tribunal. Sur un ton serein, Bachir frik retrace son parcours de wali : �En juillet 1994, le ministre de l'Int�rieur de l'�poque me contacte en m'informant que le pr�sident de la R�publique m'avait choisi pour �tre � la t�te de la wilaya d'Oran. C'�tait difficile pour moi d'accepter cette proposition d'autant qu'auparavant je me trouvais durant quatre ann�es � la t�te de la wilaya de Jijel. Une fois install� � la t�te de la wilaya d'Oran, je me trouve face � une situation des plus complexes. 70.000 demandes de logement � satisfaire et autant de besoins sociaux � r�aliser. J'avais les choses en mains et j'ai mis en place une strat�gie qui m'a permis de r�aliser 15.000 logements et la distribution de 20.000 lots de terrain. La ville d'Oran �tait ceintur�e d'un bidonville de 15.000 �mes. Mes collaborateurs et moi avons cr�� cinq centres de transit sans compter le fait que j'ai relog� 400 familles victimes de terrorisme. Tout le monde m'avait applaudi, y compris le ministre de l'�poque, M. Maghlaoui.� L'assistance suit attentivement l'intervention de l'ex-wali d'Oran, alors que les deux membres du jury mentionnent sur des feuilles le moindre d�tail qu'ils jugent important. �Les forces occultes et les clans d'int�r�ts �taient derri�re mon incarc�ration� Et Bachir Frik de poursuivre : �En 1997, j'ai demand� � quitter la wilaya d'Oran pour Annaba. Dans cette wilaya, je suis rest� deux ann�es. En 2000, je suis mis en retraite avec vingt-deux autres walis. Durant les deux ann�es qui ont suivi ma mise en retraite, je suis rest� chez mois avec mes enfants que je n'ai pas eu l'occasion de voir grandir durant des ann�es. Subitement, je me suis retrouv� au centre d'une m�diatisation dont je ne conna�s ni les tenants encore moins les aboutissants. Ce n'est qu'apr�s que j'ai conclu que j'�tais victime des clans d'int�r�ts.� La pr�sidente du tribunal intervient et coupe le pr�venu. �Soyez plus pr�cis et dites qui sont ces clans et o� se trouvennnt ces int�r�ts ?� �Je me suis retrouv� au centre de cette affaire en 2001, lorsqu'une f�roce campagne m�diatique �tait men�e contre moi par le biais de journaux dont certains � vocation r�gionale. Je ne suis qu'un bouc �missaire et une victime d'une ville connue pour ses luttes de clans. Tout a commenc�r lorsqu'un rapport a �t� envoy� par la pr�sidence de la R�publique de la part d'un s�nateur relevant du tiers pr�sidentiel. Le document en question fait �tat de graves accusations contre M. Mokrani,'ex-chef de S�ret� de wilaya d'Oran, des hauts officiers de la hi�rarchie militaire de la r�gion, des responsables des douanes, des responsables d'associations locales, ect. Les accusations �taient graves et moi je ne suis nullement concern�. Subitement, je me trouve au centre d'une affaire qui ne me concerne ni de pr�s ni de loin. On a cherch� un bouc �missaire et on retrouve en Bachir Frik la personne appropri�e. Il y a aussi l'esprit r�gionaliste qui a anim� mes d�tracteurs. M. Mokrani, en sa qualit� de chef de S�ret� de wilaya de l'�poque, lance � mon encontre plusieurs enqu�tes. Il voulait � tout prix me porter atteinte et trouver des indices qui puissent m'inculper. Tout cela �tait suivi d'une campagne m�diatique bien organis�e. J'�tais journaliste et je sais comment certains articles �taient command�s et dirig�s.� Le procureur g�n�ral, M. Kahoul, intervient et demande � la pr�sidente d'arr�ter le r�cit du pr�venu car �il est hors sujet�. Altercation et �lectricit� dans l'air. Les avocats de Bachir Frik interviennent et demandent � la pr�sidente �d'user de son autorit� pour �viter ce genre de d�rapage�. Fid�le � elle-m�me, la pr�sidente rappelle tout le monde � l'ordre et poursuit l'audition sous l'œil vigilant de Me Menaceur El Hachemi, qui se mettait debout � chaque fois que le nom de son client �tait cit�. Il est � noter que lors de son audition, le directeur g�n�ral de l'agence fonci�re d'Oran, se r�f�rant � chacune de ses interventions � la r�glementation r�gissant son secteur, indiquait au tribunal criminel que toutes les �attributions ont �t� faites conform�ment � la loi, m�me si je subissais des pressions venant de partout �. Abder Bettache