De notre bureau de Paris, Khadidja Baba-Ahmed Dans son discours tr�s attendu de jeudi, le ton de Nicolas Sarkozy s�est voulu grave. Comment pouvaitil en �tre autrement lorsque, d��vidence, la crise internationale du capitalisme financier est l�, dans l�Hexagone et ses cons�quences vont �tre durables sur la croissance, sur le ch�mage, sur le pouvoir d�achat et ne peuvent, de ce fait, �tre occult�es plus longtemps. Il ne faut cependant pas r�ver : m�me dans cette situation �conomique catastrophique, confirm�e d�s le lendemain de son intervention (hier) par les chiffres officiels du ch�mage, s�il appelle, comme son ami Bush, � la rescousse les finances de l�Etat, Sarkozy n�en abandonne pas moins ses fondamentaux en proposant une �refondation du capitalisme � et en direction de son camp qui pourrait craindre un revirement : �L�anticapitalisme n�est pas une solution.� Une position qu�il ne pourra tenir longtemps et des citoyens fran�ais de plus en plus sceptiques sur les capacit�s du �pr�sident du pouvoir d�achat� � les sortir d�une impasse. L�am�re r�alit� est tomb�e d�s le lendemain (hier) du discours de Sarkozy : entre 30 000 et 40 000 ch�meurs suppl�mentaires, cette baisse n�est pas arriv�e avec cette ampleur depuis 15 ans. La crise appelle � acc�l�rer les r�formes et non � les ralentir, a pr�venu Sarkozy qui, dans la foul�e, confirme que �30 600 emplois publics seront supprim�s en 2009�. Sarkozy aura eu beau, comme il l�a fait la semaine derni�re en marge du sommet de l�ONU � New York, r�clamer des sanctions contre les responsables du �d�sastre financier �, les Fran�ais attendaient des mesures concr�tes contre les parachutes dor�s, il n�en a avanc� aucune et n�a fait que fustiger les tr�s gros cadeaux faits aux d�tenteurs de l��conomie : �Les modes de r�mun�ration des dirigeants et des op�rateurs doivent �tre encadr�s. Il y a eu trop d�abus, trop de scandales. Par quel encadrement ? En dehors d�une menace hypoth�tique qui oublie sciemment de mentionner que la richesse d�une entreprise est celle aussi de sa force de travail qui n�en re�oit pas les fruits aujourd�hui, il ne fait pas illusion. Il ne remet pas en cause les contrats priv�s, et dans le meilleur des cas, il ne pourra �dicter �qu�un code de bonne conduite� d�ici la fin de l�ann�e�, si les dirigeants d�entreprise ne s�entendent pas�. Ne fait pas illusion non plus son engagement � ce que �pas un seul d�posant ne perde un seul euro parce qu�un �tablissement financier se r�v�lerait dans l�incapacit� de faire face � son engagement �. Tout le monde sait, et les �pargnants fran�ais en premier chef, que cette d�cision n�en est pas une, leurs �pargnes sont aujourd�hui et depuis longtemps garanties par la loi, � hauteur de 70 000 euros par d�posant. Quant au revenu de solidarit� active, qui devait �tre financ� par des taxes sur les revenus financiers, Sarkozy modifie quelque peu le dispositif pour tranquilliser ses amis de la droite. La nouvelle taxe servant � financer le revenu de solidarit� active �sera diminu�e au fur et � mesure que cette aide sera mise en �uvre� et de poursuivre : �Cela ne remet pas en cause l�objectif de baisse globale des pr�l�vements.� L�Etat, a annonc� le pr�sident fran�ais, �serait pr�t � intervenir le cas �ch�ant par des cautions, par des garanties, par des apports en capital ou par des modifications de la r�glementation bancaire� pour �viter que, par un engrenage fatal, l��conomie priv�e de financement s�enfonce durablement dans la r�cession�. Ce dernier terme, la r�cession, �tait, jusque-l�, devenu tabou aupr�s du pouvoir fran�ais actuel, qui l��vitait, on l�avait m�me banni des discours. Les finances publiques � la rescousse de l��conomie, c��tait aussi une insulte pour les tenants du lib�ralisme. Et pourtant, face � une situation des plus catastrophiques, Sarkozy n�a rien trouv� de mieux que de naviguer p�niblement entre un capitalisme devenu �fou� et qu�il �faut moraliser � et la n�cessit� de �travailler plus� pour sortir du marasme. N��tait ce pas-l�, justement, l�astuce trouv�e par le pr�sident pour devancer les mesures qu�il aura � prendre tr�s vite pour boucler un budget (examin� hier en Conseil des ministres) qui se pr�sente sous les plus mauvais auspices : 52 milliards de d�ficit ; un ralentissement de l��conomie, un ch�mage en hausse et le meilleur est � venir, en fait un flot de mauvaises nouvelles dont les impacts, comme toujours, se feront sentir sur les plus faibles. Le pr�sident a eu beau, par ses incantations, vouloir donner l�impression qu�il continue � ma�triser une situation dont la seule origine serait, selon lui, la crise internationale, il lui faudra bien expliquer pourquoi, obstin�ment, maintient-il ses r�formes, qui, chaque semaine, rognent un peu plus le pouvoir d�achat et d�versent sur le pav� des milliers de laiss�s-pourcompte ; les autres, les grosses fortunes, continuent confortablement � s�engraisser.