Jusqu'aux ann�es 80, le cours de l�Histoire ob�issait � une certaine logique, s�inscrivant toujours dans la m�me dynamique de progr�s qui avait permis tant de conqu�tes �clatantes pour l�homme. Avant ce virage d�sastreux, l�heure �tait � l�optimisme. La grande r�volution culturelle de mai 1968, n�e de la r�volte des jeunes contre le syst�me, donnait un s�rieux coup de pied � l�ordre bourgeois. Toute la plan�te s��tait mise � r�ver � un monde meilleur, plus humain ; un monde sans exploitation, sans racisme, sans injustice, sans guerre, sans famine. La jeunesse mondiale prenait Che Guevara pour h�ros et le rock pour religion. C'�tait l'�re des grandes esp�rances� Cette p�riode notable du si�cle sonnait la chute de l�imp�rialisme am�ricain sur les terres du Sud-Est asiatique. L'Occident, ahuri, grimpait sur les v�los pour aller au travail car il n'y avait plus d'essence dans les pompes. Les pays producteurs de p�trole, r�unis sous la banni�re de la lutte anti-imp�rialiste, prenaient leur revanche. Boumediene s'en allait pr�cher la bonne parole pour revendiquer un ordre �conomique plus juste A New York, devant le sommet extraordinaire, mais aussi � Lahore o� son discours restera un moment fort de la lutte des plus faibles contre l'injustice d'un monde fait sur mesure pour les riches. Cette �tape �tait marqu�e �galement par les profondes d�sillusions du monde occidental emp�tr� dans de grands probl�mes �conomiques et une d�rive morale dont Nixon, le chef tout-puissant des Etats-Unis, fera les frais. Le bloc socialiste ne se portait pas mieux mais le discours officiel �tait toujours � l'enthousiasme r�volutionnaire� Personne ne verra venir la lame de fond qui va agir comme une vague d�ferlante pour emporter toutes les certitudes vers les rivages incertains d'un futur brumeux qui se construit encore sous nos yeux ahuris. La tomb�e du mur de Berlin allait changer radicalement le cours de l'Histoire. Ce jour-l�, personne ne se doutait que le monde �tait en train de se m�tamorphoser ! Un � un, les pays satellites de l'Union sovi�tique allaient s�effondrer. L'URSS, qui pensait � ce moment-l� que sa �perestro�ka�, entam�e plus t�t, allait lui �viter le pire, rejoindra le peloton et cessera d'�tre le porte-drapeau du camp socialiste� L'implosion de l'URSS allait changer les donn�es g�ostrat�giques, car le rapport de force qui reposait depuis plus de quarante ans sur l'�quilibre entre les deux superpuissances, �tait cass�, ne laissant plus qu'un seul cavalier sur le champ de courses. En 1991, premi�re guerre du n�o-imp�rialisme sous l��tendard d�une coalition men�e par les Etats-Unis. Durant la p�riode qui suit, les multinationales renforcent leur pouvoir et imposent leur diktat aux Etats et aux peuples, cr�ant une gigantesque toile d'int�r�ts capitalistes. Le monde qui en na�t est celui de la supr�matie du Capital sur les valeurs d'humanisme et de progr�s social qui ont longtemps fait r�ver les g�n�rations. Ce monde n'est pas beau : il a la couleur de la guerre men�e par Bush contre le peuple irakien. Il a la laideur de la rapacit� et son avenir ne me para�t pas porteur des m�mes esp�rances qui avaient salu� la naissance du si�cle pr�c�dent lorsque les progr�s technique et scientifique faisaient miroiter des r�ves de bonheur et de prosp�rit� pour la majorit�. Malgr� toutes les promesses qu'il offre sur le plan technologique et scientifique, le si�cle qui commence ne porte pas les germes d'un monde meilleur pour les enfants de Soweto, de Gaza et des favelas de Rio. C�est tout simplement le nouveau Moyen-Age qui s�installe. Comme dans l�ancien, le foss� entre les riches et les pauvres est en train de s�agrandir d�une mani�re effrayante. Les dirigeants des pays sont issus des m�mes familles et nous assistons � l��mergence d�un ph�nom�ne incroyable : les r�publiques h�r�ditaires. Les dynasties s�appellent d�sormais Bush, Kim Il, El Hariri, Moubarak, etc. La vie humaine n�a plus d�importance. Le retour � l�esclavage