L�article intitul� �D�penses publiques en Alg�rie/Qui contr�le le contr�leur financier�, paru dans notre �dition du 21 d�cembre 2009, a fait r�agir un lecteur. Est-il lui-m�me contr�leur financier ? Peu importe, m�me s�il a tenu � garder l�anonymat, ce qui est dommage. Il se pose en d�fenseur de ce corps de la Fonction publique, corps tr�s peu connu au demeurant. Dans une s�rie en 4 parties du �Soir Corruption� sur les wilayas (les 9, 16, 30 mars et 13 avril 2009) que l�on peut consulter sur le site Internet du Soir d�Alg�rie www.lesoirdalgerie.com), nous avions d�j� trait� de la fonction du contr�leur financier, de ses pouvoirs et de ses d�rives, et d�j� un autre d�fenseur anonyme des contr�leurs financiers nous avait r�pondu (r�ponse parue dans l��dition du 30 mars 2009). Les contr�leurs financiers � fonctionnaires sous tutelle du minist�re des Finances � sont plac�s dans l�ensemble des institutions et administrations publiques, centrales et locales. Ils ont de larges pr�rogatives et leur pouvoir, notamment en mati�re de visas pour le paiement des d�penses publiques (dans l�ex�cution des march�s publics par exemple), est �norme, et certains d�entre eux ont tendance � en abuser, voire � verser dans la corruption. Nous publions ci-dessous le point de vue que nous avons re�u le 9 janvier dernier. Le d�bat est lanc�, aux lecteurs de l�alimenter. Djilali Hadjadj �Cette modeste contribution est destin�e avant tout � apporter un �clairage �manant de l'un des acteurs auxquels a �t� consacr� l'article publi� dans cet espace le 21 d�cembre 2009. Vous comprenez sans aucun doute les motifs d'une telle d�marche et cette intrusion dans un d�bat r�current sur le contr�le des d�penses publiques et les effets induits en mati�re de gabegie de gestion et de corruption qui se propage � grande �chelle vers tous les secteurs sans exclusive. L�auteur de l�article a braqu� les projecteurs de l'actualit� sur un texte, le d�cret ex�cutif n�09-374 du 16 novembre 2009, modifiant et compl�tant le d�cret n�92-414 du 14 novembre 1992 relatif au contr�le pr�alable des d�penses engag�es dont l'apport m'a paru, toutefois, et � mon sens, tr�s en de�� des attentes du corps de contr�le concern�, car il entame gravement l'efficience de celui-ci, d�j� tr�s affect� par son peu d'efficacit� dans la forme et dans les modalit�s de son ex�cution d'antan. N�anmoins, le contenu de l'article rapport� par votre quotidien, s'il est accrocheur par le titre, �Qui contr�le le contr�leur financier�, il ne semble pas apporter tous les �l�ments n�cessaires au lecteur pour lui permettre d'appr�hender la v�ritable mission des contr�leurs financiers et leur permettre d'�mettre un jugement de valeur sur l'�tendue des attributions et comp�tences de ce corps, ainsi que leur mise en �uvre, en �num�rant �galement de mani�re exhaustive les contraintes de tous les jours. En effet, d�s le d�part, vous semblez donner � travers le titre de l'article une importance � ce corps qu'il n'a pas et qu'il n'aura jamais, car la transformation �d'un chat en tigre� demeure une vue de l'esprit, voire une utopie, pour la bonne raison que d�s l'origine son sort �tait scell� pour �tre uniquement un �chat� et rien d'autre qu'un �chat�, n'en d�plaise � notre susceptibilit� et � notre amour-propre, et une telle �vidence sera corrobor�e par le contenu ci-dessous d�velopp� tout au long de cet article. Exclu d'avancement dans la fonction sup�rieure D'ailleurs, cette interrogation sugg�re au lecteur l'id�e que ce responsable dispose d'une �autonomie de d�cision sans limite�, ce qui est absolument faux. Aussi, une plus grande objectivit� dans le traitement et l'analyse du dossier du contr�le pr�alable aurait �t� mieux comprise par le profane si l'approche avait port� sur un th�me autrement plus judicieux et libell� ainsi qu'il suit : �Qui contr�le le contr�leur financier�. Pour cerner la probl�matique de la mission de contr�le dans sa globalit�, il convient de proc�der � l'analyse du statut de ce corps, ses missions, et, le cas �ch�ant, les sanctions et protections pr�vues par la loi. . Le statut. Il est une �vidence incontestable que le mode de classification d'un poste de travail constitue le premier �l�ment contributif pour la valorisation du poste et en cela, il faut rappeler que le poste de travail de contr�leur financier est class� comme poste sup�rieur et non fonction sup�rieure, m�me s'il b�n�ficie de la