Les pays du Golfe, Arabie saoudite en t�te, sont inquiets. Instruits par la d�sastreuse guerre men�e par l�administration Bush en Irak, ils redoutent que la tension entre les Etats-Unis et l�Iran ne d�bouche sur un conflit arm�. Par notre envoy� sp�cial au Qatar, Hassane Zerrouky Aussi l�ont-ils fait savoir au pr�sident am�ricain lors de sa r�cente tourn�e dans les pays du Golfe, comme ils l�ont fait savoir au pr�sident fran�ais, Nicolas Sarkozy, qui effectuait presqu�au m�me moment une visite en Arabie, au Qatar et dans les Emirats arabes unis. Ces pays ne veulent pas d�une guerre am�ricaine contre l�Iran. George Bush n�a pas r�ussi � convaincre son alli� saoudien dans son entreprise d�isolement de T�h�ran. Pas plus qu�il n�a r�ussi aupr�s des autres monarchies du Golfe. Il faut savoir que des pays comme les Emirats, qui abritent tout de m�me des bases a�riennes am�ricaines, le Qatar o� se trouve le quartier g�n�ral du Centcom Commandement am�ricain), ainsi qu�Oman o� mouille la Ve flotte am�ricaine, sont � port�e de canon des Iraniens. Qui plus est, en d�pit du contentieux entre les Emirats et l�Iran au sujet des �les d�Abou Moussa, de la Grande et de la Petite Tunb occup�es par les forces iraniennes depuis 1971 (� l��poque du shah), �les o� se trouvent d�importants gisements gaziers, T�h�ran est le premier partenaire commercial et financier des Emirats. Fin 2006, les avoirs des Iraniens se chiffraient � 300 milliards de dollars d�tenus par quelque 400 000 Iraniens dont un nombre important vit et s�est �tabli � Duba� dans les Emirats. Quelque 7 000 soci�t�s iraniennes disposent d�un bureau � Duba�. Les hommes d�affaires iraniens sont �galement tr�s actifs sur les deux Bourses �miraties, l�Abu Dhabi Securities Market (ADSM) et le Dubai Financial Market (DFM). Entre 1979 et 2004, les Iraniens ont investi pr�s de 200 milliards de dollars dans ce riche Etat du Golfe. Qui plus est, dans ce pays de 5 millions d�habitants dont 80% sont des �trangers, la communaut� iranienne � hommes d�affaires, commer�ants, salari�s et autres � est plus nombreuse que les Emiratis eux-m�mes ! Et avec le Qatar, l�Iran partage l�un des plus grands champs gaziers du monde, le South Pars. Autrement dit, entre l�Iran et les pays du Golfe, il existe une r�elle interd�pendance �conomique. Mieux, encourag�s par les conclusions du rapport de 16 agences de renseignement am�ricain dont la CIA, sp�cifiant que l�Iran a arr�t� son programme d�armes nucl�aires d�s 2003, les pays du Conseil de coop�ration du Golfe (Arabie saoudite, Kowe�t, Qatar, Emirats, Oman et Bahrein) ont invit� le pr�sident Ahmadinejad � leur r�union en d�cembre dernier. Une invitation qui confirme le rapprochement entre T�h�ran et ses voisins de cette r�gion. Un rapprochement qui embarrasse plus que jamais la Maison Blanche. C�est sans doute ce qui a incit� Nicolas Sarkozy � ne pas trop coller aux bottes de Bush, comme il avait l�intention de le faire, lors de sa tourn�e dans cette r�gion, en affirmant sa pr�f�rence pour une issue diplomatique de la crise du nucl�aire iranien. Ayant �t� en premi�re ligne lors de la premi�re guerre contre l�Irak en 1991, et ayant servi de bases op�rationnelles pour l�arm�e am�ricaine lors de l�invasion de l�Irak en 2003, les pays du Golfe ne veulent pas �tre entra�n�s dans une nouvelle guerre. A cela, plusieurs raisons. Engag�s dans une politique de d�sendettement et d�assainissement ainsi que dans une politique de diversification devant leur permettre de pr�parer l�apr�s-p�trole, les pays du Golfe tiennent par dessus tout � un apaisement des tensions entre Washington et T�h�ran. Riyadh, par exemple, a pr�vu 500 milliards de dollars d�investissements d�ici 2024 afin de favoriser l��mergence d�une �conomie cr�atrice d�emplois. Les Emirats envisagent de consacrer pr�s de 200 milliards de dollars d�ici 2030. Ce pays est, selon le World Economic Forum, le plus avanc� en mati�re de diversification puisque la part du secteur des hydrocarbures dans le PIB n�est plus que de 35% en 2007 contre 70% durant les ann�es 1980. Duba�, par exemple, est devenu l�une des plus importantes plateformes portuaires du monde. Quant au Qatar, premier producteur de gaz au monde, il a d�cid� de consacrer 130 milliards de dollars pour des projets d�infrastructures. En outre, ces pays disposent de fonds souverains, sortes de fonds d�Etat, pour faire fructifier leurs �normes avoirs dop�s par les revenus p�troliers et gaziers et les faire durer, et ce, en prenant des prises de participation boursi�res ou sur les march�s financiers internationaux, en injectant des capitaux pour renflouer des banques occidentales en difficult�, en investissant dans l�immobilier. La question est de savoir dans quelle mesure cette politique de placements de capitaux sur des march�s � risque est � m�me de b�n�ficier sur le long terme aux fonds souverains arabes ! Une chose est s�re, on sait que ces capitaux inject�s aux Etats-Unis ou en France participent directement � la formation des PIB respectifs de ces derniers et non au PIB des pays du Golfe. Ils concourent � maintenir la comp�titivit� des entreprises occidentales toujours � la recherche d�argent frais pour financer leur d�veloppement, sans pour autant qu�ils soient en mesure d�en prendre le contr�le. Quant aux revenus qu�ils en tirent, faute d��tre r�investis dans des secteurs productifs cr�ateurs d�emplois, et surtout du fait de l��troitesse des march�s des pays du Golfe (except� peut-�tre l�Arabie saoudite) qui ne sont pas en mesure d�absorber de gros capitaux, ils risquent d��tre de nouveau r�investis sur le march� financier. Telle est la loi du profit.