L'Angleterre, favori assum� pour le titre, et le Portugal, vice-champion d'Europe, s'affrontent dans un rendez-vous charg� de r�f�rences historiques en quarts de finale du Mondial- 2006 de football, aujourd�hui � Gelsenkirchen. Ces deux pays, qui vivent le football comme peu, ont curieusement un pass� assez pauvre en Coupe du monde. L'Angleterre attend une nouvelle cons�cration 40 ans apr�s son unique sacre mondial et n'a depuis atteint les demi-finales qu'en 1990. Le Portugal, 3e d�s sa premi�re apparition en 1966, n'en est qu'� sa quatri�me participation. 1966, une date d'achoppement dans l'histoire du football des deux nations. Le capitaine anglais Bobby Moore allait soulever la Coupe du monde quelques jours apr�s avoir sorti en demi-finale (2-1) le Portugal de l'attaquant d'origine mozambicaine Eusebio. Mais si ce souvenir n'a de valeur qu'aux yeux des nostalgiques, il en est un qui prend tout son sens. Le 24 juin 2004, le Portugal a �limin� en quart de finale de �son� Euro l'Angleterre (2-2 a.p., 6-5 t.a.b.). Comme aux Mondiaux 1990 et 1998, et � l'Euro 1996, les Anglais ont but� sur cette s�ance fatale. Une d�ception qui a d�cha�n� la col�re de certains journalistes et supporteurs anglais envers l'arbitre suisse Urs Meier, coupable d'avoir refus� un but � leurs yeux valable � Sol Campbell. M. Meier a fait l'objet d'une longue campagne de d�nigrement et de menaces de mort. Critiques Dans le camp portugais officiait d�j� comme s�lectionneur le Br�silien Luiz Felipe Scolari, qui avait �galement battu, avec le Br�sil, l'Angleterre en quart de finale du Mondial 2002 (2-1). Si bien que le match de samedi a �t� synth�tis� comme l'opposition entre Sven-Goran Eriksson, le s�lectionneur anglais, et Scolari. Mais le Su�dois refuse de s'avancer sur le th�me de la revanche. �Je n'ai pas le sentiment que c'est Scolari contre moi, dit-il. C'est l'Angleterre contre le Portugal, un quart de finale de Coupe du monde, et c'est important de le gagner. Et je pense que nous pouvons.� Le Portugal et l'Angleterre ont connu des d�buts de Mondiaux contrast�s. Avec les quatre succ�s portugais en autant de matches, Scolari a port� � 11 succ�s cons�cutifs le record de victoires pour un entra�neur en Coupe du monde, apr�s les sept obtenues avec le Br�sil en 2002. Eriksson a, lui, d� faire face � une avalanche de critiques sur le jeu de son �quipe, que m�me le pr�sident de la F�d�ration internationale Sepp Blatter s'est permis de juger trop prudent. Mais le Su�dois s'est born� � affirmer que seul comptait le r�sultat. Inspiration �Nous essayons de jouer un bon football, mais le plus important est de gagner, a-t-il r�p�t�. Vous n'avez pas de bonus en jouant du beau football. Je suis pr�t � tout pour gagner la Coupe du monde. Si �a signifie jouer du mauvais football, allons-y, qui �a g�ne ?� Mais l'Angleterre ne pourra pas se contenter du spectacle pitoyable offert en 8e de finale face � l'Equateur (1-0) pour battre un Portugal m�me fortement diminu� par les suspensions de Deco et Costinha, exclus lors du 8e houleux (16 avertissements, 4 exclusions) face aux Pays- Bas (1-0). Eriksson devrait pourtant reconduire la m�me formation qu'en 8e, en 4-5-1 avec Wayne Rooney en pointe. C�t� portugais, Scolari devra trouver l'inspiration pour combler les absences, et ne fera conna�tre sa d�cision de titulariser ou non Cristiano Ronaldo, touch� � une cuisse, qu'au tout dernier moment. Luis Figo, le capitaine portugais, qui remplacera Deco en meneur de jeu, estime que son �quipe a une �opportunit� historique�. Il livre la cl� d'un match qui pourrait bien se d�cider de la m�me mani�re qu'en 2004 : �Le plus important c'est de rester concentr� 90 minutes, pour ne pas commettre d'erreur�. La Selec�ao redonne confiance � tout un peuple Apr�s la victoire sur les Pays-Bas en 8e de finale (1-0), le Portugal commence � y croire et le pays tout entier se pr�pare au match de samedi contre l'Angleterre en quart de finale du Mondial- 2006 de football. �Le plus dur est fait !