Les r�sultats enregistr�s par la machine �conomique sont des plus d�cevants, mais le plus inqui�tant reste l��tat de d�labrement de secteurs vitaux qui risque de mettre en p�ril toute perspective de redressement futur. Nous parlons ici de l��ducation nationale, du d�sencadrement de l�administration publique (y compris la haute administration), de l��tat de la recherche scientifique, de l�am�nagement du territoire, de l�urbanisme et de l�environnement. De fait, et m�me si la plupart de nos universitaires, hommes politiques et m�me parents d��l�ves h�sitent � en parler, tant la charge id�ologique qui p�se sur le syst�me �ducatif est pesante, cela n�emp�che aucun Alg�rien de d�plorer le niveau de nos lyc�ens, �coliers et �tudiants. Les efforts d�ploy�s par les parents pour l�envoi de leurs enfants dans les universit�s �trang�res et le succ�s obtenu par l��cole priv�e, malgr� les co�ts �lev�s et les sacrifices consentis par les familles, signe, si besoin �tait, le discr�dit d�une �cole publique devenue au fil des ann�es le refuge d�apprentis id�ologues de tous crins. Dit de mani�re courte, l��cole publique, cens�e permettre au plus grand nombre l�acc�s au savoir, est r�duite � n��tre que le r�ceptacle de ceux qui ne disposent d�aucun autre recours. Angoissante question que celle de savoir avec quelles comp�tences on pourra encadrer l��conomie, l�administration, les services de s�curit� et les diff�rents d�membrements de l�Etat. Au moment o� des pays dits �mergents ont fait le pari des nouvelles technologies (Inde, Chine, Br�sil�) et se hissent aux premiers rangs de la performance �conomique , l�universit� alg�rienne se meurt de ronronnement p�dagogique, de l�usure de ses cadres, du manque d�audace de ses premiers responsables, de budgets squelettiques et de d�sorganisation structurelle. Les facult�s des sciences m�dicales et biologiques, de g�nie civil, d�architecture, d�informatique et de math�matiques, dispensent, pour l�essentiel, un enseignement en langue fran�aise. Les enseignants de ces fili�res doivent � chaque rentr�e universitaire faire face au m�me dilemme : comment �caser� les dizaines de milliers de bacheliers que fournit le palier du secondaire et comment dispenser un cours en langue fran�aise � des �tudiants qui n�en ma�trisent aucune des r�gles de base. Ces travaux d�Hercule, devenus r�currents, n�ont � ce jour suscit� ni d�bats ni critiques et encore moins de propositions pour en sortir. Pourtant, la possibilit� de faire une ann�e de langue avant d�entamer le cursus universitaire peut constituer une solution, qui non seulement permettrait aux �tudiants d��tre plus arm�s, mais aussi aux enseignants de mieux se consacrer au contenu de leurs cours. Le d�sint�r�t manifeste des principaux concern�s par cette question nodale est d� � : 1- L�hyper politisation qui entoure cette question d�courage les universitaires les plus hardis et limite leur champ de revendication et de proposition ; 2- Le d�classement social qui a violemment touch� cette profession en raison des humiliants niveaux des salaires et de la d�consid�ration du statut d�enseignant face � l��mergence dans la soci�t� d�une faune interlope dont l�arrogance et l�outrance ont fini par produire une �contre-culture� qui a largement pris racine et d�courage toute initiative investissant l�effort et la dur�e. Les r�sultats sont sans appel. Des milliers de cadres de valeur fuient le pays pour des contr�es plus cl�mentes et plus reconnaissantes. Ce potentiel perdu et au-del� m�me des cons�quences imm�diates qu�il provoque dans de multiples secteurs d�activit�, d�s�quilibre l�architecture de l�Etat et d�vitalise la Nation. Comment ,d�s lors, s��tonner de voir que des structures charg�es de concevoir, amorcer et mettre en place des r�formes structurelles vitales pour le redressement �conomique soient inertes, voire inaccessibles � la capacit� d��laboration et de ma�trise technique. A ce sujet, de nombreux rapports de la Banque mondiale, qui sanctionnent l�audit de l��tat socio-�conomique du pays, aboutissent g�n�ralement aux m�mes conclusions et aux m�mes questionnements. A partir de quel vivier de cadres l�Alg�rie pourra-t-elle structurer son �conomie ? Le probl�me est-il alors de l�ordre exclusif du technique ? A l��vidence non. Qui ignore que l�Alg�rie paie aujourd�hui autant pour l�ignorance que pour les errements de ses dirigeants. Aux politiques d�magogiques et