Ils ont r�pondu pr�sents � l�appel de la patrie lorsque les sanguinaires islamistes avaient d�clar� la guerre � la R�publique. Ils ont courageusement combattu aux c�t�s des soldats de l�ANP, pendant une d�cennie, sans rien demander. La Charte pour la paix et la r�conciliation nationale, qui a r�habilit� les ennemis de l�Alg�rie, les a compl�tement oubli�s. Ces GLD (groupes de l�gitime d�fense) et ces Patriotes se sentent aujourd�hui trahis par un Etat qui continue � les ignorer. Leur situation socio�conomique est des plus d�plorable. Reportage r�alis� par Ly�s Menacer Sa�di est cuisinier dans une �cole primaire � Ait Chaffa� et Da M�hand �tait chauffeur d�une entreprise publique � Alger. Ces deux hommes sont natifs d�un m�me village et ont un destin commun : celui de faire partie du premier groupe de l�gitime d�fense (GLD) qui a vu le jour durant l��t� 1994 en Kabylie. Entour�s de quelques jeunes, qui pla�aient un climatiseur pour la mosqu�e d�Iguedjdal, petit hameau d�Ait Chaffa�, dans la da�ra d�Azzeffoun (� 75 km au nord-est de Tizi Ouzou), ces deux quinquag�naires n�ont pas cach� leurs d�sillusions et leur amertume. Pour eux, la Charte pour la paix et la r�conciliation nationale est une trahison de leurs sacrifices et de ceux de toutes les victimes de la barbarie islamiste. �Je travaillais comme chauffeur au sein d�une entreprise de fabrication de fil �lectrique � Oued Smar, � Alger. Il me restait � peine huit jours de cong�, quand les terroristes ont voulu p�n�trer dans notre village, pour prendre de force nos armes�, se rem�more Da M�hend, avec force d�tails, cette nuit de juillet 1994 o� il avaient r�ussi, lui et les habitants d�Iguedjdal, � repousser une attaque terroriste � laquelle ils se sont parfaitement pr�par�s. �Un village voisin nous a inform�s la veille que les terroristes du GIA avaient l�intention de venir prendre nos armes. Nous avons d�cid� de leur r�sister et nous avons r�ussi � faire �chouer leur projet � l�aide de simples fusils de chasse. Depuis, je n�ai plus repris mon travail � Alger. J�ai pris une ann�e de cong� sans solde sous pr�texte que je voulais achever la construction de ma nouvelle maison. Dans les faits, je voulais prot�ger ma famille et mon village contre ces hordes qui voulaient d�truire notre pays. J�avais perdu mon emploi � cause des terroristes qui commen�aient � me surveiller, � l�entr�e m�me de l�usine. Cinq ann�es se sont �coul�es et je me suis rendu compte qu�il valait mieux rester chez moi et trouver un autre emploi qui me permettrait d��tre proche des miens�, continua-t-il, entre deux bouff�es de cigarette. Des r�sistants livr�s � eux-m�mes Le danger est loin, mais la peur demeure toujours au sein d�une population qui continue � assurer sa propre s�curit�. Da M�hand ne croit pas � cette paix revenue, dont parlent les responsables de l�Etat, � leur t�te le pr�sident de la R�publique, Abdelaziz Bouteflika, qui incarne cette charte qui a r�habilit� les islamistes et r�duit � n�ant la r�sistance des Patriotes et des GLD. Ces derniers affirment �tre compl�tement abandonn�s. Certains d�entre eux vivent dans des conditions socio�conomiques d�plorables. Des p�res de famille sont r�duits � la mendicit�, apr�s avoir cru en l�id�al r�publicain et en l�amour de leur pays. Da M�hand fait partie de cette cat�gorie de r�sistants qui vivent au jour le jour. �J�ai dix enfants � nourrir et je ne dispose que d�une maigre retraite de 10 000 dinars�, ajoute ce vieux, que la culture de la terre aide quelque peu � survivre. Ce n�est pas le cas des autres GLD d�Iguedjdal � qui on refuse m�me le droit d�int�grer les rangs de la Garde communale et des Patriotes, d�nonce-t-il. Sa�di, qui a �t� d�sign� comme responsable des 47 GLD d�Iguedjdal, affirme avoir vainement frapp� � toutes les portes. �J�ai adress� plusieurs correspondances au secteur militaire et au wali de Tizi Ouzou, leur demandant d�aider ces jeunes � trouver un emploi pour avoir de quoi subvenir