�, s'exclame un supporteur de la �selec�ao�. Pour s'en convaincre, les Portugais rappellent la rencontre m�morable contre les Anglais lors de l'Euro 2004 de football, �limin�s en quart de finale apr�s un insoutenable suspens (2-2 a.p., 5-6 t.a.b.). Qualifi�s pour les quarts de finale, les supporteurs de l'�quipe lusitanienne sont enfin sortis dimanche soir dans la rue pour se l�cher et c�l�brer leur qualification. Le s�lectionneur br�silien Luiz Felipe Scolari, qui avait remport� le Mondial avec le Br�sil en 2002, avait promis de mener l'�quipe au minimum jusqu'en 8e de finale. Mission accomplie. D�sormais tous les r�ves sont permis. Le Portugal esp�re faire mieux que pendant l'Euro. Finaliste du championnat d'Europe de football, jamais leur �quipe n'�tait arriv�e aussi haut dans une comp�tition internationale de football. Pour soutenir l'�quipe de Scolari, la presse populaire se mobilise et publie tous les jours des messages de soutien aux joueurs. �Vive le Portugal et la s�lection�, �Jusqu'au bout�, �Faites de votre mieux, nous r�ussirons � passer en demi-finales�, �Soyez �gaux � vous-m�mes. Vous �tes extraordinaires�, peut-on lire dans les pages int�rieures du quotidien 24 Horas. Des mod�les pour la soci�t� Dans un contexte �conomique morose, la fiert� nationale reprend le dessus. Les jours de match, les Portugais partent travailler exhibant �charpes, foulards et maillots de la �selec�ao�. Les plus jeunes apprennent par c�ur l'hymne national. A l'appel de Scolari, le pays tout entier s'est par� des couleurs nationales. Les villes du Portugal arborent des milliers de drapeaux rouges et verts, frapp�s de l'�cusson jaune, aux fen�tres des immeubles, dans les vitrines des magasins ou sur les taxis. La presse ne manque pas de souligner que les succ�s de l'�quipe nationale redonnent �confiance et optimisme� aux Portugais, permettant d'oublier le pessimisme et l'esprit n�gatif typiquement lusitanien�. D'autres voient dans l'attitude des joueurs portugais, salu�s en v�ritables h�ros, un mod�le pour le reste de la soci�t�. Les joueurs �ont montr� comment la d�termination, la volont� et le travail peuvent aider � surmonter les �preuves (...). Cela peut servir d'exemple dans la vie� de tous les jours, souligne cette semaine l'hebdomadaire Sabado dans son �dito. Les supporteurs portugais esp�rent que le stade de Gelsenkirchen leur portera chance samedi, comme en 2004. De nombreux joueurs de l'�quipe du Portugal comme Deco, Maniche, Costinha, Ricardo Carvalho, Ricardo Costa, Nuno Valente et Paulo Ferreira s'y sont sacr�s champions d'Europe contre Monaco (3-0) en 2004, avec un certain Jose Mourinho aux commandes. Ricardo veut refaire le coup de l'Euro-2004 Grand artisan du succ�s du Portugal face � l'Angleterre � l'Euro-2004, le gardien de but Ricardo esp�re refaire le m�me coup contre la �bande � Beckham�, � Gelsenkirchen en quart de finale du Mondial de football, et redevenir l'espace d'une soir�e le h�ros de son pays. Le 24 juin 2004 au stade de la Luz de Lisbonne, le portier avait �coeur� ses adversaires en quart de finale, s'interposant devant la tentative de Darius Vassell avant d'inscrire le tir au but victorieux au terme d'un match � suspense (2-2 a.p., 6-5 t.a.b.). Pour couronner le tout, Ricardo n'avait pas h�sit� � enlever ses gants, humiliant encore un peu plus l'attaquant d'Aston Villa avant de donner le coup de gr�ce aux Anglais. �Ce ne fut pas planifi�, cela a �t� totalement spontan�, avait-il indiqu� au coup de sifflet final une fois la qualification acquise pour les demi-finales. Le lendemain, le joueur �tait f�t� dans tous les m�dias portugais et gagnait un surnom : �Ricardo, c�ur de lion�. Modestie �J'avais d�j� r�ussi la m�me chose avec mon club, le Sporting Portugal, indique-t- il. Nous avions d�cid� avec Scolari (le s�lectionneur) que ce serait mon tour apr�s les cinq premiers tireurs.