L'Algérie a célébré, hier, pour la première fois dans l'histoire, le 1er jour de l'an amazigh, amenzu n yennayer, de manière officielle, après sa consécration journée nationale chômée et payée. De l'émergence de la revendication identitaire à la reconnaissance de tamazight lange officielle puis la consécration de Yennayer comme journée nationale, un chemin parsemé d'embûches a été parcouru. Au risque et au péril de leur vie, des militants se sont sacrifiés pour la cause. De Bessaoud Mohand Arab, fondateur de l'Académie berbère en exil en France, à Matoub Lounès, assassiné en 1998, des militants ont connu les affres des prisons à l'époque du parti unique pour le seul tort d'avoir revendiqué de vivre leur identité pleinement et sereinement dans leur pays. Des sacrifices qui n'ont heureusement pas été vains, et aujourd'hui, l'Algérie semble avoir entamé une profonde réconciliation avec sa véritable identité et histoire. Le 1er Yennayer est célébré par l'ex-parti unique qui a réprimé violemment les revendications identitaires et tous les partis au pouvoir ainsi que le pouvoir lui-même à travers les institutions de l'Etat. C'est à Ghardaïa que le coup d'envoi de la célébration officielle a été donné jeudi par le ministre de la Communication, Djamel Kaouane. «Yennayer officialisé constitue un évènement national donnant à la dimension amazighe une place importante dans la vie sociale des Algériens», a lancé le ministre. Pour lui, cet acte «historique» décidé par le président de la République contribue inéluctablement au renforcement de la cohésion du peuple algérien qui s'enrichit, après la constitutionnalisation de tamazight comme langue nationale officielle, d'un autre acquis identitaire. «Le secteur de la Communication, à travers les médias publics, s'est mis au rendez-vous de ces festivités de Yennayer sur l'ensemble du territoire national, en vue de promouvoir notre identité amazighe», a-t-il ajouté. Le ministre de la Communication a annoncé, en outre, que le thème de l'identité nationale a été retenu pour la 4e édition du Prix du président de la République du journaliste professionnel 2018. Implication obligatoire A Bouira, un autre représentant du gouvernement s'est engagé pour la promotion de tamazight dans son secteur. Il s'agit du ministre des Affaires religieuses et des Waqfs, Mohamed Aissa. «Nous sommes venus pour célébrer pour la première fois Yennayer de façon officielle à Bouira. Nous sommes très fiers de notre appartenance et de nos origines amazighes qui constituent l'une des constantes de l'identité nationale», a-t-il lancé à l'ouverture d'un colloque national sur le thème «Les valeurs civilisationelles dans le patrimoine culturel amazigh» organisé avant-hier à la maison de la culture Ali Zaâmoum de la ville de Bouira. Il a exprimé son engagement à œuvrer pour le développement et la promotion de la langue amazighe à travers des programmes qui seront lancés dans les différents instituts, mosquées et écoles du secteur et ce, à partir de cette année. «Notre département veut contribuer, lui aussi, à la promotion des origines amazighes (de l'Algérie) à travers l'enseignement obligatoire de tamazight dans les instituts de formation des imams à Bouira, Tizi Ouzou (Institit Illoula) ainsi qu'à Batna (Institut Al Zana El Baidae)», a-t-il annoncé. Le ministre a ajouté que les imams seront tous appelés à apprendre tamazight dans le cadre des cours d'amélioration du niveau et réactualisation des connaissances. «Nous allons veiller à ce que les imams maîtrisant tamazight fassent obligatoirement les prêches en langue amazighe», a-t-il insisté. Côté festivités, un grand gala rassemblant les folklores de différentes villes du pays et un programme musical festif ont été animés jeudi soir à Alger en célébration de Yennayer 2968 par plusieurs associations culturelles. Organisé par le ministère de la Jeunesse et des Sports à la Coupole du complexe olympique Mohamed-Boudiaf, ce gala marque les premières célébrations du Nouvel An amazigh après sa réhabilitation et sa consécration fête nationale. Seize troupes folkloriques et musicales en provenance de villes comme Tizi Ouzou, Bouira, Ghardaïa, Guelma, Khenchela, Oran, Tlemcen ou encore Sidi Bel Abbès se sont succédé sur la scène de la Coupole. Devant un public relativement nombreux, ces troupes ont mis en avant la richesse culturelle de chaque région à travers la musique, la danse et les costumes traditionnels. De la musique kabyle très rythmée, du aâlaoui, du aïssaoua, du diwan en zénète, du chant des rahaba ou encore de la zorna sont autant de musiques et de danses traditionnelles présentées au public, et qui reflètent la richesse et la grande diversité culturelle algérienne. Aussi, le premier jour de l'an berbère, qui célèbre l'intronisation de Chachnaq comme 1er prince de la XXIIe dynastie pharaonique, après avoir conquis l'Egypte, 968 ans avant notre ère, a été fêté dans toutes les wilayas du pays, dans les villes comme dans les villages.