Le devoir de m�moire nous impose de conna�tre notre histoire pour mieux comprendre le pr�sent et appr�hender l�avenir. Il rev�t aussi une importance particuli�re pour l��criture de l�histoire de la guerre de Lib�ration nationale. Celle-ci demeure d�une actualit� br�lante. Elle proc�de malheureusement des luttes politico-id�ologiques actuelles dont elle reste un enjeu important. Pour ce faire, nous devons ressusciter certains h�ros �oubli�s�, parmi eux, l�aspirant Henri Maillot et Maurice Laban, authentiques patriotes alg�riens, morts les armes � la main un certain 5 juin 1956. Comme Iveton, son voisin et ami d�enfance, h�ros guillotin� le 11 f�vrier 1957, Maillot avait choisi la cause de l�ind�pendance de l�Alg�rie par conviction id�ologique, consid�rant la guerre de Lib�ration comme �une lutte d�opprim�s sans distinction d�origine contre leurs oppresseurs et leurs valets sans distinction de race�, tel qu�il l�a �crit lui -m�me aux r�dactions parisiennes juste apr�s sa d�sertion (lire la lettre). Ayant assist� � la r�pression qui s�est abattue sur les musulmans lors des �v�nements du 20 ao�t 1955 dans le nord constantinois, il en est sorti profond�ment marqu�. Maillot a, d�s lors, pris r�solument la d�cision de se joindre au combat lib�rateur. Apr�s avoir �t� rappel� sous les drapeaux pendant trois mois, il demanda � �tre r�engag� dans le but de mettre � ex�cution son projet de d�sertion avec un stock d�armes. Affect� au 57e bataillon de tirailleurs de Miliana o� il a le grade d�aspirant, Maillot convoite l�occasion de d�tourner des armes pour les acheminer aux maquis de la r�sistance alg�rienne afin, pr�cise-t-il, d��aider mon pays et mon peuple� (lire la lettre). L�opportunit� se pr�sente le 4 avril 1956 : l�officier Maillot d�serte avec un camion d�armes qu�il remet aux moudjahidine. Pas moins de 132 mitraillettes, 140 revolvers, 57 fusils et un lot de grenades viennent enrichir le potentiel militaire de la r�sistance. Henri Maillot, devenu �l�officier f�lon� pour la presse coloniale, est condamn� � mort le 22 mai par le tribunal militaire d�Alger, qui d�cide de mettre aussi la maison familiale de Clos-Salembier sous s�questre et ce, afin de rembourser les armes sous la part d�h�ritage revenant � Henri. Activement recherch�, il �chappe aux paras jusqu�� ce mardi 5 juin 1956, quand son commando de huit hommes fut surpris au djebel Deragua, � El-Karimia (Lamartine), par les miliciens du bachagha Boualem et les soldats fran�ais. Henri y laissera sa vie, ainsi que quatre autres compagnons d�armes : l�enseignant de Biskra Maurice Laban, Belkacem Hanoun qui n�avait pas 20 ans, Djillali Moussaoui et Abdelkader Zalmat. Trois combattants ont �chapp� au traquenard : Hamid Gherab, Mohamed Boualem et Mustapha Sa�doun. Mustapha Sa�doun est le dernier survivant de cette aventure inoubliable. Il a 89 ans. Retir� � Cherchell, il vit d�sormais avec ses plantes et ses souvenirs. Force est de constater que cinquantedeux ans apr�s sa mort, Henri Maillot reste inconnu de la grande majorit� de la g�n�ration post-ind�pendance, qui plus est, par les jeunes d�El-Madania, quartier o� vit toujours sa famille. Et pour cause, aucune rue, ni �cole, ni institution publique ne porte son nom jusqu�� l�heure actuelle. La d�sertion de cet officier avec un camion rempli d�armes vers le maquis a �t� d�une grande port�e psychologique et a marqu� de fa�on �clatante la participation d�Alg�riens d'origine europ�enne au combat pour la lib�ration de la patrie commune. Un combat qui n�avait aucun caract�re de race ni de religion, mais un combat lib�rateur et national. Quant au second, Maurice Laban, n� � Biskra, de parents instituteurs, ils �taient lui et sa s�ur les seuls Europ�ens dans toute l��cole o� enseignaient leurs parents. C�est tout naturellement qu�il a appris � parler l�arabe comme une langue maternelle. Plus tard, il parlera le chaoui couramment apr�s avoir enseign� dans une �cole indig�ne o� les �l�ves ne parlaient que cette langue. Dans les ann�es 1930, il prit part � la guerre civile d�Espagne aux c�t�s des r�publicains, il fut bless� deux fois sur le front. La deuxi�me blessure �tait tellement grave, qu�il a failli �tre achev� par les brancardiers qui ne croyaient pas en sa survie. C�est finalement Georges Rafini, son camarade de lyc�e � Constantine, qui le sauvera in extremis sur le champ de bataille. Tellement impr�gn� de la mentalit� de la population de Biskra, il envoya une lettre � ses parents leur demandant de sacrifier un mouton sur le tombeau de Sidi Messaoud (le saint patron de la localit�) et l�offrir accompagn� de couscous aux pauvres de la r�gion. Et ce, en guise de reconnaissance envers Dieu pour l�avoir sauv� d�une mort certaine. De retour d�Espagne, il rentrera � Biskra, o� il participera aux c�t�s des musulmans opprim�s � tous les combats contre les formes d�injustice auxquelles ils �taient soumis par le syst�me colonialiste et leur valet le bachagha Bengana. En 1941, il fut arr�t� et incarc�r� � Serkadji, puis condamn� � mort avec son �pouse Odette et son camarade Georges Rafini. L�acte d�accusation portait sur la publication et la diffusion d�un journal clandestin s�opposant au r�gime fasciste de P�tain. Au d�clenchement de la R�volution, le chahid Mostefa Benboula�d lui fait appel pour devenir son adjoint. Vu son temp�rament de bagarreur, Maurice �tait ravi � l�id�e de s'engager enfin par les armes dans sa lutte contre le colonialisme. Etant un militant disciplin� du parti, il demanda l�accord de sa hi�rarchie. Celle-ci refusa et lui demanda de temp�rer ses ardeurs jusqu�� nouvel ordre. C�est finalement � El Karimia (Lamartine), dans l�Ouarsenis, qu�il devra rejoindre Henri Maillot qui venait de d�serter. Cette rencontre fut possible gr�ce � Myriam Ben, militante du parti et enseignante � Oued Fodda. La m�connaissance de cette r�gion leur fut fatale � lui et ses compagnons. Merzak Chertouk (cadre sup�rieur)