� �Quand j'�tais adolescent, je jouais les 45 premi�res minutes comme gardien et la seconde p�riode comme attaquant�, se souvient-il pour expliquer ses pr�dispositions balle au pied. Luiz Felipe Scolari avait eu le nez creux en lui confiant la d�fense de la cage portugaise avant l'Euro de pr�f�rence � l'inoxydable Vitor Ba�a, tout juste vainqueur de la Ligue des champions avec Porto. Aujourd'hui, le Br�silien ne regrette nullement son choix. Ricardo, lui, la joue modeste et refuse d'endosser l'habit du sauveur avant ses retrouvailles avec les Anglais : �Cela ne me d�range pas de retirer un penalty m�me si je pr�f�rerais que nous gagnions en prolongation.� La seule chose qui lui importe reste la qualification et si possible pouvoir effacer la d�sillusion de l'Euro-2004 et la d�faite en finale face � la Gr�ce (1-0). Dans ce cas, il ne se contentera pas d'enlever ses gants puisqu'il a d�j� promis un �strip-tease� au cas o� le Portugal devenait pour la premi�re fois de son histoire champion du monde, le 9 juillet � Berlin. La �Rose� appartient � Steven Gerrard Footballeur tout terrain, milieu de terrain, attaquant et au besoin d�fenseur, Steven Gerrard a d�finitivement impos� sa marque sur l'�quipe d'Angleterre qui affronte le Portugal en quarts de finale du Mondial- 2006 de football, aujourd�hui � Gelsenkirchen. Dans le richissime milieu de terrain anglais, le capitaine de Liverpool (depuis octobre 2003) a montr� qu'il �tait bien devenu le joueur cl�, indispensable par sa polyvalence et sa capacit� � �tre d�cisif. Plus que le capitaine David Beckham ou son clone de Chelsea, Frank Lampard, c'est lui qui impulse le jeu anglais. Absent sur blessure du Mondial-2002, d�cevant � l'Euro-2004, Gerrard est depuis le d�but du tournoi l'un des rares Anglais en accord avec sa r�putation. Outre l'activit� d�ploy�e, il a marqu� les esprits en inscrivant deux des six buts anglais. D'abord align� en milieu d�fensif le plus recul� dans le 4-4-2 utilis� lors des deux premiers matches face au Paraguay (1-0) et � Trinit�-et-Tobago (2-0), le pur produit de l'�cole de football de Liverpool, qu'il a rejoint � l'�ge de huit ans, est ensuite mont� de plusieurs crans pour se muer en attaquant de soutien. Collaboration Apr�s la blessure de Michael Owen face � la Su�de (2-2), il est venu �pauler Peter Crouch, puis Wayne Rooney, face � l'Equateur (1-0) dans un syst�me cette fois en 4-5-1. �Ca ressemble au r�le que je tiens � Liverpool, explique-t-il. Alors si l'entra�neur choisit un 4-5-1, �a me convient.� Milieu d�fensif de formation, mais joueur complet, � la fois r�cup�rateur, relayeur, passeur et buteur, il semble n'�prouver aucune peine � ainsi compl�ter Rooney. �Ce n'est pas difficile car ses mouvements sont tr�s bons, dit-il. Tout le monde parle d'un 4-5-1, mais �a peut devenir un 4-3- 3 s'il le faut, avec plus d'options sur les c�t�s. J'aime beaucoup ce syst�me.� �C'est un danger de trop parler de syst�mes, relativise- t-il tout de m�me. Il ne faut pas �tre distrait par �a. Il faut seulement rester flexible, que les joueurs puissent changer de postes et causer des probl�mes dans plusieurs endroits du terrain.� Leader naturel, Gerrard, 26 ans, a pris pour de bon le pas sur Lampard, qui n'arrive pas � reproduire en s�lection ce qu'il d�montre sous le maillot de Chelsea. M�me si l'un et l'autre continuent � parfaire leur collaboration. �Ca fait un long moment que nous nous parlons, que nous essayons de nous am�liorer chaque fois que nous travaillons ensemble�, remarque-t-il.