aux besoins de leurs familles. J�attends leur r�ponse depuis deux ans. � chaque fois, on me dit que le courrier a �t� transmis aux responsables du minist�re de la D�fense � Alger, qui ne vont pas tarder � trancher cette question�, d�clare Sa�di, qui d�nonce les privil�ges accord�s aux terroristes �repentis� par la charte, initi�e par Bouteflika et d�fendue aveugl�ment par les partis de l�alliance pr�sidentielle (FLN-RNDMSP). �L�Etat a les moyens pour nous aider, comme il a aid� ces terroristes � qui il a donn� de l�argent et offert des commerces. Malheureusement, personne n�est venu chercher apr�s nous, et, ici, les gens ne croient plus en les promesses de l�Etat�, d�clare-t-il, estimant que le projet de statut pour les GLD et les Patriotes n�est que vains mots pour calmer les esprits de ceux qui perdu espoir et confiance en leurs gouvernants. Mais l�id�al, pour lequel Tahar Djaout s�est sacrifi�, et dont on pouvait apercevoir la tombe, � partir de cette colline o� tr�nait le village d�Iguedjdal, demeure intact chez ces braves GLD. Devant le m�pris, la r�signation A Yakouren, les Patriotes ne traquent plus les terroristes dans les maquis, comme ils le faisaient efficacement depuis le d�but des ann�es 1990. Ils refusent toutefois de rendre leurs armes au moment o� leur r�gion est en proie � une intense activit� des groupes terroristes qui y ont trouv� refuge. �Nous n�avons en rien b�n�fici� de la lutte antiterroriste et encore moins de la charte de Bouteflika. Nous avons perdu nos emplois, nos oliviers et mis en p�ril la vie de nos familles. Nous ne regrettons pas notre engagement, mais nous d�non�ons le m�pris dont nous faisons l�objet depuis l�ann�e 2001�, raconte Omar, dans ce caf� discret de la ville de Yakouren, situ� en contrebas du si�ge de la brigade de la Gendarmerie nationale qui a �t� la cible d�une violente attaque terroriste, � cette m�me p�riode de l�ann�e derni�re. Le sort de ce quinquag�naire ne diff�re pas trop de celui des Patriotes et des GLD d�Iguedjdal, � Azzeffoun. �Je vis de l��levage du b�tail apr�s avoir perdu mon emploi, en raison de mon engagement dans la lutte antiterroriste en 1994. Parfois, je suis contraint de travailler chez des particuliers pour subvenir aux besoins de ma famille, que je ne peux pas laisser seule au milieu de cette for�t. Apr�s s��tre servi de nous pendant des ann�es, l�Etat refuse aujourd�hui de nous �couter et d��couter notre d�tresse�, dit cet homme dont le visage t�moigne des longues nuits pass�es sous le froid et la pluie, dans ce vaste massif forestier, le plus important de Kabylie. �Nous sommes pris en otage dans cette r�gion o� la lutte arm�e ne donne plus de r�sultats sans l�appui de la population et des Patriotes qui connaissent le terrain mieux que toute autre personne�, affirme Mouloud, 59 ans et ancien Patriote, d��u de la tournure qu�a pris la lutte contre les islamistes arm�s, apr�s le d�part de Zeroual et l�arriv�e de Bouteflika au pouvoir en 1999. �Nous sommes retourn�s � la case d�part. Le terrorisme a repris, mais la population ne s�implique plus dans la lutte comme avant. A quoi bon arr�ter un terroriste aujourd�hui, si l�Etat d�cide de le lib�rer demain et de lui offrir un statut qui le place au-dessus des Patriotes, des GLD et des victimes de sa violence, au nom d�une id�ologie qui le fera retourner au maquis, t�t ou tard�, juge Mouloud faisant allusion � tous les repentis qui sont remont�s aux maquis depuis la promulgation de la Charte pour la paix et la r�conciliation nationale, dont le prolongement sur le terrain est le retour de la violence islamiste que Bouteflika et ses collaborateurs tentent vainement de minimiser. Parall�lement, dans ces villages enclav�s de la Kabylie, et � travers l�ensemble des autres r�gions, des Patriotes et des GLD, comme Sa�di, Da M�hand, Mouloud et Omar, voient avec incertitude l�avenir de cette immense Alg�rie qui n�a jamais su r�compenser les plus m�ritants de ses enfants.