Quelle sinistre r�alit� de ces th��tres qui manquent de l�un de leurs �l�ments majeurs : le public. Cela a �t� le cas lors de la pr�sentation de la pi�ce th��trale le Dernier train au TNA ce jeudi 7 novembre � 15h, o� le spectateur a fait d�faut pour justement permettre � la magie du th��tre de prendre toute son expression. Eternelle probl�matique de la place du th��tre dans les m�urs culturelles des Alg�riens, dont, en d�autres temps, ils furent assidus et enthousiastes. Malgr� cet amer constat, la qualit� du spectacle et les prestations des deux com�diens �taient � la hauteur des dignes performances du th��tre professionnel. Adapt� d�un texte d�un auteur n�erlandais (Kim Van), les deux auteurs Ahmed Hammoumi et Abdelkader Belkouri ont ajust� le contexte de la pi�ce sur un fond de toile de la crise alg�rienne, tant �conomique que sociopolitique, dont la caricature du personnage du prol�taire �cras� par une r�alit� d�sastreuse � laquelle il fait face avec son nif m�me �artificiel�. Le personnage de la pi�ce, interpr�t� formidablement par Hammouda El Bachir, fait son entr�e en sc�ne ivre mort apr�s une soir�e de carnaval et de nous vomir sur les planches sa profonde d�tresse de licenci� pour cause de compression du personnel, suite aux injonctions �conomiques du lib�ralisme effr�n� qui �crase tout le monde sur son passage. Une belle mise en sc�ne et une sublime sc�nographie de Benamar Yahia pour donner l�espace sc�nique dans lequel va �voluer l�univers de l�absurde. On d�couvre une gare ferm�e depuis 1933, o� une �trange personne surgit de nulle part (r�le interpr�t� par Messoussa Nawal), telle une dame de la Petite maison dans la prairie et qui d�s�quilibre notre infortun� en remettant les pendules � �sa� propre heure. Apr�s un duel aux aiguilles du temps, elle lui exhibe son ticket de train qui date du 10 septembre 1850 alors que lui �noyait� son d�sarroi dans une bouteille de vin un certain 12 ao�t 1993. Comment combler ces 133 ann�es de d�calage. C�est l� que l'infortun� se met � lui �num�rer des �v�nements r�f�rentiels pour lui situer son �poque, et c�est alors qu�il lui cite la bombe atomique (Hiroshima et Nagasaki), Hitler, le nazisme et bien d�autres �normit�s de notre monde contemporain. Elle ne reconna�t aucunes de ces terreurs et lui r�plique que en son temps on se faisait la guerre certes, mais de l� � inventer de quoi exterminer des milliers de gens par le fait d�une seule bombe, cela lui semblait incroyable. On est tent� de se rappeler la chanson de Brel les Singes de mon quartier o� il ironise qu'�ils ont invent� la chaise �lectrique et la bombe atomique, est-ce pour cela qu�ils sont civilis�s les singes de mon quartier ?� Peut-�tre plus r�confort� par ce temps r�volu, tout cr�dule il est tent� de croire qu'il pouvait int�grer cette �poque, alors il d�cide de quitter ce fichu r�el pour un r�ve d�raisonn� de vivre dans un pass� qui lui semble plus humain. Mais il rate le dernier train. On ne peut pas faire marche arri�re. Merci, les gars du Th��tre r�gional d�Oran de nous avoir gratifi�s de ce spectacle tr�s humain l�espace d�un temps o�, nous aussi, il nous semble qu�on va rater le train de l�Histoire.