Dans une contribution publi�e jeudi dans le quotidien ElWatan , le g�n�ral � la retraite Rachid Benyelles est longuement revenu sur les relations entre l�actuel pr�sident de la R�publique et les repr�sentants de l�institution militaire. Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - Rachid Benyelles revient � la charge ! Apr�s un premier r�quisitoire proclam� contre Abdelaziz Bouteflika durant le mois d�octobre 2008, le g�n�ral � la retraite reprend sa plume pour apporter, dans les colonnes du quotidien El Watan, �un �clairage� sur la nature des relations entre Abdelaziz Bouteflika et les militaires. Benyelles remonte � l�ann�e 1994, lorsque Bouteflika a �t� approch� pour succ�der au Haut comit� d�Etat (HCE). Selon lui, Bouteflika a refus� cat�goriquement de se pr�senter devant les membres de la Conf�rence de dialogue nationale (CDN). �Face � l�ampleur qu�avait prise cette affaire, les militaires avaient demand� � ce dernier (Abdelaziz Bouteflika) de se montrer plus conciliant en faisant acte de pr�sence devant la CDN. Arguant qu�il avait �t� convenu qu�il ne tienne son mandat que des seuls militaires, Abdelaziz Bouteflika avait refus� cat�goriquement et cela, au grand dam du g�n�ral Khaled Nezzar qui l�accusera de s��tre accroch� � un pr�texte fallacieux pour se d�rober, au tout dernier moment, devant une responsabilit� dont il n�avait tout d�abord pas mesur� pleinement les dangers, et que le d�funt Boudiaf avait pay� de sa vie�. Mais les repr�sentants de l�institution militaire auront vite fait d�oublier cette d�convenue puisqu�ils font de nouveau appel � lui suite � la d�mission du pr�sident Liamine Zeroual. �C�est � la fin du mois de d�cembre 1998 que les militaires opteront finalement pour Bouteflika, l�homme qui, croyaient-ils, dans leur grande na�vet�, pouvait apporter au r�gime son exp�rience diplomatique et son vaste r�seau de relations internationales. Ils pensaient, tout aussi na�vement, que son art oratoire et sa ma�trise de la langue arabe pouvaient �tre d�une grande contribution pour combler le vide de communication de son pr�d�cesseur et gagner l�opinion � la cause du pouvoir en place. Last but not least, la d�signation � la t�te du pays d�un homme originaire de l�Ouest leur semblait �tre de nature � donner l�illusion d�une alternance r�gionale � la t�te du pays, ce qui ne pouvait que r�jouir les habitants de l�Oranie qui, � tort ou � raison, se plaignaient d��tre marginalis�s et frapp�s d�exclusion. La d�cision prise, toutes les dispositions n�cessaires furent mises en branle pour l�accompagner jusqu�� la plus haute marche du pouvoir. Des comit�s de soutien poussaient comme des champignons � travers tout le territoire pour chanter les louanges de l�homme dont plus personne ne doutait de la victoire maintenant qu�il �tait adoub� par l�arm�e �, explique Benyelles. Le retrait � la derni�re minute des autres candidats en lice fera toutefois de Bouteflika un chef d�Etat �mal �lu�. Benyelles estime que les relations entre le pr�sident et les militaires ont commenc� � se d�t�riorer au lendemain du r�f�rendum sur la Concorde civile, un scrutin dont la r�ussite lui a permis d�obtenir une forme de �l�gitimit�. �Une fois bien cal� dans son fauteuil et fort de sa nouvelle �l�gitimit�, Abdelaziz Bouteflika, qui avait �t� jusqu�alors tout sucre tout miel avec les militaires, commen�ait � les asticoter et � leur d�cocher des fl�ches empoisonn�es. Tout en faisant l��loge de l�arm�e qui, disait-il, avait sauv� le pays de la catastrophe annonc�e, il multipliait les d�clarations ambigu�s sur l�arr�t du processus �lectoral en 1992, qu�il consid�rait comme une premi�re violence contre le peuple, sur la nature de l�insurrection et des groupes arm�s, sur l�ampleur v�ritable du nombre de victimes au cours des ann�es de sang, etc. Faisant allusion aux militaires, il d�clarait qu�on lui avait fix� des fronti�res � ne pas franchir, ajoutant, avec la v�h�mence qu�on lui conna�tra par la suite, qu�il refusait d��tre un trois quarts de pr�sident ! A tous les �trangers qu�il rencontrait, il se plaignait des g�n�raux qui le bridaient dans son action, ce qui �tait totalement faux. Les militaires, qui n�avaient aucun int�r�t � faire de lui une potiche, lui avaient au contraire remis les r�nes du pouvoir � tout le pouvoir � sans aucune restriction, y compris sur l�arm�e. Pour expliquer ce comportement d�routant, il faut savoir que Bouteflika, dont l�ego est sans limite, ne supportait pas l�id�e, alors bien ancr�e dans l�opinion, que les militaires �taient les v�ritables d�cideurs dans le pays. Ressentant cette rumeur comme une torture insoutenable, il voulait que tout le monde sache qu�il �tait le ma�tre absolu du pays et que les seuls liens qu�il avait avec les militaires �taient ceux de sup�rieur � subordonn�s. Dans sa m�galomanie, il voulait rappeler � ceux qui pouvaient en douter qu�il �tait un pr�sident � part enti�re et sans partage ; que son retour aux affaires n��tait que juste r�paration du pr�judice qu�il estimait avoir subi apr�s la disparition du pr�sident Houari Boumediene auquel il devait, dans sa logique, succ�der en raison de sa proximit� ; qu�il n�avait rien � devoir � personne, pas m�me aux militaires. Il faut savoir �galement que A. Bouteflika n�est pas du genre � s�embarrasser de reconnaissance envers ceux qui l�ont soutenu, qu�il s�agisse de H. Boumedi�ne, � qui il doit toute sa carri�re politique et pour lequel il n�a jamais eu la moindre pens�e, ou des g�n�raux qui avaient pris le risque de s�ali�ner l�opinion nationale et internationale pour l�imposer � la t�te du pays.� Pour le g�n�ral � la retraite, ceux qui avaient soutenu l�option Bouteflika en 1999 se sont retrouv�s �d�sar�onn�s et pi�g�s� et n�avaient d�autres choix que d�attendre la fin de ce premier mandat. �D�terminant en 1999, leur poids politique �tait devenu insignifiant en 2004. Ils avaient �t� �vinc�s du champ politique. Cette �viction aurait pu �tre consid�r�e comme une action salutaire si l�ordre �tabli avait �t� remplac� par une d�mocratie v�ritable et non par un r�gime policier semblable, en beaucoup de points, � celui de la Tunisie voisine, quoique plus proche de celui d�un Bourguiba frapp� de s�nilit� que de celui, encore vigoureux, d�un Ben Ali. Pour ceux qui s��taient engag�s dans la comp�tition �lectorale sur la base d�un scrutin sinc�re et honn�te, la d�ception �tait � la mesure des espoirs qu�ils avaient tout d�abord nourris�. Rachid Benyelles dresse un bilan sans concession des ann�es Bouteflika. En conclusion, il lui lance l�appel suivant : �Ce qu�on peut lui souhaiter sinc�rement, c�est un sursaut de clairvoyance pour renoncer non seulement � un troisi�me mandat, mais � toute vie politique active ; qu�il rentre chez lui et qu�il prenne le repos que son �ge et son �tat de sant� exigent instamment�.