L�entreprise alg�rienne priv�e a enfin son code de la gouvernance. L�initiative prise il y a deux ans par trois acteurs en vue de la vie �conomique (le Cercle d�action et de r�flexion sur l�entreprise, le Forum des chefs d�entreprises et l�Association des producteurs alg�riens de boissons) vient d�aboutir, avec la pr�sentation et l�adoption, demain, du document final : Code alg�rien de gouvernance d�entreprise. Ce n�est pas tout d�inscrire la propri�t� priv�e et la libre entreprise dans l�ordre constitutionnel ; encore faut-il que la soci�t� secr�te la culture juridique, la rigueur, la transparence et l��thique n�cessaires � la promotion d�une �conomie sociale de march� moderne et performante. La r�volution d�mocratique bourgeoise peine � se produire chez nous dans le contexte d�un patronat d�structur�, parasite plut�t que partenaire, infantilis� par un capitalisme d�Etat sans cesse confort� par une accumulation organis�e autour de la rente p�troli�re publique en fonction de la proximit� avec le pouvoir central. L�industrie n�intervient qu�� hauteur de 5% du PIB (secteur public compris) et la forme mercantile dominante du capital national n�autorise pas une telle audace. La gouvernance d�entreprise est justement une d�marche manag�riale d�une actualit� br�lante, jamais d�mentie, depuis le milieu des ann�es 1990 lorsque des d�rives se sont faites jour dans la gestion des grosses firmes, en particulier celles cot�es en Bourse. Pantouflage, stocks options, primes de d�parts insens�es, niveaux de r�mun�rations hallucinants et d�lit d�initi� sont les facettes les plus connues de cette perversion. Les fondements doctrinaux de la gouvernance d�entreprise sont ainsi �troitement li�s � la protection des int�r�ts des petits porteurs de titres, p�nalis�s par la structure dilu�e de l�actionnariat qui ne leur donnait aucun droit de regard sur les organes de gestion et de contr�le de la soci�t�. On ne s��tonnera donc pas que l�une des r�f�rences principales du texte alg�rien sont �les principes de gouvernance de l�entreprise de l�OCDE� qui date de 2004. �La d�marche consiste � introduire rigueur et transparence dans la mani�re dont une entreprise est g�r�e, administr�e et contr�l�e, et de procurer, ainsi, � ses propri�taires, notamment minoritaires, une protection ultime de leurs int�r�ts fondamentaux �, �crivent les auteurs du Code �labor� sous la pr�sidence de M. Slim Othmani, Pdg de la Nouvelle conserverie alg�rienne, par ailleurs membre actif du FCE et de CARE. Parce que les �checs enregistr�s par bon nombre d�entreprises r�sultent de leur nonconformit� avec les r�gles de bonne gouvernance, le code se propose de les soumettre, volontairement, � une mixture de r�gles techno-�conomiques, d�exigence �thique et citoyenne. L�objectif affich� ici est de favoriser la diffusion � grande �chelle des conditions d�une ��conomie de march� saine et dynamique dot�e d�un tissu d�entreprises de qualit� qui mettent de leur c�t� les avantages de la transparence, de la stabilit�, de la rigueur et de la bonne image. Sch�matiquement dit, l�objet de la gouvernance d�entreprise est de d�finir et d�organiser les relations entre les parties prenantes internes et externes. Sur le plan interne, les acteurs concern�s sont les propri�taires, les administrateurs et les managers, agissant dans le �strict cadre� de l�organe de gestion qui est le leur. G�n�ralement constitu�e d�un noyau familial et fortement associ�e � la personne de son fondateur, l�entreprise alg�rienne est frapp�e d�une forte mortalit�, alors que les conflits n�s de sa transmission compliquent sa p�rennisation. Sur le plan externe, l�entreprise subit les influences directes de six acteurs. 