Longtemps consid�r�e comme une pr�occupation personnelle au niveau local et m�me national, tant, durant plus de 5 ans, des centaines de citoyens r�clamant l�gitimement la restitution de leurs armes aupr�s des autorit�s, le faisaient en solo et dans l�indiff�rence totale des �lus de la wilaya et des d�put�s, cette question vient enfin d��tre prise en charge par un des d�put�s de la wilaya de Bouira, dans la nouvelle Assembl�e nationale. Un d�put� qui a fait le serment lors de la campagne �lectorale des l�gislatives de mai dernier de faire tout son possible pour r�gler cette affaire. Chose faite, puisque M. Ali Brahimi, d�put� RCD, membre du conseil national du parti, vient de soulever ce probl�me au niveau de l�APN en posant une question orale des plus pertinentes au ministre d�Etat, ministre de l�Int�rieur, M. Noureddine Yazid Zerhouni. Dans cet entretien, M. Ali Brahimi nous donne des �claircissements sur cette question et la lecture faite des r�ponses donn�es par M. Zerhouni. Le Soir d�Alg�rie : M. Ali Brahimi, � travers une question orale au ministre de l�Int�rieur, vous vous �tes fait r�cemment le h�raut d�une cause tr�s populaire dans la wilaya de Bouira : la restitution des fusils de chasse confisqu�s par les autorit�s dans les ann�es 1990 aux citoyens. Ali Brahimi : Je suis �galement concern� puisque mon fusil m�a �t� pris aussi. Mais mon interpellation du gouvernement � travers M. le ministre de l�Int�rieur est d�abord la concr�tisation d�un engagement �lectoral personnel aupr�s des milliers de citoyens concern�s. Avec 9 000 armes confisqu�es, Bouira est la wilaya la plus massivement touch�e par cette mesure mais c�est surtout une des dix wilayas dans lesquelles la r�trocession des fusils aux services de l�Etat a rev�tu un caract�re obligatoire qui en a fait une mesure de saisie non d�guis�e. Pr�s de quinze ans apr�s, pouvez-vous rappeler le sens de cette d�marche des autorit�s ? Officiellement et comme vient de le rappeler M. Zerhouni, la confiscation visait � couper ou tarir une source d�approvisionnement potentielle pour les terroristes qui avaient r�ussi � soustraire un certain nombre d�armes de chasse � leurs propri�taires. Mais l� o� le b�t blesse, c�est le caract�re obligatoire de la remise des fusils que cette mesure avait dans 10 wilayas (dont Bouira), consid�r�es � l��poque comme les plus infest�es au plan s�curitaire. Hors de ces wilayas, comme � Tizi-Ouzou, cette mesure, qui �tait strictement volontaire, signifiait un stockage s�curis� des fusils aupr�s des services de l�Etat. Il y avait des citoyens qui les avaient remis aux autorit�s et d�autres qui les avaient gard�s en signant parfois � pas toujours � un engagement � ne pas les livrer aux terroristes sans aucune obligation de faire partie des GLD comme le sous-entend le ministre de l�Int�rieur pour embrouiller les cartes. L�argument des zones les plus infest�es avait d�j�, au d�part, �t� rapidement d�menti, l�ins�curit� ayant fini par gagner toutes les wilayas. Aujourd�hui, il est fallacieux, au regard de ce qui se passe dans certaines wilayas tr�s �prouv�es par le regain de l�ins�curit� (et non concern�es par la saisie des fusils des ann�es 90 ) sans que l�Etat ne songe � y r��diter une d�marche aussi hasardeuse. Pourquoi hasardeuse, puisqu�elle a tari une source d�armement des groupes arm�s ? Rien de plus faux. Cette mesure a surtout livr� des populations enti�res, notamment rurales, � l�ins�curit�. Dans les ann�es 1990 o� elle a �t� impos�e, cette d�marche avait grandement facilit� la libert� de mouvement et la propagation du terrorisme. Significative � l��poque des atermoiements des dirigeants de l�Etat � assumer pleinement les cons�quences de la situation, elle a surtout forc� des dizaines de milliers de paysans � quitter le travail de leurs terres pour aller s�entasser chez les proches en ville ou �riger des bidonvilles. Que vous a exactement r�pondu le ministre de l�Int�rieur ? Au plan strictement juridique, M. Zerhouni reconna�t que les fusils confisqu�s restent des propri�t�s des citoyens victimes de leur saisie. C�est important car cela est d�clar� pour la premi�re fois publiquement et au nom du gouvernement et de l�Etat devant l�instance parlementaire. M. le ministre a m�me dit, mais en pr�cisant que c�est son avis personnel, que tout droit confisqu� au nom de l�Etat doit �tre restitu� � son propri�taire l�gitime. En tant que repr�sentant de l�Etat, il a inform� l�opinion publique que le gouvernement n�a pas encore tranch� entre restitution ou indemnisation des victimes. (Au fait, si indemnisation il y a, est-ce que les concern�s seront autoris�s � acqu�rir de nouvelles armes de chasse ?) M. Zerhouni s�interpose ensuite en tant que premier policier du pays pour arguer que le niveau de l�ins�curit� est