En 2006 et 2007, les agriculteurs marocains ont extrait l�huile... d�olives import�es. Raison : actuellement, rares sont les paysans marocains qui s�adonnent � la culture des fruits et l�gumes ou qui croient, encore, aux bienfaits des labours et semailles. Le rural, notamment riffain, d�sesp�re, totalement, de faire sortir, comme nagu�re, des tr�sors des entrailles de la terre. Aujourd�hui, tout a chang�. De glissement en glissement, encourag� par le Makhzen, ce dernier soutenu, fortement, par de puissants lobbies europ�ens, le rugueux et conservateur paysan marocain a totalement abdiqu� devant la puissance et l�attrait du haschisch. Tel un rouleau compresseur, la culture du cannabis a compl�tement cass� les ressorts de la campagne marocaine, le Rif en a transform�, radicalement, le visage. Rien n�est plus comme avant, ni les rapports humains, ni les relations sociales, ni les habitudes de consommation. Le haschisch, l�or vert du Maroc, a tout boulevers�. Sous de fortes pressions europ�ennes et aussi, relevons-le, gr�ce � des associations marocaines hardies et t�m�raires qui ont su profiter de l�ouverture d�mocratique dans le pays, le Palais royal a consenti � accepter une campagne contre la drogue. Au d�but, celle-ci a tenu ses promesses. Plusieurs barons du haschisch ont �t� soit arr�t�s, soit d�stabilis�s, pour certains mis hors d��tat de nuire. Dans le sillage de cette tapageuse et m�diatis�e politique contre la culture du haschisch, la drogue ne pousse plus, comme dans les ann�es 1970, 1980 et 1990 en bordure des routes. Comme � K�tama, Nador, Huce�na et dans une grande partie des bourgades, hameaux ou villages du nord du Maroc, proche du grand voisin de l�Est, l�Alg�rie. Si tout le monde sait, pr�sentement et parfaitement, que Hassan II avait, volontairement et logiquement encourag� la prolif�ration du haschisch dans le Rif, rares sont ceux, dans ce pays, qui osent le proclamer ouvertement. Pour, selon eux, ne pas ouvrir l�un des dossiers les plus accablants du Makhzen. Il faut savoir, en effet, que d�s la fin des ann�es 1960 � ce qui n�avait, alors, absolument rien � voir avec la question du Sahara occidental � Hassan II a voulu se pr�munir de deux dangers, selon lui, �ternels. L�esprit rebelle du Rif, r�fractaire au centralisme destructeur et avilissant de la monarchie de droit divin telle que con�ue et mise en musique par Mohammed V et Hassan II et l�effet contagion que l�Alg�rie produira, selon eux, et pour longtemps sur le Maroc. De ces deux postulats, le Makhzen aboutira � la validation de �plan cannabis�. La culture du �hasch� � des cadences industrielles pouvait avoir ceci d�int�ressant, pour les apprentis sorciers du Palais royal, de permettre au Rif de faire affaire et de ne plus demander son reste et, surtout, de �miner� le voisin de l�Est. Qui dit haschisch, en effet, dit corruption, endormissement de la jeunesse, trafic frontalier et �grosses fortunes�. En plus, bien �videmment, des rentr�es financi�res, sonnantes et tr�buchantes, plus tr�buchantes et sonnantes en l�occurrence, que constitue la blanchiment de l�argent de la drogue. A ce niveau, Hassan II n�avait aucun souci � avoir : ses puissants relais en Europe, notamment en France, transformaient, en un claquement des doigts, l�argent de la drogue en comptes bancaires �pais dans des banques s�res (Suisse, Monaco, Andorre, Luxembourg ou m�me, pourquoi pas, dans d�autres fortes et respectables places boursi�res). Certes, aujourd�hui, beaucoup de champs de cannabis ont �t� d�truits, aussi � K�tama, cependant, des repr�sentants de la soci�t� civile alertent, d�j�, sur un imminent retour de manivelle. Ainsi, l�homme d�affaires Mohamed Bouhcini, qui avait �parl� � la presse des �barons du haschisch� a �t�, quelque temps apr�s, arr�t� et a r�pondu devant le tribunal de motifs farfelus de �fausses d�clarations�. Une partie de la presse marocaine relate, �pisodiquement, comment le �circuit� fonctionne. Des pots-de-vin vers�s par les �laboureurs de cannabis� jusqu�� la somme re�ue par certains gouverneurs en passant par �les yeux ferm�s� de toute la cha�ne �tatique et les �prises d�int�r�ts� des interm�diaires, tout implique le haut de la pyramide. Et le haut de la pyramide est, ne peut �tre que le Palais royal. Les tentatives de vouloir lutter contre la culture du cannabis en pr�servant le syst�me seront vou�es � l��chec. D�ailleurs, le Riffain, aussi rus�, aujourd�hui, que son grand-p�re, �tait, rebelle, hier, a compris. Il sait, parfaitement que d�s la �campagne� (antidrogue, ndlr) termin�e tout redeviendra normal. Et la culture du haschisch reprendra de plus belle. Aussi florissante et aussi n�faste pour l�Alg�rie qu�elle ne l��tait dans un pass� r�cent. M�me le gouverneur de Chefchouan, localit� proche de K�tama, ne croit pas au s�rieux des mesures prises, lui qui continue de faire semblant de lutter contre la culture du cannabis tout en acceptant les �ristournes� que lui consentent, r�guli�rement, les �barons�. Un �ponte� du hasch et du r�gime, Mohamed Kharraz, a bien �t� mis sous les verrous. Mais, selon toute vraisemblance, son arrestation est plus due au fait qu�il a cach� des b�n�fices per�us � ses sup�rieurs hi�rarchiques qu�� une autre quelconque raison. Idem pour le chef de la police de Tanger, Abdelaziz Izzou, qui a �t� terrass� pour avoir �t� pay� doublement. Pour le r�am�nagement du commissariat de police de la ville, cet officier de police a soigneusement omis de signaler � sa �chefferie� 270 000 euros que les patrons du haschisch lui ont vers�s pour son silence, pendant une d�cennie concernant de grosses exportations vers l�Europe de quantit�s de cannabis. Pour corser le tout, le Rif marocain offre, aujourd�hui, une affligeante image de d�solation : fronti�res avec l�Alg�rie ferm�es, vergers en jach�re en attendant que le Makhzen l�ve le pied sur l�interdiction de cultiver le haschisch et mont�e en fl�che de l�islamisme. N�anmoins, � Rabat, on pr�f�re, toujours la fuite en avant et la surench�re sur le dossier du Sahara occidental. A. M.