r�mun�ration de base attach�e � la fonction sup�rieure. Il est � ce jour exclu en mati�re d'avancement dans la fonction sup�rieure, ne b�n�ficie pas de cong�s sp�ciaux, ni d'affiliation au Fonds sp�cial des retraites (FSR). Enfin, il faut rappeler qu'il est nomm� par simple arr�t� du ministre de Finances. De ce fait, la pr�carit� li�e au mode de d�signation, le d�classement ou d�calage de son rang par rapport � l'ordonnateur souvent d�sign� par d�cret, le placent dans une position inconfortable pour ne pas dire d'inf�riorit�. Une telle situation traduit la volont� de certaines sph�res du pouvoir � perp�tuer cette caricature de �l'�pouvantail� de cet organe pour pr�server leur autonomie pleine et enti�re en mati�re de gestion des deniers publics. Une telle d�marche rappelle �galement l'adage �du pot de fer contre le pot de terre�, et � ce titre, le contr�leur financier serait bien avis� de se pr�server d'un �clatement programm�. Le deuxi�me aspect relatif aux missions et pr�rogatives du contr�leur financier ne semble pas per�u dans toute sa dimension par l�auteur de l�article, m�me si les points soulev�s ne sont pas n�gligeables : il est difficile d'appr�hender le probl�me sur le plan pratique � l'occasion de l'exercice de ces pr�rogatives. . Les missions du contr�leur financier. D'abord, il faut s'impr�gner de l'id�e que les investigations du contr�leur financier portent g�n�ralement sur l'aspect formel. Leur degr� d'amplitude peut parfois �tre qualifi� de superficiel si des injonctions expresses ou verbales �manent de l'autorit� centrale hi�rarchique pour donner les directives de traitement de dossiers sensibles. Donc, cela peut �tre un contr�le effectu� selon deux niveaux : ordinaire ou exceptionnel. Il porte sur des actes introduits par des secteurs implant�s sur le territoire de la comp�tence du contr�leur financier. Ainsi, la comp�tence territoriale ou sectorielle connue, le contr�le exerc� porte sur la qualit� de l�ordonnateur, l'existence des cr�dits ou des postes, la conformit� des pi�ces justificatives de la d�pense avec le montant engag�, l'exacte imputation, etc. Le passer-outre de l'ordonnateur Nous ne rajoutons pas la conformit� aux lois et r�glements en vigueur, car celle-ci demeure � mon avis assez versatile du fait que l'interpr�tation des textes est susceptible d'un passer-outre de la part de l'ordonnateur. Il est �galement superflu de rappeler qu'en mati�re de gestion, l'opportunit� de la d�pense est pr�pond�rante, et � ce titre, l'ordonnateur en est le seul d�positaire. La facult� de faire un bon ou un mauvais emploi des deniers publics appartient en exclusivit� � l'ordonnateur. Donc, m�me si des cas d'�vidence av�r�e de dilapidation de deniers publics dans des projets les plus saugrenus sont pr�sent�s, ils doivent �tre ent�rin�s. Ce muselage de l'organe de contr�le est destin� parait-il � emp�cher les blocages et les retards souvent constat�s dans l'ex�cution des diff�rents plans de d�veloppement, m�me si d'un autre c�t�, il est prescrit au contr�leur financier de traiter, d'examiner et de statuer sur un dossier dans le d�lai imp�ratif de 10 jours. . Les limites prescrites au contr�le financier. Ces limites sont vulgaris�es par la restriction du champ d'application ou des modalit�s d'exercice de ce contr�le : exemption du contr�le de certaines institutions publiques ; institution d'un contr�le appropri� au moyen de la proc�dure des engagements provisionnels ; mise en place d'un contr�le a posteriori au niveau de certaines institutions, et instauration d'un visa global imposable au contr�leur financier en mati�re de march�s publics. Ces restrictions dans la mise en �uvre de la formalit� du contr�le r�tr�cissent davantage le champ d'intervention de celui-ci et sont accompagn�es par ailleurs des mesures suivantes qui vident de son sens cette formalit� : r�duction des d�lais d'examen et de v�rification des dossiers qui passent de 30 jours dans le pass� lointain, � 20 jours dans le pass� r�cent, puis � 10 jours � la faveur du dernier d�cret, sans tenir compte des cas de complexit� de certains dossiers ; recours au passer-outre par l'ordonnateur en cas de rejet d�finitif ; r�forme ou r�vision par la tutelle du rejet d�finitif prononc� par le contr�leur financier si celui-ci s'av�re infond� ; la prorogation fr�quente des d�lais de cl�ture des visas officialis�e par le nouveau texte va mettre � rude �preuve la dur�e