1. Les administrations publiques, notamment fiscale, sont une source majeure de m�fiance et, parfois, d�inqui�tudes l�gitimes dans le contexte d�un Etat jacobin, omnipotent et omnipr�sent, de surcro�t et par moments populiste. Aujourd�hui que l��conomie sociale de march� fait office d�option strat�gique pour la nation, une relation assainie et sereine avec cette administration passe n�cessairement par un effort de transparence et de sinc�rit� des comptes. Par ailleurs, le partenariat requis de la relation entreprises priv�es - administration publique passe n�cessairement par le strict respect de la loi, notamment dans trois domaines : la l�gislation du travail, la fiscalit� et la protection de l�environnement. 2. Le syst�me financier, notamment la banque, renvoie au sempiternel probl�me d�acc�s au cr�dit. Les banques ont souvent raison de d�plorer la faiblesse de fonds propres de l�entreprise (encore faut-il qu�ils soient dissoci�s du patrimoine priv�) ou des comptes (historiques ou pr�visionnels) qui ne refl�tent pas sa r�alit� �conomique. La gouvernance d�entreprise met justement l�accent sur �la sinc�rit� des comptes, leur correspondance � une r�alit� �conomique et un accroissement de la lisibilit� de l�entreprise par le partenaire banquier �. 3. Les fournisseurs et prestataires d�tiennent une part non n�gligeable de la r�ussite de l�entreprise et de sa p�rennit�. Par leur collaboration durable comme pourvoyeurs (d�inputs en amont de la cha�ne de valeurs) et comme cr�anciers (pouvant accorder des d�lais de paiement), les fournisseurs et prestataires �constituent, aux yeux du code, des gisements de productivit� qui peuvent �tre d�terminants pour la bonne marche de l�entreprise. 4. Les clients sont les �vrais patrons de l�entreprise�, nous dit le code. Leur satisfaction et leur fid�lisation sont au c�ur de sa mission. L�entreprise se doit alors de d�velopper et d�entretenir une approche �loyale et �thique avec sa client�le dans le respect du principe gagnantgagnant et des lois et r�glements en vigueur�. 5. Les employ�s sont les �premiers clients� de l�entreprise. A ce titre, leur motivation et leur implication sont indispensables. Elles requi�rent �des syst�mes de r�mun�ration bas�s sur le m�rite et la comp�tence, ainsi qu�une politique d��coute et de traitement �quitable des pr�occupations de ressources humaines�. Aussi, l�entreprise doit veiller � la formation de son capital humain et � s�acquitter de ses obligations sociales�. 6. Les concurrents sont tenus au respect des r�gles �thiques et d�ontologiques. L�enjeu n�est pas seulement la dispute de parts de march� mais �des possibilit�s de coop�ration en qualit� de professionnels et de confr�res appel�s � se concerter sur des questions sectorielles communes �. Monopoles, quasi-monopoles, concurrence imparfaite, abus de positions dominantes participent g�n�ralement � d�t�riorer la solidarit� au sein du groupe. L��tat des lieux ou l��nonc� de principes standards de bonne gouvernance ne suffisent certainement pas � assurer la r�ussite de l�entreprise. Encore faut-il assurer � une initiative volontaire et non contraignante la p�rennit� requise par la lente maturation des choses s�agissant d�un domaine immat�riel relevant davantage de la diffusion de valeurs dans un milieu traditionnellement conservateur et par ailleurs m�fiant et soup�onneux. Le code n�est juridiquement pas contraignant. Ainsi l�ont voulu ses r�dacteurs et ceux qui y adh�rent volontairement. Il ne s�agit pas d�une convention non plus. Il a simple valeur indicative de r�f�rence. Il pr�conise l�adh�sion volontaire des entreprises priv�es, par voie de souscription unilat�rale, � un questionnaire figurant en annexe. Le but est ainsi davantage de rendre compatible l�action des op�rateurs priv�s avec la responsabilit� citoyenne, sociale et environnementale attendue d�eux. Un m�canisme institutionnel � minima est venu pallier cette carence. Il tient en un dispositif d�accompagnement charg� d�enregistrer les entreprises adh�rentes, de sensibiliser et de former, de rester � l��coute des exp�riences les mieux r�ussies � l�international. Ce m�canisme pourrait, � terme, se traduire par l�ouverture d�un institut alg�rien de la gouvernance d�entreprise.