volontaristes des ann�es 1960-1970 ont succ�d� celles, plus nocives, des ann�es 1980 qui ont vu des secteurs entiers comme la justice, l��ducation et les sciences sociales livr�s au courant le plus r�trograde de la soci�t� et subs�quemment � l�int�grisme. Pr�occup�s par la seule ma�trise du pouvoir, les dirigeants successifs ont privil�gi� les tractations et les accords secrets au d�triment du devenir de la Nation. Aux �nationalistes� et � la �famille r�volutionnaire� la rente, aux int�gristes la ma�trise de la soci�t� et � la prog�niture les vannes d�une lib�ralisation perverse et d�brid�e. N�s de ce chaos et port�s par ces segments pr�dateurs, des discours �nationalistes� fleurissent autour des client�les de plus en plus nombreuses et arrogantes. La rapine et la corruption �tant au centre de ces enjeux, on comprend, d�s lors, pourquoi les rares voix discordantes sont musel�es et stigmatis�es. Toute transparence et d�bat libre autour des n�cessaires r�formes sont combattus avec une violence extr�me, ointe d�un discours glorifiant le chef et son action alors que la souverainet� nationale est exhib�e comme une menace d�excommunication. Les niveaux des r�serves de change sont affich�s comme un troph�e signant le g�nie du grand timonier. Mais que peut-on cacher de la r�alit� aujourd�hui qui ne soit connu de tous ? Des organisations internationales ind�pendantes, r�put�es pour leur rigueur et leur s�rieux affichent r�guli�rement les r�sultats des �tudes portant sur des dizaines de pays en mati�re de corruption, de gouvernance, de performance, de s�curit�, de stabilit� et de respect des droits de l�homme. Tout aussi r�guli�rement notre pays est class� dans le lot des pires. Pouvait-il en �tre autrement, d�s lors qu�aucun signe d�une volont� politique d�assainissement et de remise en marche n�est perceptible ? Bien au contraire, le musellement de la soci�t�, le contr�le des m�dias, les viols r�p�titifs de la loi et les diktats ont install� une t�tanie qui inhibe jusqu�au plus audacieux des chefs d�entreprise. S�vissent alors les clans maffieux aggravant, de fait, une situation d�j� bien d�l�t�re. Les r�gles du jeu institutionnel, d�lib�r�ment fauss�es par les fraudes �lectorales, paralysent un Parlement en th�orie charg� du contr�le de l�Ex�cutif. Affect�es au r�le tragicomique de bouffon du roi, les deux chambres votent sans �tat d��me des lois qui, souvent, contreviennent � la Constitution dans leur forme et � la rigueur �conomique dans leur fond. La statistique al�atoire qui est convoqu�e pour, � l�occasion, confirmer �les bilans� du gouvernement, fausse compl�tement la r�alit� socio-�conomique du pays. C�est ainsi que le taux de ch�mage et sa structure varient de plusieurs points selon les sources, mais surtout selon ce qui est jug� opportun par les dirigeants. Il en est de m�me pour le taux d�inflation, le pouvoir d�achat, l��tat d�avancement des programmes de d�veloppement etc... qui, tour � tour, pr�disent des embellies certaines mais que la population d�sesp�re de voir s�accomplir. Des m�gaprojets, comme celui de l�agriculture ont consomm� plusieurs milliards de dollars am�ricains sans qu�aucune croissance r�elle du secteur ne soit significativement enregistr�e. Ces volumes financiers consid�rables inject�s dans la mise en valeur des terres, l�irrigation, le financement de projets et l�appui � la production auraient d�, s�ils avaient �t� encadr�s et suivis rigoureusement, induire une nette progression, au moins pour les sp�culations � court cycle biologique. Cl� de vo�te de toute perspective de d�veloppement, le dossier du foncier agricole et son traitement sous l�angle de l�efficacit� �conomique est ind�finiment remis aux calendes grecques. Pendant ce temps, l�APN d�bat de la crise de la pomme de terre ! Face aux rachitiques r�sultats affich�s par 2 ou 3 secteurs et le blocage des autres domaines, la parade est trouv�e : les confortables r�serves de change qui atteignent, claironne-t-on, 110 milliards de dollars am�ricains. L�information ne nous dit cependant pas que c�est gr�ce � une exploitation effr�n�e des hydrocarbures. Ce qui devrait �tre consid�r� comme un aveu d��chec est exhib� comme un succ�s � mettre au b�n�fice d�une politique visionnaire. Est-il besoin de rappeler que ce stock r�v�le en r�alit� trois choses : 1- Sans une flamb�e des cours du baril, � laquelle nous sommes totalement �trangers, le pays serait en cessation de paiement. 