En appelant les Alg�riens � prendre s�rieusement conscience de la grande vuln�rabilit� qui caract�rise notre �conomie d�pendante totalement des hydrocarbures, le pr�sident Bouteflika remet � l�ordre du jour les grands d�bats qui ont parcouru les th�ories du d�veloppement puisqu�il invite � r�fl�chir sur ce que pourrait �tre une �conomie alg�rienne de l�apr�s-p�trole. Aujourd�hui, � l��re de la mondialisation lib�rale, seule l�Asie arrive � sortir �son �pingle du jeu� et ni l�Am�rique latine (� l�exception peut-�tre du Br�sil) ni encore moins l�Afrique ne peuvent pr�senter de �success story� dans ce domaine. Nous savons que la th�orie du d�veloppement �conomique a �t� marqu�e dans les ann�es 1950 par les travaux de l��cole latinoam�ricaine dus � la Cepal anim�e par les �conomistes Raoul Prebish, Celso Furtado ou encore R. Cardoso pour ne citer que ceux-l�. Le mod�le d�industrialisation en vogue alors �tait celui de l�industrialisation par substitution d�importation (ISI) qui recommandait de lancer le processus de d�veloppement �conomique par des investissements productifs orient�s dans une premi�re phase sur le sous-secteur pour lequel une demande int�rieure existe c�est-�-dire celui des biens de consommation jusque-l� satisfaite par le recours aux importations. L�investissement industriel devait donc �tre orient� dans une premi�re phase vers ce sous-secteur. Dans une seconde phase et parce que ce sous-secteur (I) en expansion cr�e une demande notamment en biens d��quipements, il faut pr�parer la mise en place de ce sous-secteur des biens d��quipement par le d�veloppement du sous-secteur des biens interm�diaires et demi-produits. La seconde phase du mod�le d�ISI devait donc consister � construire le sous-secteur des biens interm�diaires (II). Dans une troisi�me phase on devait mettre en place le sous-secteur des biens capitaux (III) pour lequel une demande, �manant des investisseurs de plus en plus nombreux, se d�veloppe. Ainsi de phase en phase on industrialise le pays en prenant le maximum de pr�caution et en brisant par �tapes, la d�pendance �conomique qui caract�rise au d�part les pays du Sud. On sait que ce mod�le d�ISI qui n�cessitait une intervention massive de l�Etat a d�bouch� sur une explosion de la dette publique interne mais surtout ext�rieure. Ce mod�le s�est av�r� financi�rement co�teux, socialement in�galitaire et a rat� son objectif central : la r�duction de la d�pendance ext�rieure. Face � ces �checs se mettait en place un autre mod�le de d�veloppement, le mod�le de d�veloppement �autocentr� inspir� des travaux des �conomistes indien Mahalanobis et sovi�tique Feldman (le mod�le Feldman- Mahalanobis) dans lequel la solution au sous-d�veloppement �conomique �tait d�adopter une politique �conomique fond�e sur le march� int�rieur, orient�e sur l�industrie lourde avec une s�rie d�investissements de l�Etat dans les branches des biens interm�diaires, sid�rurgie, mat�riaux de construction, chimie et la mise en place simultan�ment du secteur des biens capitaux notamment m�canique, ce qui permettrait de �noircir la matrice interindustrielle� c�est-�-dire de doter le pays d�une base industrielle coh�rente et puissante orient�e sur les besoins internes qui ouvrirait des perspectives s�rieuses de d�veloppement �conomique autonome et national. Ce mod�le est �videmment financi�rement lourd et exige que l�Etat, principal investisseur, dispose de ressources financi�res importantes. L�exp�rience alg�rienne qui �semait� ainsi �son p�trole� est celle qui est all�e le plus loin dans ce mod�le sans cependant pouvoir achever sa mise en place puisque la mort de Boumedi�ne, a entra�n� une r�orientation de la politique �conomique. On peut tout de m�me souligner qu�une telle politique �conomique �tait fond�e sur la d�pense publique, fonctionnait dans un syst�me hyper-prot�g�, compl�tement ferm� et d�pendant des ressources financi�res d�gag�es par le secteur des hydrocarbures. Boumedi�ne pr�parait ainsi, � sa fa�on, l��conomie alg�rienne � l�apr�s-p�trole. Les r�sultats ont �t� d�cevants : plate-formes industrielles lourdes et rapidement d�pass�es au plan technologique, produits non comp�titifs et donc non exportables, d�ficits financiers abyssaux des entreprises d�Etat. Dans les faits, les exp�riences de d�veloppement �conomique qui ont le mieux r�ussi dans le tiers-monde et qui, aujourd�hui constituent de v�ritables moteurs de la croissance �conomique mondiale, sont celles des pays asiatiques. Les progr�s �conomiques et sociaux r�alis�s dans les pays de l�Asie du Sud-Est en 40 ans sont consid�rables. Le Japon est aujourd�hui la seconde puissance mondiale, la Cor�e du Sud, Ta�wan, Hong Kong et Singapour ont connu trente ans durant des taux de croissance annuels moyens de +8% ; Malaisie, Tha�lande et Indon�sie ont affich� de 1960 � 1996 des taux de croissance annuels de +7% et ont divis� par 5 le nombre de pauvres vivant avec un dollar par jour ; la Chine et le Vietnam sont aujourd�hui des exemples r�ussis de transition � l��conomie de march�, l�Inde enfin est en pleine expansion. Il y aurait donc une �cl�, un �mod�le� asiatique de d�veloppement �conomique ? Quelles en seraient les caract�ristiques ? On a cru en d�nombrer sept (07) qu�on retrouve dans toutes ces exp�riences. 1. Des politiques �conomiques tourn�es vers les exportations et non vers le march� int�rieur. Celui se d�veloppant au rythme du d�veloppement des revenus tir�s des exportations. 2. Un interventionnisme �tatique important y compris dans l�investissement et non pas le lib�ralisme et l�appui sur le seul secteur priv�. 3. Un contr�le des importations et un appui aux exportations et non pas le libre-�change. 4. Un contr�le des investissements �trangers (qu�on autorisait) et des march�s financiers et non pas une totale ouverture et la libert� des mouvements de capitaux. 5. Des secteurs de l��ducation, de la formation et de la sant� plac�s comme des priorit�s dans les programmes des gouvernements. 6. Une utilisation judicieuse de l�aide publique internationale au d�veloppement accord�e par le Japon, les USA (Cor�e du Sud) la Banque asiatique du d�veloppement. Cette aide a �t� utilis�e prioritairement dans la r�alisation d�infrastructures de base. 7. Une coop�ration r�gionale renforc�e D�autre part, le succ�s �conomique asiatique a repos� sur la r�alisation de deux conditions importantes. � Des r�gimes politiques forts et stables � Une administration comp�tente et une technostructure. Ce succ�s �conomique asiatique, sans constituer un mobile transf�rable � tous les pays du Sud, relance le d�bat sur le d�veloppement �conomique sous un nouveau jour. Pour notre pays, et au moment o� la priorit� semble �tre � la pr�paration s�rieuse de notre �conomie � l�apr�s-p�trole, il y a, dans les exp�riences �conomiques asiatiques, beaucoup � apprendre et � prendre.