de l'exercice budg�taire pr�conis�e par la loi ; le retrait de la possibilit� de transmission des dossiers qui ont fait l'objet de passer-outre aux institutions sp�cialis�es � Cour des comptes ou justice �, par le contr�leur financier. Une telle d�cision d�note l'infantilisme observ� � l'�gard d'un organe de contr�le imbu soi-disant de responsabilit� et de pouvoir exorbitants. Prendre comme bouclier la loi, la tutelle ou le wali ? Sanctions du contr�leur financier. Tenir compte de tous ces �l�ments renseigne clairement sur la volont� affich�e par les pouvoirs publics de limiter outranci�rement les pr�rogatives de cet organe de contr�le et de l'emp�cher ainsi d'exercer convenablement sa mission. En outre, il est utile de rappeler les sanctions pr�conis�es � l'endroit du contr�leur financier par l'article 88 de l'ordonnance n� 95 - 20 du 17 juillet 1995 relative � la Cour des comptes, parmi lesquelles on peut citer entre autres : visas intervenus en infraction des lois et r�glements en vigueur, et en m�me temps les rejets non fond�s. Il est donc astreint � observer ce jeu d'�quilibrisme tout au long de l'exercice budg�taire sans pr�judice des autres contraintes li�es � la gestion des ressources humaines dont il a la charge. De plus, il ne faut pas omettre d'insister sur la multiplicit� et la diversit� des secteurs dont il assure la couverture en mati�re de contr�le. La diss�mination de toutes ces formalit�s tout au long de l'itin�raire emprunt� par les d�penses publiques interpelle le contr�leur financier � r�soudre cette �nigme tr�s proche de la quadrature du cercle. De telles intentions ne peuvent que contraindre celui-ci � l'immobilisme puisqu'il est maintenu en constante d�stabilisation. Ce climat sp�cieux lui sugg�re l'adoption d'une attitude d�fensive pour ne pas engager sa responsabilit� puisque la ma�trise d'un dossier n'est atteinte que par une d�marche ad�quate appropri�e permettant d'�viter tous les �cueils. L'exercice d'un contr�le serein et apais� susceptible de permettre in fine l'obtention de r�sultats fiables n'est pas privil�gi� par le syst�me en place aux antipodes de tels objectifs. Par ailleurs, l'instinct de survie dicte � ce dernier l'option vers le choix le plus judicieux pour assurer sa propre protection, et � ce titre, il se trouve devant un drame corn�lien o� il h�sitera longtemps avant de s'aligner et prendre comme bouclier la loi, la tutelle ou le wali. La majeure partie de ce corps pr�f�re, parait-il, faire all�geance au wali pour la bonne raison qu'il peut r�gler les probl�mes du service et qu�il repr�sente le ministre des Finances au niveau local. Cette all�geance r�elle ou suppos�e ne manque pas de laisser planer le doute sur la cr�dibilit� de ce corps � l'instar des autres responsables locaux d'ailleurs soumis aux contraintes propres � leurs secteurs respectifs. D�liquescence observ�e dans la quasi-totalit� des services publics Quant � l'int�grit� de ce corps en mati�re de corruption, il est n�cessaire de rappeler que l'immunisation contre ce fl�au ne parait pas � l'ordre du jour des responsables politiques, puisque les conditions propices pour sa prolif�ration sont v�hicul�es par une neutralisation g�n�ralis�e des organes de contr�le. La d�liquescence observ�e dans la quasi-totalit� des services publics reste le vecteur le plus important pour r�pandre ce fl�au dans les rouages de l'Etat jusqu'ici �pargn�s. S'agissant de l�incomp�tence, il est utile de rappeler qu'� ce niveau de nomination la comp�tence ne peut �tre consid�r�e comme un crit�re d�terminant dans le choix du responsable tous secteurs confondus. D'autres crit�res abstraits difficiles � appr�hender, eu �gard � leur origine intra et extra muros, participent � mon avis de fa�on essentielle � la fixation du profil idoine pour le choix des candidats � ces postes sup�rieurs. En conclusion, il est n�cessaire de rappeler par honn�tet� morale qu'une large majorit� de ce corps est constitu�e par des cadres honn�tes int�gres et comp�tents, et c'est cette majorit� imbue de hautes valeurs morales qui r�siste sto�quement au d�clin programm� de cette institution pour toutes les raisons cit�es plus haut. L'adoption de cette attitude n'est qu'une tentative d�sesp�r�e pour pouvoir �chapper � l'image �cul�e de ce corps dont on dit �qu'il sert de paravent, sinon de bouc �missaire, � toutes les turpitudes humaines�. A. B., un lecteur du Soir d�Alg�rie