Poursuivant la bataille militaire, les pouvoirs publics sont-ils finalement d�cid�s � s�engager massivement sur le front �conomique, social et, n�cessairement par extension, politique au niveau des zones rurales viviers des islamistes arm�s, pour leur porter l�estocade finale ? Suivons le ministre de l�Agriculture et du D�veloppement rural, M. Rachid Bena�ssa, qui, quelques jours apr�s son audition ramadanesque par le pr�sident de la R�publique, a fait sa premi�re sortie sur le terrain dans les zones montagneuses de la wilaya de Boumerd�s et dans des localit�s qui �taient consid�r�es, il n�y a pas si longtemps, comme des places fortes du GSPC Al-Qa�da au Maghreb. �Laissez-nous voir. C�est la premi�re fois qu�un ministre vient chez nous !�, diront des gamins ne d�passant douze ans d��ge aux gendarmes qui assuraient l�ordre public � l�arriv�e du ministre de l�Agriculture et du d�veloppement rural et de l�armada de responsables qui l�accompagnaient dans la localit� de Guelf�ne. Sur les 9 kilom�tres qui s�parent ce hameau perch� sur le piedmont du massif de Bouberak et le chef-lieu communal de Sidi-Daoud dans la wilaya de Boumerd�s, il y a quelques mois seulement, il n��tait pas tr�s indiqu� de circuler, m�me en plein jour. Le GSPC, avant sa soumission, faisait de cette r�gion son fief. Hassan Hattab, qui avait �pous� la localit� de Sidi-Daoud, avait install� dans les ann�es 1990 son quartier g�n�ral dans la r�gion de Bouberak, l��mir Zoheir, l�ex-sinistre chef de la zone 2 du GSPC, abattu par les forces de l�ordre, et d�autres redoutables chefs de seriate de l�insurrection islamiste arm�e ou simples terroristes, pour la plupart �limin�s par les services de s�curit�, sont �galement originaires de cette r�gion. L�autre fait marquant - c�est la conjoncture locale qui rend ce fait extraordinaire - est la pr�sence dans la foule entourant la d�l�gation de deux charmantes jeunes lyc�ennes, aux cot�s de leur maman victime du terrorisme, son mari ayant �t� assassin�, qui a re�u une aide dans le cadre du PPDRI (programme de proximit� de d�veloppement rural int�gr�). C�est pr�cis�ment dans le cadre de la politique de d�veloppement rural � second volet de cette visite ce mercredi � Boumerd�s - que M. Bena�ssa, le wali, le P/APW de Boumerd�s ainsi que les cadres sup�rieurs du secteur de l�agriculture et les directeurs ex�cutifs de la wilaya ont effectu� cette visite. Le PPDRI pour vaincre les h�ritiers de Hassan Hattab A Guelf�ne, la d�l�gation a �cout� les explications du directeur des for�ts, ma�tre d��uvre du PPDRI, qui a donn� des indications sur le programme au niveau de la wilaya. Par ailleurs, le chef de la circonscription foresti�re de Dellys a fait un expos� � la d�l�gation sur le projet �Guelf�ne�, qui co�tera � l�Etat plus de 41 millions de dinars. Ce projet englobe 300 actions, collectives ou individuelles, et concerne 300 familles. Selon les estimations des services des for�ts, 74 emplois seront cr��s. Sur les hauteurs de ce petit village, les visiteurs du jour ont admir� la verdoyante plaine du bas Sebaou dans le triangle Baghlia, Benchoud et Sidi- Daoud. Malheureusement, cette couleur printani�re cache toujours le reste du venin islamiste. Les invit�s de Guelf�ne ont vu �galement le d�veloppement du vignoble, notamment le raisin �sabene�, dont la r�gion de Sidi-Daoud est l�une des pionni�res. Le pi�mont de cette commune s�est transform� en v�ritable �chiquier vert. Des centaines de carr�s donnent chaque ann�e un fruit de haute qualit�. La d�l�gation a pu le constater. Des moyens de production aux jeunes ruraux pour �liminer le terreau des islamistes Sur l�autre versant du massif de Bouberak, dans la commune de Cap-Djinet, au village enclav� dit Haouch- Benouali, ensemble d�habitations pr�caires dont les premi�res maisons ont �t� construites par l�arm�e fran�aise pour regrouper les populations des hameaux de Bouberak emp�chant ainsi l�ALN d�avoir du soutien, la d�l�gation a fait escale. Pour rappel, apr�s l�ind�pendance, ce village est devenu la forteresse de la pauvret� et de la mis�re sociale. Pour l�anecdote, lorsque, en 2003, nous avions d�barqu�, pour la premi�re fois, � l�improviste, quelques jours apr�s le s�isme, afin de s�enqu�rir de la situation dans cette contr�e, les jeunes du village �taient d�concert�s par notre incursion. Et pour cause, ils nous avaient jur� que leur sort n�inqui�terait aucun responsable y compris le P/APC qui ne venait jamais les voir, m�me apr�s la terrible catastrophe de mai. Malheureusement, cette marginalisation longtemps refoul�e a co�t� cher. Dans les ann�es 1990, le GIA puis le GSPC ont su faire du sentiment de frustration parmi les