marque les syst�mes �conomiques de plusieurs pays �mergents o� les multinationales s�installent pour profiter d�une masse d�ouvriers corv�ables et mall�ables � merci contre des salaires mis�rables. Partout, c�est la loi du plus fort, comme durant le Moyen-Age. Ainsi, nous assistons au retour des empires totalitaires, alors que l�obscurantisme et l�arri�ration font r�gresser des peuples entiers, d�j� confront�s � la famine, l�illettrisme, les maladies, etc. La menace d�une pand�mie comme celle de la grippe aviaire (une manipulation qui sert les int�r�ts d�un groupe pharmaceutique) est une manipulation qui veut incruster dans des milliards de t�tes la peur collective en leur rappelant les grands ravages faits par la peste au Moyen-Age. Nous pouvons �galement citer les nouvelles guerres de religion, l�ins�curit� grandissante dans les campagnes et les villes, le retour des bandits des grands chemins et des pirates. Que dire du tribalisme, du maraboutisme et du succ�s des sectes ? Que dire du penchant pour la sorcellerie ? Mais, attention, par-del� les fronti�res, les races et les croyances, une nouvelle vague de protestation est en train de s'organiser. Elle ne repose pas sur une id�ologie claire et ne para�t pas encore assez puissante pour inqui�ter l'ordre �tabli. Prenant de court les analystes et les penseurs, cette vague populaire transnationale est le d�but de quelque chose de plus puissant, de plus pr�cis qui va s'organiser dans les ann�es � venir pour cr�er un front mondial des peuples oppos�s non plus aux Etats, mais aux nouveaux patrons de notre plan�te : les ma�tres du monde, ce groupe de multinationales dont l'app�tit n'a plus de limites et qui veulent supprimer les fronti�res et les protections �rig�es par les petites �conomies nationales� La classe ouvri�re des pays occidentaux, longtemps oppos�e au patronat local, vient de s'apercevoir que ce dernier n'est que le maillon d'une cha�ne dont il faut chercher le bout au sommet des gratte-ciel am�ricains. Et, dans ce combat pour la survie, la classe ouvri�re s'aper�oit aussi qu'elle n'est plus seule : le petit agriculteur, l'artisan, la PMI, etc, sont confront�s aux m�mes ennemis. Il existe aujourd'hui des conditions objectives pour que les classes ouvri�res des nations d�velopp�es et les nouveaux esclaves des pays en voie de d�veloppement s'unissent dans un front commun pour faire reculer les plans des multinationales. Le chemin est long, mais il faut garder espoir car ce syst�me moyen�geux porte les germes de sa propre destruction. Il ne reculera devant rien pour accro�tre ses profits et ne r�alisera m�me pas qu�en �tant un peu plus ouvert sur les r�alit�s sociales, un peu plus �partageux �, un peu moins nocif vis-�-vis de la nature, il pourrait sauver sa peau. Non, il ira n�cessairement � sa perte. Une nouvelle r�volution, dont les contours sont encore flous, est en train de na�tre comme une aube pure dans le ciel crasseux de ce nouveau moyen-�ge. Pr�tez l�oreille aux chants des marcheurs kabyles ! Vous saisissez le sens du combat des enseignants alg�riens ? Vous entendez les clameurs des gosses des banlieues fran�aises et ceux des jeunes anti-CPE ? Vous entendez les cris de col�re des militants n�palais ? Non, ne vous bouchez pas les oreilles, ce sont les balles de la r�sistance irakienne qui met � genoux la premi�re puissance mondiale ! C�est le d�lire de la foule sud-am�ricaine qui f�te les d�faites successives de l�imp�rialisme et les victoires des peuples ! C�est la voix de Castro qui mart�le : �Aucune force ne nous mettra � genoux !� M. F. P. S. : Il ne reste plus que 47 jours avant la fin du long calvaire qui aura dur� deux ann�es ! Deux ann�es que Mohamed Benchicou nous montre comment r�sister � la tentation de baisser la t�te. Deux ann�es qu�il nous dit, au prix des privations et des souffrances physiques, que la victoire appartient aux justes. Deux ann�es qu�il nous r�p�te, du fond de sa cellule, �qu�aucune force ne nous mettra � genoux�.