encore trop �lev� pour permettre la restitution des fusils sans risque de favoriser le r�approvisionnement des maquis. Que pensez-vous de ces r�ponses ? Vous ont-elles satisfait ? J�enregistre le fait positif que l�Etat ne renie pas nos droits de propri�t� sur nos fusils de chasse. Je note �galement que M. le ministre d�Etat avoue un niveau d�ins�curit� �lev�, chose qu�il confirme encore lorsqu�il dit � ma coll�gue Hadj Arab que l�Etat doublera, dans les prochaines ann�es, les effectifs de la police et de la gendarmerie. Si cela n�est pas dit seulement pour justifier l�arbitraire de la saisie des fusils de chasse, c�est l� un d�menti cinglant � la th�se de la s�curit� r�tablie et de la paix revenue au pays des merveilles. L�argument qui semble par ailleurs r�el, de l�ins�curit� relativement �lev�e, vous para�t-il pertinent pour justifier la non-restitution des armes de chasse ? Il n�est pas pertinent m�me pour ceux qui consid�rent que la s�curit� est loin d��tre revenue. Le fusil de chasse n�est pas un bien comme les autres et peut ne pas servir � la seule chasse. Faut-il rappeler qu�il peut servir de moyen d�autod�fense ? L�argutie sous-entendue de se constituer en GLD pour avoir un fusil ne tient pas la route car tout le monde sait que loin de monter de nouveaux GLD, l�Etat a d�sarm� des patriotes qu�il a abandonn�s � leur sort. Par ailleurs, m�me les propri�taires saisis qui s��taient, lorsque cela se faisait encore, constitu�s en GLD, n�ont pas repris possession de leurs propres armes mais en ont re�u d�autres. Ensuite, dans la totalit� des wilayas o� les citoyens ont eu la facult� de garder leurs armes de chasse, cet avantage n�a pas �t� conditionn� par l�adh�sion � un GLD. Si le risque de r�approvisionner les maquis en armes est le vrai motif du refus des autorit�s de restituer les fusils de chasse � leurs propri�taires l�gitimes, les nouvelles formes vers lesquelles a mut� le terrorisme donnent encore moins de cr�dit � cette affirmation. Et puis, pourquoi alors l�Etat ne g�n�ralise- t-il pas � l��chelle nationale la mesure de saisie des armes de chasse ? A moins de consid�rer que les 10 wilayas concern�es par la saisie obligatoire des ann�es 1990 ne soient, m�me en 2008, demeur�es des (ou les seules) fiefs de l�ins�curit�, ce que toutes les apparences infirment. Si cet argument �tait v�ridique, les pouvoirs publics ne restitueraient pas � certains citoyens bien introduits leurs armes de chasse. M. le ministre m�a m�me, en apart�, �voqu� le caract�re �cas par cas� que rev�t la situation. Cela sous-entend que l�Etat ne restitue pas � ceux dont il se m�fie et j�en suis !? Quelles preuves concr�tes de d�loyaut� patriotique �tayent cette m�thode du cas par cas qui exclut des dizaines de milliers d�ayants droit tout en jetant sur eux la suspicion ? Mais alors il y aurait donc encore des milliers de terroristes potentiels dans le pays ? Ce n�est pas s�rieux, je pr�f�re souligner que cela constitue surtout une violation massive du principe de pr�somption d�innocence. Enfin, si cet argument �tait valable, la vente et l�achat de fusils de chasse et de munitions n�auraient pas �t� r�autoris�e dans le pays. Mais alors quel est le vrai motif du refus de restitution de vos armes de chasse ? Je ne suis pas loin de croire ceux qui disent que les pouvoirs publics ont trahi le d�p�t qu�avaient l�galement impos� et qu�ils ont donc dispos� de ces armes. Dans ma question � M. Zerhouni, je lui ai express�ment demand� si nos fusils existaient toujours, physiquement s�entend, et s�ils sont dans les magasins de l�Etat. Je ne me souviens pas d�avoir entendu une seule fois M. le ministre d�Etat rassurer l�opinion sur ce plan car, si quelques restitutions au cas par cas ont eu lieu, qu�est-ce qui emp�che une restitution g�n�rale ? A moins que l�objet � restituer n�existe plus. Un dernier mot ? Chez tous les citoyens saisis, l�exigence de restitution des fusils de chasse saisis ne cesse de s�amplifier et se propager. Un coll�gue d�put� de Laghouat vient de d�poser une question �crite sur le m�me sujet. Des citoyens de plusieurs wilayas nous ont appel�s pour exprimer leur gratitude mais aussi leur d�termination � r�cup�rer leur bien. Cette affaire est s�rieuse. Elle doit beaucoup � l�incomp�tence et � la pr�cipitation dans laquelle a �t� g�r�e la situation s�curitaire des ann�es 1990. Cette injustice est r�voltante. Ma question orale faisait suite � plusieurs d�marches des repr�sentants des victimes de cette saisie aupr�s de plusieurs hautes instances politiques et militaires du pays. En vain. Je crois qu�il ne reste plus qu�� solliciter l�autorit� de Son Excellence, M. le Pr�sident de la R�publique, dans l�espoir de le voir ordonner le r�tablissement des citoyens dans leurs droits les plus sacr�s.