jeunes, surtout, leur terreau pour s�implanter. D�ailleurs, un nombre ind�termin� d�entre eux est, selon nos informations, toujours en errance avec ce qui reste du GSPC de l�est de la wilaya de Boumerd�s. Mercredi dernier, c�est le chef de la circonscription foresti�re de Bordj-M�na�el, Benebri Nacer, et ses coll�gues qui ont accueilli le ministre et la d�l�gation pour leur donner des indications sur le programme � Haouche-Benouali qui touchera, selon la fiche technique, 912 familles et cr�era 96 emplois. L�investissement impliquant plusieurs secteurs co�tera � l�Etat pr�s de 133 millions de dinars. Mais le geste le plus marquant est sans aucun doute la remise symbolique par M. Bena�ssa des d�cisions � deux jeunes fellahs de la localit�. Ces d�cisions concernent l�attribution de trois vaches � chacun. Ces jeunes ont d�sormais un bien � d�fendre, une fonction productive, un rang social et un avenir. Il est clair qu�ils ne rejoindront pas de sit�t le maquis parce qu�ils auraient tout � perdre. Le m�me Benebri Nacer a accompagn� la d�l�gation jusqu�au village Benhamouda, dans la commune de Leghata (da�ra de Bordj-M�na�el). En d�pit d�un calme relatif constat� durant le mois du Ramadan � travers la wilaya de Boumerd�s, Leghata a d�fray� la chronique suite � plusieurs attentats perp�tr�s, nous dit-on, par des terroristes de la nouvelle g�n�ration, contre des gardes communaux et des GLD lorsque ces derniers �taient en situation d�isolement, donc en situation affaiblie. Sur les lieux, le chef de la circonscription foresti�re a expliqu� le programme de diversification �conomique pour 815 m�nages. Pour la concr�tisation de cet objectif, plus de 100 millions de dinars seront investis. A noter que la visite s�est d�roul�e dans toutes les localit�s sans difficult�s. Ceci est d� principalement aux r�sultats positifs obtenus depuis longtemps par les forces de s�curit� et au maillage de la r�gion par la combinaison et la pr�sence de toutes les forces de s�curit�. Par ailleurs, les fellahs et artisans ont expos� leurs produits et dialogu� avec le ministre. Le ministre, qui a agr�� le programme �labor� par le directeur des for�ts, savait de quoi il retournait. D�bureaucratiser le programme de d�veloppement rural Durant sont p�riple, M. Bena�ssa, le concepteur du PPDRI, a d�une part constat� un climat r�ceptif � l�endroit de cette formule de d�veloppement et d�autre part pris probablement note de l�insuffisance des sommes allou�es. Lui m�me et son directeur des for�ts ne cessaient de r�p�ter que l�argent est disponible. S�agit-il, d�s lors, de probl�mes bureaucratiques qui ralentissent le flux de financements ? S�rement. Nous citerons l�exemple de l�aide � la construction rurale qui est carr�ment bloqu�e dans la wilaya de Boumerd�s. En effet, pour d�bloquer l�aide de 700 000 DA � la construction ou � l�extension d�un logement rural, les services de la wilaya exigent la pr�sentation d�un permis de construire d�livr� sur la base d�un acte de propri�t� du terrain de construction. Or les responsables de l�administration ne sont pas sans ignorer le probl�me national du foncier priv� et ses imbrications au sujet de l�h�ritage et du partage, de m�me que la grande partie du territoire national n�est pas cadastr�e. Parler de g�n�ralisation de l�acte de propri�t� dans ces conditions, c�est faire cas de perversit�. Or la formule du certificat de possession est rejet�e par ces responsables. D�o� le blocage de ce programme qui entre dans celui du 1 million de logements promis par Bouteflika. L�ouverture et la r�fection des pistes d�acc�s demeurent largement en de�� de la demande. C�est le constat de tous. Or sans la route, personne ne peut �voquer une quelconque r�ussite de cet ambitieux programme. L�ouverture de routes est une action nodale dans les zones enclav�es. La r�ussite de ce programme contribuera � la lutte contre l�exode rural, � l�augmentation substantielle des revenus des familles et au renforcement de la s�curit� alimentaire du pays. Il aura �galement un aspect �cologique et les b�n�fices politiques et s�curitaires seront immenses. A l�exclusion de la question des pertes humaines, qui n�ont aucun prix, on peut se poser demander, en effet, combien co�te l�entretien des services de s�curit� charger de la lutte antiterroriste. Selon le bon sens paysan, s�rement, une bonne politique, transparente, ainsi qu�un peu d�argent du p�trole seraient � l�heure actuelle plus efficaces et moins co�teux humainement et �conomiquement. Dans ce climat de ratages monumentaux, le pouvoir en place sera bien inspir� s�il r�ussissait ce programme. C�est peut-�tre la meilleure chose qui puisse arriver � notre pays.