Alger avait sa rue Michelet et Oran sa rue d�Arzew, Tlemcen avait sa rue de France et surtout sa formidable esplanade appel�e autrefois la place d�Alger qui, avec la place de la mairie, constituaient le c�ur de la ville. Cet espace vital commen�ait � partir du palais du Mechouar jusqu�aux alentours de la Grande Mosqu�e. La ville de Tlemcen commen�ait alors � voir le jour � partir de 1846. Les premiers platanes furent plant�s et quelques ann�es plus tard, l�esplanade tlemc�nienne n�avait rien � envier � celle de Montpellier. Aujourd�hui, en consultant les archives du Vieux Tlemcen, on ne peut qu�exprimer une grande frustration et une col�re face � l�actuel �tat des lieux. Les moins de 30 ans sont loin d�imaginer ce que fut l�actuel place Emir-Abdelkader. Les formidables terrasses du Gambrinus et les parasols couleurs d��t� qui servaient de refuge aux touristes et aux simples passants, ce lieu �tait un passage oblig�. Les temps ont chang�, le kiosque � musique, un v�ritable bijou architectural, a disparu. C��tait l� o� les chanteurs de l��poque se donnaient libre voix pour enchanter touristes et passants. C��tait l� aussi o� les messalistes livraient leurs discours anticolonialistes. On savait depuis un certain temps que la centaine de platanes datant de la fin du XIXe si�cle �tait en danger. En cet �t� 2008, les premiers signes de d�p�rissement sont visibles aussi bien sur les troncs que sur les feuilles qui jaunissent en plein �t�. Mais qu�arrive-t-il � ces vieux platanes qui faisaient le charme de Tlemcen et faisaient r�ver Louis Abadie. La place Emir-Abdelkader offre un triste visage avec un sol poussi�reux et sale. Il n�y a pas l�ombre d�un espace vert et pour mieux porter l�estocade, on a �rig� des kiosques qui ressemblent � des gu�rites pour sentinelle, alors les anciens kiosques r�pondaient parfaitement aux normes architecturales de Tlemcen. Nous n�allons pas nous attarder sur les erreurs du pass�, mais que font les �lus actuels ? Et pourtant, ce n�est pas l�argent qui manque ; il n�y a eu aucun projet pour la r�novation de la place d�Alger et de la place de la mairie et l� on pourrait � notre tour poser la question � Monsieur le ministre de l�Int�rieur : pourquoi irons-nous voter ? A quoi sert une assembl�e �lue ? Ne faut-il pas tout r�former ? A commencer par ces partis politiques qui nous proposent des candidats frelat�s � chaque �ch�ance �lectorale. Qui payera la lourde facture de l�incomp�tence, c�est bien s�r ce contribuable qu�on bl�me parce qu�il a choisi l�abstention, la seule mani�re de ne pas se rendre complice du d�p�rissement de la cit�. La place d�Alger fait l�objet aujourd�hui de nombreux comm�rages, m�me ceux qui manifestaient une certaine indiff�rence � l�environnement, commencent � s�inqui�ter. Il y a lieu d�examiner en urgence cette situation pour sauver ce qui peut l��tre. Le centre de la capitale des Zianides doit refl�ter toute la beaut�, l�art et la culture de Tlemcen, seul un sursaut de la part des citoyens peut changer la donne, mais il faut surtout imposer une nouvelle r�gle de jeux : en commen�ant par demander des comptes aux �lus � la fin de leur mandat, ce sera une attitude citoyenne et responsable. De l�autre c�t� de la ville, s�il vous arrive de vous recueillir sur la tombe de l�un de vos proches au cimeti�re de Sid-Ahmed Senouci, vous remarquerez que des peupliers centenaires meurent et sont arrach�s. C�est la d�solation. Alors, en quittant le cimeti�re, faites au moins deux pri�res, l�une pour vos morts et l�autre pour la survie des peupliers. Il y a plus de 30 ans, � l�occasion de la mort de Messali, le journal fran�ais le Figaro titrait � la une �Messali sera enterr� sur les peupliers de Tlemcen�. C�est dire combien cet arbre � lui seul �tait le symbole de toute une cit�. Au lendemain de l�ind�pendance, Louis Abadie rapporte dans son recueil Tlemcen au pass� rapproch� une citation de Cardinal Coffy : �Si les hommes veulent garder le souvenir de leur pass� et faire m�moire des �v�nements qui ont tout particuli�rement marqu� leur histoire, c�est pour ne pas perdre leur identit� devant les bouleversements qui les affectent.