2- Le fonctionnement g�n�ral de notre �conomie ne permet pas d�absorber, en investissements productifs, des volumes financiers pourtant disponibles. 3- Une exploitation irraisonn�e et quasiment compulsive des ressources en hydrocarbures va compromettre durablement toutes les possibilit�s de modernisation de nos entreprises dans les ann�es � venir. Arr�tons-nous un instant sur cet enjeu majeur et voyons ce qu�il en est r�ellement. Contrairement aux affirmations d�clin�es par le gouvernement, le p�trole alg�rien entamera sa courbe d��puisement � partir de 2020. a. Sur les 3200 millions de m3 d�couverts et r�cup�rables, 1800 millions ont d�j� �t� produits. b. Les r�serves non d�velopp�es � ce jour s��l�vent � environ 788 millions de m3, dont seuls 25% (soit environ 200 millions) sont r�cup�rables. La presque totalit� de ces r�serves se situent dans des gisements de petite taille ou difficilement exploitables. c. Au rythme actuel d�exploitation des gisements p�troliers existants et selon des projections s�rieuses, la production alg�rienne sera � peine suffisante pour couvrir les besoins nationaux � l�horizon 2025. d. Concernant le gaz, sur les 4500 milliards de m�tres cubes d�couverts et r�cup�rables, 2000 milliards ont d�j� �t� produits. Le reste � produire (2500 milliards) est aujourd�hui exploit� � 62% par Sonatrach et 38% en association. Le gisement de Hassi-Rmel, qui fournit � lui seul pr�s de 70% de la production nationale, a d�j� produit 55% de ses r�serves r�cup�rables. Les pr�visions montrent que la production actuelle qui est d�environ 95 milliards de m3 baissera � partir de 2008 jusqu�� atteindre 30 milliards en 2023, puis 10 milliards en 2030. Le r�cent probl�me d�infiltration d�eau dans le gisement de Hassi Rmel � sujet, pour l�instant mis sous embargo � qui risque de pi�ger une partie de la production aggravera sans doute des projections fort pessimistes. Ces chiffres devraient inciter � plus de sagesse sur le devenir de cette ressource hautement strat�gique � l��chelle mondiale. En effet, les autres sources d��nergie comme l�hydro-�lectricit�, le solaire ou l��olien, certes en croissance constante, ne d�passeront probablement pas les 8% de la consommation mondiale autour des ann�es 2025. La substitution massive au gaz naturel n��tant pas envisageable pour les deux ou trois d�cennies � venir, une question se pose : Pourquoi nos gouvernants s�acharnent-ils � consid�rer qu�une exploitation accrue du gaz est une opportunit� pour l�Etat alg�rien ? Pour augmenter les recettes du pays ? Nous avons vu plus haut que celles d�j� existantes ne peuvent �tre actuellement absorb�es tant l��tat de notre �conomie est d�labr�. Des pays comme la Hollande et la Norv�ge, qui poss�dent, � eux deux, des r�serves plus importantes que celles de l�Alg�rie (environ 5300 milliards de m3) ont pr�f�r� prendre des mesures de conservation tr�s strictes. Alors riche l�Alg�rie ? Assur�ment non. Elle qui voit son potentiel �nerg�tique g�r� de mani�re erratique et sans r�elle vision prospective, mais aussi parce que des secteurs non moins vitaux comme l�agriculture et le tourisme sont dans un �tat de l�thargie et de d�sorganisation dont il est plus qu�urgent de sortir. Faut-il le rappeler, la facture alimentaire a �t� multipli�e par 6 en moins de 10 ans. Au rythme o� va la consommation mondiale et face au d�veloppement des biocarburants, les prix des produits comme le bl�, le ma�s, le soja et autres semences agricoles ne conna�tront pas de baisse notable sur le march�. La d�pendance alimentaire de l�Alg�rie ira croissant et exposera le pays dans ce qu�il a de plus vital. C�est de cette fragilit� de la souverainet� nationale que devraient s�occuper nos pouvoirs publics au lieu des path�tiques d�clarations dont ils saturent forums et m�dias. L�urgence d�un changement radical des politiques publiques est plus que jamais d�actualit�. Le d�bat autour du devenir alg�rien se posera t�t ou tard. Mais l��quation fondamentale reste inchang�e. Notre pays sera-il d�mocratique ou otage d�un r�gime despotique qui n�a d�autre ambition que celle de confisquer le pouvoir ? La seule question qui m�rite aujourd�hui d��tre abord�e est celle de la l�gitimit� du pouvoir politique. Quand et comment le citoyen alg�rien pourra-t-il d�signer librement ses repr�sentants ? Il appartient � chacun de se d�terminer. Hamid Lounaouci Secr�taire national du RCD D�put� d�Alger